vendredi 21 novembre 2014

Surirradiés d'Epinal : « Dévoué à mes patients »

Nancy. Premier des trois prévenus à se présenter à la barre, Jean-François Sztermer, l’un deux radiothérapeutes, s’est expliqué hier sur les surirradiations survenues à l’hôpital d’Epinal. L’homme, 66 ans, assure avoir fait dans les mois qui ont suivi « plusieurs tentatives de suicide ». Une déclaration qui soulève un certain scepticisme chez le président : « Question : est-ce qu’un médecin peut faire plusieurs tentatives de suicides ? Généralement, il ne se rate pas… ».
Jean-François Sztermer affirme aussi que tout allait pour le mieux dans ce service de radiothérapie d’Epinal, que les deux radiothérapeutes ne vivaient pas reclus dans une tour d’ivoire, comme ce fut souvent dit, mais travaillaient « en équipe », avec les manipulatrices et le radiophysicien.
Quelques minutes plus tôt, Jean-Marc Simon, radiothérapeute dépêché dans les Vosges par le ministère de la Santé, avait livré un tout autre tableau, avait relevé « des négligences, une absence de vérifications des procédures, une nonchalance générale et une ambiance malsaine ».
Une chose est sûre, Jean-François Sztermer assure qu’il est innocent. « Je me suis dévoué à mes patients ». Il assure également qu’on ne peut lui faire qu’un unique grief : « Le suivi après le traitement ».
« Ce passage des coins statiques aux coins dynamiques (N.D.L.R. : à l’origine des surirradiations à 20 % subies par 24 patients) s’est fait de façon un peu précipitée, non ? », interroge le président.
« Non, Joshua Anah, le radiophysicien, m’a proposé ça en 2003 et le premier patient traité avec cette technique, c’était en mai 2004. Mais, avec Michel Aubertel, nous avons donné notre accord. J’avais vu Anah faire des démonstrations en présence des manipulatrices ».

« Il m’a dit que les doses étaient négligeables »

« Comment une erreur a-t-elle pu se produire ? »
« C’est une erreur de calcul qui relève de la compétence exclusive de Joshua Anah. Par ailleurs, à partir du moment où il m’a dit qu’il était prêt, j’étais persuadé qu’il avait formé les manipulatrices ».
« Il n’y avait aucun document écrit auquel se reporter en cas de doute… ».
« Monsieur Anah n’a pas jugé utile d’en faire un… ».
Le président reprend, caustique : « L’accident, finalement, c’est la faute à pas de chance… ».
« En fait, une des manipulatrices a fait une erreur et l’a transmise à trois autres. Moi, j’étais serein, c’est au radiophysicien de vérifier les calculs des manipulatrices ».
« Vous n’avez donc aucune responsabilité dans la survenance de cet accident…»
« Non. Je ne pense pas que j’aurais pu l’empêcher… ».
Un suivi correct des patients par les radiothérapeutes aurait permis, selon de nombreux experts, de relever cette gravissime erreur. Jean-François Sztermer assure que « les patients n’étaient pas lâchés dans la nature mais réadressés à leurs urologues. Les autres médecins sont aussi capables de déceler des complications. Et je n’ai jamais vu de texte qui oblige un radiothérapeute à revoir ses patients… ».
Concernant les matching, clichés non pris en compte dans la dose totale de rayonnement et qui ont engendré une surirradiation de 8 % sur 424 malades, Sztermer charge encore Anah, le radiophysicien.
« Depuis 2000, je savais que si les doses de ces contrôles – les ‘’ matching ‘’ – étaient significatives, il fallait les déduire du total. J’ai demandé à Anah de faire les calculs, il m’a assuré qu’il n’y avait pas de problème, que ces doses étaient négligeables ».
« Franchement, peut-on en radiothérapie, une discipline qui peut être dangereuse, se satisfaire d’informations aussi insignifiantes que ça : ‘’ des doses négligeables ‘’ ? ».
« Je lui ai fait confiance, je pensais qu’il avait fait correctement son travail… », répond le médecin qui accuse aussi Anah d’avoir voulu falsifier les dossiers médicaux. Le radiophysicien sera à la barre ce vendredi.

http://www.estrepublicain.fr/actualite/2014/11/21/devoue-a-mes-patients-nfel

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