jeudi 29 janvier 2015

Pour DSK, le procès du Carlton de Lille débute lundi

L'ex-patron du FMI Dominique Strauss-Kahn, terrassé au sommet de sa carrière par l'affaire du Sofitel de New York, scandale sexuel sans précédent, se retrouve lundi devant le tribunal correctionnel de Lille pour proxénétisme aggravé, accusé d'avoir été au coeur d'un réseau de prostitution mis en place par ses amis du Nord. Les juges lillois ont estimé, d'une part que DSK ne pouvait ignorer que les filles qu'on lui présentait lors de parties fines étaient des prostituées rémunérées, d'autre part qu'il avait été le "pivot central" ou encore le "roi de la fête" de ces soirées, a indiqué une source judiciaire. Le parquet avait toutefois requis un non-lieu pour Dominique Strauss-Kahn. Et pourrait bien réclamer sa relaxe au procès.
Longtemps favori des sondages en vue de la présidentielle de 2012 en France, Dominique Strauss-Kahn comparaîtra dans l'affaire dite du Carlton aux côtés de 13 autres prévenus à partir du 2 février. Le procès est prévu pour durer trois semaines. DSK est devenu au fil de l'instruction l'un des personnages centraux d'une affaire de proxénétisme ayant débuté dans des hôtels de luxe de Lille. A la suite du scandale du Sofitel de New York et presque trois ans après sa mise en examen, il va de nouveau faire face à l'étalage public de ses moeurs sexuelles, qui lui auront coûté sa carrière politique.

DSK savait-il?

DSK pouvait-il ignorer qu'il avait affaire à des prostituées? Interrogée, l'une d'elles, "Jade", s'est montrée particulièrement sévère, selon une source judiciaire. Elle sera sur les bancs de la partie civile. "C'est vraiment nous faire croire qu'il est naïf", a-t-elle notamment lâché, alors que tous les autres protagonistes étaient au courant, selon elle. Les avocats de DSK ont très rapidement dénoncé un "acharnement" des juges. Me Richard Malka, avait au moment du renvoi dénoncé "une motivation idéologique, politique, morale", un renvoi "certainement pas fondé sur une analyse juridique des faits". La ligne de défense n'a pas bougé : DSK était adepte du libertinage, pas de prostituées.
Au cours de l'instruction, en fait de parties fines, certaines participantes ont évoqué des séances de "carnage", d'"abattage" ou encore de "pure consommation sexuelle", selon des propos rapportés. A quelques jours du procès, la défense de DSK n'a pas souhaité s'exprimer davantage. "On criminalise les clients, ce qui n'est pas dans l'esprit des législateurs", déplore de son côté Me Dupond-Moretti, avocat de David Roquet, ex-patron d'une filiale du groupe de BTP Eiffage qui sera sur le banc des prévenus. Son défenseur s'était précédemment agacé de voir une affaire à laquelle on avait donné une qualification criminelle "pour se donner du confort" finir devant un tribunal correctionnel.
En 2011, sur des renseignements anonymes, la police judiciaire de Lille se penche de près sur les fréquentations de l'hôtel Carlton et de l'hôtel des Tours, où René Kojfer, en charge des relations publiques, ferait venir des prostituées pour satisfaire quelques clients. La surveillance mise en place, notamment sur le téléphone portable de René Kojfer, fait sortir peu à peu des noms, dont celui de Dominique Strauss-Kahn, lâché au détour d'une conversation sur de folles soirées lilloises et belges. Lorsque René Kojfer est placé en garde à vue, une information judiciaire est en cours depuis près de sept mois. Il est le premier mis en examen, le 7 octobre 2011.
"Il y a un décalage, une incompréhension vraiment forte entre la définition stricto sensu juridique et la réalité des choses", avance Me Hubert Delarue, son avocat, qui évoque des relations "entre adultes consentants" et son client qui n'a "jamais touché un centime". De Kojfer, les enquêteurs remontent un réseau de notables qu'ils soupçonnent de profiter des filles mises à disposition par le chargé des relations publiques: Emmanuel Riglaire, avocat au barreau de Lille, mais aussi David Roquet et Fabrice Paszkowski, un entrepreneur spécialisé dans le matériel médical.

Dodo la Saumure parmi les mis en examen

Ces deux derniers font partie d'un cercle amical, libertin, parfois franc-maçon, auquel viennent s'ajouter le policier Jean-Christophe Lagarde, directeur de la sûreté départementale du Nord, et Dominique Strauss-Kahn. "David Roquet paie un système mis en place bien avant lui dans sa boîte", tonne Me Dupond-Moretti, parlant d'une "forme de lobbying" auprès de DSK. Fabrice Paszkowski semble être le principal contact de ce dernier lorsqu'il vient passer des soirées dans le nord: l'instruction relève des milliers de textos échangés pour se donner rendez-vous. Le Nordiste a rencontré DSK pour la première fois à Béthune (Pas-de-Calais), en 2006. Avec Roquet et Lagarde, il participe en outre à trois voyages à Washington pour des soirées débridées.
Autre figure très médiatique du procès, Dominique Alderweireld, mieux connu sous le nom de Dodo la Saumure, a été l'un des derniers mis en examen, bien que son nom soit apparu très tôt dans la procédure. Souteneur en Belgique, où il considère mener une activité "tolérée", il est reproché à Dominique Alderweireld que des prostituées impliquées viennent de ses établissements. Le troisième volet de l'affaire concerne les dépenses engrangées pour payer les prostituées et organiser les voyages à Washington. Quatre des 14 prévenus sont mis en examen pour escroquerie, complicité ou recel.
 

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