dimanche 26 avril 2015

Courcelles : deux ans de prison et trois mandats d’arrêt lancés pour enlèvement et séquestration

Vol de fringues ou carottage d’un kilo et demi de drogue ? À chacun sa version. Les trois prévenus (Adlen Laib, 23 ans, son oncle Miloud Merdjaoui, 31 ans et Zacharie Yakhoui, 20 ans) évoquent un cambriolage, au domicile du premier, portant notamment sur des vêtements et des consoles de jeux.
Après avoir mené leur petite enquête, ils auraient identifié les auteurs du vol et auraient décidé de régler l’affaire sinon à l’amiable, à tout le moins à leur manière. Sans en référer à la police. Voilà comment Leïla, une fille du quartier, et Oumar, un mineur de 16 ans, se sont retrouvés dans les griffes du trio. Pour une explication des plus musclée.
Me Rouzet : « Ce sont des méthodes de petits caïds contre une fille et un mineur. Ce n’est pas très glorieux »
« D’une barbarie rare dans notre région », s’emporte Me Guichard, l’avocat de Leïla. « C’est la loi de jungle », peste cette dernière qui dézingue la thèse du vol de vêtements : « Je fais du 34, j’ai déjà du mal à trouver des habits à ma taille. Regardez-le lui (elle indique le solide gabarit de Laib). C’est des conneries ! On m’a kidnappée pendant plus de cinq heures. On m’a volé mon or, ma chaîne, mes bagues et mon salaire. On m’a frappé les jambes avec des cannes télescopiques ! Regardez mes jambes (elle exhibe des marques dans la peau). Ça, c’est parce que je ne donnais pas assez vite le code de ma carte bancaire. On me réclamait 20 000 € (N.D.L.R. : d’où le spectre de la drogue évoquée lors des débats). Ils regardent trop les films ceux-là ! Ouais, c’est vrai, j’ai été délinquante mais c’était il y a 15 ans. C’est fini tout ça ».
La fluette plaignante, qui dit peser 30 kilos, explique avoir été embarquée, le 17 juillet dernier. On lui aurait fait franchir la barrière du bois de Courcelles-lès-Montbéliard avant de l’entraîner au fin fond de la forêt pour une expédition punitive. On lui aurait montré un trou laissant à penser qu’on allait l’enterrer dedans. Elle parle d’Oumar, que les autres disaient vouloir jeter sur une voie ferrée. Un mineur qui était en pleurs.
Merdjaoui, qui reconnaît dans ses auditions « avoir tarté » intervient posément : « Si on avait mis tous ces coups, les pompiers l’auraient ramassée à la petite cuillère ». Or, l’interruption de travail résultant de l’examen est de… zéro jour. Une brèche dans laquelle s’engouffreront plus tard Mes Euvrard, Rey-Demaneuf et Barré, les avocats de la défense.
Me Rouzet, qui intervient pour le mineur, parle de « méthodes d’un autre temps, d’une autre culture. Des méthodes de petits caïds contre une fille et un mineur. Ce n’est pas très glorieux ». Leïla dit encore qu’on lui a volé sa voiture, qu’on l’a emmenée à la station d’Écot pour faire le plein avant de revenir sur Belfort pour aller voler des effets chez sa copine Assma.
Un rocambolesque périple qui donne lieu à des passes d’armes épiques entre avocats. Chacun cherchant à interpréter le dossier à son avantage en pointant les incohérences des autres.

Me Euvrard : « Une hystérie collective »

Au ministère public, Marie-Charlotte Fiorio en convient. Les poursuites reposent grandement sur les déclarations de la prénommée Leïla. Elle qualifie au demeurant les « explications des prévenus comme hallucinantes ». Pour la procureur, il y a bien eu enlèvement et séquestration. En conséquence, elle requiert « une peine dissuasive » dont elle fixe les contours : deux ans de prison ferme.
Me Euvrard parle de « degré d’hystérie collective ». Selon lui, le tribunal ne peut se faire de certitudes à la lumière des éléments du dossier. Cependant, il admet que Leïla « a pris une bonne raclée ». Me Rey-Demaneuf invite les magistrats à « s’affranchir des a priori. Arrêtons avec les fantasmes ! Le bois de Courcelles n’est pas celui où l’on va estourbir quiconque. C’est là où l’on va faire son jogging ». Elle pointe aussi les incohérences des plaignants dans le timing des sévices dénoncés. Me Barré pointe du doigt « des exagérations » et des « visions subliminales » chez l’énergique Leïla.
Les trois prévenus ont choisi de ne pas attendre le jugement. Ils ont quitté la salle d’audience alors que le tribunal se retirait pour délibérer.
Moins d’une heure plus tard, le couperet tombait : deux ans de prison ferme pour chacun des prévenus avec mandat de dépôt et plus de 10 000 € de dommages et intérêts à verser aux parties civiles.
Comme le trio n’était plus là, trois mandats d’arrêt ont été décernés.

http://www.estrepublicain.fr/edition-belfort-hericourt-montbeliard/2015/04/25/courcelles-deux-ans-de-prison-et-trois-mandats-d-arret-lances-pour-enlevement-et-sequestration

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