vendredi 21 janvier 2011

Direct..Le témoignage poignant des enfants Bissonnet

DIRECT - Après avoir entendu hier Reynald et Claudine Belkacem, respectivement fils et seconde épouse de Meziane, la cour poursuit aujourd'hui l'audition des parties civiles. Sont attendus Marc et Florent Bissonnet, les enfants de Bernadette, ainsi de Jean-Pierre Juan, le frère de la victime.


8 h 40 - 9 h 40 - Reprise de l'audience. Marc Bissonnet, 28 ans, s'avance à la barre.
Le président M. Mocaer l'invite à s'exprimer. Au cours d'un long discours, le jeune homme retrace le déroulement des faits, et fait part de ses ressentis. "A l'époque, je travaillais à Boulogne-Billancourt", commence Marc. Il explique comment il a appris le décès de sa mère. Le matin du 12 mars 2008, son patron l'aurait


convoqué pour lui annoncer qu'un drame s'était produit. "J'ai alors appelé mon père. Il m'a dit : "Il est arrivé quelque chose à maman." Je lui ai demandé : "Mais qu'est-ce qu'il est arrivé ?" "Un accident", lui a déclaré Jean-Michel Bissonnet.


Suite à cette conversation téléphonique, il a quitté son logement, situé à Suresnes (région parisienne), pour Montpellier. "J'imaginais que ma mère était à l'hôpital. On ne s'imagine pas ça. Là, j'arrive à l'aéroport de Montpellier et je croise ma cousine de Béziers. Je me dis qu'il n'y a quelque chose de pas normal. "Mais qu'est-ce qu'il y a ? Mais qu'est-ce qu'il y a ?", lui ai-je demandé."


Marc est en pleurs. Il raconte comment il a retrouvé son père, comment se sont déroulés les obsèques de sa mère, Bernadette. "Mon père était effondré", explique-t-il.


"Le dimanche (NDLR : au lendemain des obsèques), je ne me souviens de rien. Mon frère et Anne-Gaëlle ont souhaité emmener mon père voir "Bienvenue les Chti's" au cinéma pour lui changer les idées. Moi, depuis trois ans, je ne peux plus regarder une émission de faits divers, des films de meurtriers, je regarde des conneries pour pouvoir dormir le soir ! Et encore, aujourd'hui, je tourne dans mon lit pour trouver le sommeil."
(...)
"Le mardi suivant, j'ai été convoqué par les gendarmes. A propos du soutien que l'on a eu, je tiens à dire que l'on a eu aucune aide psychologique, aucune écoute, aucun numéro à appeler."
(...)
"Les jours suivants, je me souviens de rien, si ce n'est qu'il fallait que j'envisage l'avenir. Il fallait que je sois là pour mon grand-père."
(...)
"Mon père a été interpellé. Il va être entendu. En ce qui concerne sa garde à vue, pour moi, c'était pour lever tous soupçons. Mais, le gendarme Geniès n'est pas allé par quatre chemins. Il m'a dit: "Votre père est coupable. L'enquête est terminée. Nous avons tous les éléments."


Le jour de l'interpellation de Jean-Michel Bissonnet, il était prévu que ce dernier passe un scanner avant d'aller à la gendarmerie. Or, au final, il a été arrêté devant son domicile par plusieurs gendarmes. "Alors, pourquoi l'arrêter comme ça ? Il a fallu faire ça à la militaire !"
(...)
"Après 24 h de garde à vue, on pense qu'il va sortir. Et là, c'est l'effroi. On apprend qu'il va rester en prison. Pourquoi ? Pourquoi ? On ne comprend pas. Et là, on est dans l'expectative. Dans un reportage sur France 3, le procureur annonce qu'il ne voit pas pourquoi il mettrait en doute la parole du jardinier. Il a déclaré : "Il y a des gens qui disent que le couple s'aimait, d'autres disent qu'ils se détestaient". Là dessus, il n'y a eu aucun démenti et les journaux ont repris ça. Plus tard, dans le dossier, j'ai pu voir que personne n'a pu mettre en doute la bonne santé du couple."
(...)
"J'ai été entendu par le capitaine Leclerc. Pendant quatre heures, on m'a répété que mon père était coupable, que Belkacem avait tout dit. Tout était orienté à charge. Mes parents s'aimaient. Ils étaient démonstratifs."


Marc Bissonnet en veut à la presse.
Il attaque les médias. "Il y a eu des articles dans lesquels on retrouve les écoutes téléphoniques". Or, d'après lui, ces dernières n'ont pas été retranscrites correctement. "Dans la presse, tout a été exagéré notamment sur le patrimoine financier. Je ne sais pas, ils parlaient en francs alors que nous, on parle en euros. Aujourd'hui, je paierai extrêmement cher pour qu'ils (NDLR: les journalistes) ne soient pas là. Je ne comprends pas ce voyeurisme. C'est notre vie privée."


Marc Bissonnet s'interroge. "Pourquoi mon père aurait-il fait appel à une personne qui passe 3 ou 4 fois dans l'année à la maison, et en qui il n'a pas confiance, pour assassiner ma mère ? Pourquoi, on fait descendre dans le sud un vieux à moitié sénile pour se débarrasser l'arme du crime ?" D'après lui, le scénario du crime avancé par M. Belkacem n'est pas concevable. "Mon père n'a jamais rien caché dans cette enquête."


Il remet en cause la perquisition qui s'est tenue sur les lieux du crime. Plusieurs disques durs n'auraient pas été saisis par les enquêteurs pour analyse.


"J'ai perdu ma mère, j'ai perdu mon père, j'ai perdu mon boulot, la mère de mes enfants, j'ai tout perdu !", clame Marc Bissonnet en pleurs à la barre. "Si demain, on m'apporte la preuve que mon père est coupable, je ne lui pardonnerai pas. Je veux que tous paient. Nous, il nous faut des preuves. On ne peut pas se baser sur des hypothèses. Si mon père est condamné, qu'il le soit sur des éléments factuels et non sur des interprétations."


9 h 45 - "Avec votre frère Florent, vous êtes les principales victimes"
Le président de la cour prend la parole : "La cour ne peut que s'incliner que devant votre douleur. Avec votre frère Florent, vous êtes les principales victimes. Vous avez perdu votre mère et simultanément votre père. Votre famille est aujourd'hui divisée."


9 h 50 - M. Mocaer : "A quand date votre dernière conversation avec votre mère ?"
Marc Bissonnet : "Le dimanche avant les faits. Je ne me souviens plus si c'était une conversation avec ma mère ou avec ma mère et mon père. Je les appelais tout le temps.
M. Mocaer : "Il est question d'une conversation téléphonique le soir des faits. Qu'est-ce que vous pouvez nous dire ?"
Marc Bissonnet pense se souvenir qu'il s'agit d'une conversation avec son père. Elle s'est tenue avant que ce dernier parte au Rotary.
M. Mocaer : "Est-ce une conversation avec votre père ou avec votre mère ?"
Marc Bissonnet : "Je ne sais plus, peut-être que ma mère a dit à mon père : "Embrasse Marc !"
M. Mocaer : "Vous êtes entendu le lundi après-midi" (deux jours après les obsèques de Bernadette Bissonnet). Le président relit les déclarations que le jeune homme a tenu à ce moment-là. A cette époque, il a dit aux gendarmes qu'il avait eu une communication téléphonique avec sa mère.
Marc Bissonnet ne se souvient plus.


10 h - M. Mocaer : "Est-ce que votre mère utilisait l'ordinateur de la maison ?"
Le fils de la victime : "Oui, comme nous tous."
M. Mocaer : "Vous avez évoqué deux éléments au cours de l'enquête."
Marc Bissonnet : "Mon raisonnement est simple. Pour ouvrir le portail, on dit que Belkacem avait la télécommande. Or, il connaissait le code qui permet de l'ouvrir. Par la suite, on a découvert que Belkacem ne connaissait pas la couleur de la télécommande. (...) Il y a quatre boitiers. Aucun d'entre eux ne correspond à la description donnée par Belkacem."
M. Mocaer : "Est-ce qu'il n'y a pas une télécommande qui a disparu ?"
Marc Bissonnet : "Beaucoup d'éléments ont disparu."


10 h 15 - Marc Bissonnet explique que le portail produit un "clic" lors de son ouverture. Ce déclic se produit dans le local technique.
M. Mocaer : "Quelle est l'attitude du chien quand il entend ce "clic" ?"
Marc Bissonnet : "S'il l'entend, il va aboyer. Mais en raison de la chasse, il n'entend plus trop."
Le président M. Mocaer relit les déclarations du jeune homme quelques jours après les faits. A propos de ce déclic, il tient un discours quelque peu différents.


Après les faits, Marc Bissonnet est revenu dans la région de Montpellier et a habité quelque temps dans la maison de Castelnau. "Depuis que j'y suis retourné, j'ai pu voir" dans quelles circonstances le chien aboie.


Il trouve le scénario de Belkacem incohérent.
M. Mocaer : "Selon le scénario de M. Belkacem, la présence du chien aurait gêné son entrée dans la maison ?"
Marc Bissonnet : "Non, pas forcément."


10 h 30 - Marc Bissonnet pointe à nouveau la presse, et estime qu'il faudrait mener une réforme de la justice.
"S'il y avait des preuves formelles accusant mon père, on aurait pas autant de débats", déclare-t-il au président de la cour. D'après lui, le scandale d'Outreau n'a servi à rien. "Il faudrait peut-être mener une réforme de la justice. (...) La vie privée devrait prendre le pas sur la liberté de la presse. Le secret de l'instruction devrait prendre le pas sur la liberté de la presse. On interdit aux témoins de suivre l'ensemble des débats. Et après, on permet à la presse de retranscrire les débats. En plus, cette retranscription est biaisée."


Il attaque l'attitude de la justice. "Mais, je ne vous remets pas en cause M. le président."


10 h 35 - Des fuites dans la presse
M. Mocaer : "Nous déplorons qu'il y ait des fuites des éléments du dossier dans la presse. On voit régulièrement des fuites s'organiser. C'est fort dommageable. (...) Monsieur, les jurés ne prendront pas leur décision à la lecture de la presse. C'est ici, et au regard de ce qui se sera dit ici, que la décision sera prise."


10 h 40 - Suspension d'audience.


10 h 57 - Reprise de l'audience. "Excusez-moi, mais j'ai l'impression que, quand on n'a pas d'arguments, on essaie de fouiller la merde."
Me Phung, avocat du frère de la victime, interroge Jean-Michel Bissonnet. "Est-ce que vous confirmez la réponse que vous avez faite en garde à vue, aux enquêteurs. Vous avez dit qu'avant de téléphoner à votre épouse, avez-vous appelé une tierce personne avec votre portable." L'avocat relit les déclarations de M. Bissonnet. "J'ai appelé mon fils Marc qui habite à Paris. Il n'y a pas de raison à cet appel. J'étais dans la voiture. J'utilisais mon kit main libre." (M. Bissonnet était à ce moment-là sur la route pour la réunion du Rotary).
Jean-Michel Bissonnet : "C'est la troisième fois que je confirme cette réponse."
Me Phung : "Vous le passez de votre véhicule, alors que vous allez au Rotary ?"
M. Bissonnet : "Oui"


L'accusé se tourne avec M. Mocaer. "M. le président, excusez-moi, mais j'ai l'impression que, quand on n'a pas d'arguments, on essaie de fouiller la merde."


11 h 05 - Me Balling, avocat du vicomte, interroge Marc Bissonnet sur la relation que son père avait avec M. d'Harcourt. "C'était un vieil ami. Une fois par an, mon père allait le voir."
Me Balling : "L'expression de "pique-assiette", c'était une notion pour parler de quelqu'un d'insouciant, ou pour désigner quelqu'un de sans-gêne qui dérangeait votre mère ?"
Marc Bissonnet : "C'était évident pour tout le monde, et M. d'Harcourt s'en vantait."


11 h 15 - Me Balling : "Lors de votre dernière audition, qui a eu lieu à votre demande, le 3 mars 2009, vous dites quelque chose de radicalement nouveau." L'avocat relit les déclarations du jeune homme : "Amaury d'Harcourt est un spécialiste des manipulations."
Marc Bissonnet : "Les chasses présidentielles étaient liées aux opérations sombres de l'Elysée et aux réseaux africains." (Amaury d'Harcourt a participé aux chasses présidentielles sous Valéry Giscard d'Estaing)."Un homme qui se vante de se balader avec une dague dans sa ceinture, et de passer tous les barrages de sécurité, pour moi, c'est un manipulateur."


11 h 30 - Me Vérine, avocat de M. Bissonnet : "Vous êtes inquiété pour votre grand-père ?"
Marc Bissonnet : "C'est quelqu'un de très honorable. Dans sa vie, il n'avait que la famille et le travail. Après le décès de ma grand-mère, ma mère lui donnait une raison de vivre. Aujourd'hui, il a perdu l'envie de vivre. C'est pour cela que je voulais m'occuper de lui."


11 h 35 - Florent Bissonnet, fils du couple, prend à son tour la parole. "Mon frère a déjà dit beaucoup de choses. C'est difficile de passer derrière. On est très cartésien dans la famille." Il revient sur l'histoire de la voyante évoquée hier. "On ne croit pas à l'astrologie."


11 h 40 - "Maman était tellement pleine de vie"
La voix tremblante, l'homme revient sur le déroulement des faits et explique comment il a appris le décès de Bernadette Bissonnet. "La seule question que je me suis posé : comment on fait pour vivre sans sa mère ? C'est impensable. Maman était tellement pleine de vie. Elle était le socle de la famille. Pour nous, c'était quelque chose d'inimaginable."
(...)
"A chaque fois que je pense à cette affaire, je me demande sans cesse si papa est coupable ou innocent. Maman était dévouée à sa famille. Elle a sacrifié sa vie. Beaucoup de personnes lui reconnaissaient ce dévouement."
(...)
"Les jours qui ont suivi ont été très particuliers. C'est moi qui me suis occupé de l'enterrement. On n'a pas pu voir le corps (NDLR : de Bernadette Bissonnet)."
(...)
Le lendemain des obsèques, Florent est allé avec son père et son amie voir "Bienvenue chez les Chti's" au cinéma. "Pendant tout le film, papa était en pleurs."
(...)
Le jeune homme revient sur la mise en garde à vue de son père et remet en cause le travail des enquêteurs. "Ils font très professionnels quand ils arrivent avec leur képi. Mais, ils ne sont pas aussi humains qu'ils veulent le dire. Le pire paradoxe est de ne pas reconnaître une erreur." Il revient sur le débat qui s'est tenu entre les experts de la balistique : à savoir, Bernadette a-t-elle été tuée de deux ou trois coups de fusil ?
(...)
"S'il faut le condamner, condamnez-le sur des éléments qui nous aideraient" à comprendre. "Maman était tout pour lui, il s'est construit avec maman. Chacun faisait avancer l'autre, et rendait l'autre meilleur. Ils avaient les mêmes idées, les mêmes valeurs."
(...)
"C'est très dur car je suis passé du statut d'enfant, à celui d'orphelin puis de papa en quelques mois."


12 h 05 - Le président M. Mocaer : "Vous avez entendu l'écoute téléphonique au cours de laquelle vous parlez avec votre père. Qui est Jean-Pierre ?"
Florent Bissonnet : "Je ne sais pas. Aucun souvenir."
M. Mocaer : "Vous comprenez que si votre père et Amaury d'Harcourt était avec une 3e personne le 19 mars 2008 (NDLR :deux jours après le drame), c'est très intéressant pour la cour de savoir qui elle est."
Florent Bissonnet : "Je sais bien, mais je ne vois pas qui c'est."


12 h 10 - Me Abratkiewicz, avocat du frère de la victime : "La seule preuve que vous pouvez entendre serait les aveux de votre père ?"
Florent Bissonnet : "C'en est une. Mais, je sais que tout ce que je vais dire, ça va se retourner contre moi. Ca fait trois ans que je fais les allers-retours avec Paris. Je me forge une conviction. Mon père n'a pas le regard fuyant. Quand il me dit : "Je n'aurais jamais touché un cheveux de ta mère", je le crois. La vie serait plus simple si mon père était coupable. Vous comprenez. Si le procès dure cinq semaines, c'est qu'il y a des éléments troubles dans cette affaire."
(...)
"On m'a reproché de trop parler à la presse. Mais, c'était pour contredire ce qui était dit. Et puis, j'y ai trouvé une oreille attentive. Ca faisait bien d'en parler. Beaucoup de journalistes pensent que mon père est coupable. Ca faisait du bien de se confronter à ça.


12 h 20 - Me Chalié, avocat des enfants de Bernadette Bissonnet : "Est-ce que vous avez eu l'impression que votre père a eu des réactions que vous ne lui connaissiez pas après la mort de votre mère ?"
Florent Bissonnet : "Non"


Suivez la suite du procès en direct en cliquant sur ce lien...
http://www.midilibre.com/articles/2011/01/21/ML-Suivez-en-direct-le-proces-Bissonnet-1513738.php5

Aucun commentaire: