Ce jeudi, au procès Bissonnet, la cour poursuit l'audition des témoins cités par la défense. L'audience commence avec quelques minutes de retard en raison des problèmes médicaux du présumé commanditaire de l'assassinat de Bernadette Bissonnet.
A son arrivée dans le box, Jean-Michel Bissonnet explique que le médecin de la prison refuse de lui donner les médicaments comme il le souhaite. "J'ai dormi deux heures cette nuit. J'ai eu une dose (d'anti-dépresseur, NDLR) ce matin, mais je n'ai pas de dose pour cet après-midi. Je fous en l'air mon procès par mes excès de colère. Je vous prie de m'excuser M. le président. "
9 h 30 - Reprise des débats. Paul
Rico, entrepreneur, est appelé à la barre. "J'ai connu M. Bissonnet en 1986. Au Millénaire, on a travaillé pour lui sur un gros chantier. (...) Jean-Michel et Bernadette formait un couple parfait. Je ne comprends pas. Il était un peu ronchon. Madame était vraiment adorable. Elle s'entendait très bien avec ma femme."
(...)
"A mon avis, vous perdez votre temps si vous cherchez des défauts dans le couple ou auprès des enfants."
9 h 40 - Le président de la cour, M. Mocaer : "Il parle de vous comme son meilleur ami ?"
M. Rico : "Oui, je serai toujours son meilleur ami, et celui de ses enfants."
M. Mocaer : "La réunion du Rotary (qui s'est tenue le soir du drame, NDLR), vous y participiez ?"
M. Rico : "Oui."
M. Mocaer : "Vous savez pourquoi il ne vous a pas appelé le soir du 11 mars 2008 ?"
M. Rico : "Je ne sais pas, il devait être dans un tel état."
(...)
M. Rico : "Je n'en crois pas un mot à cette histoire. Ca fait trois ans que je réfléchis, je ne donne pas d'explications à ce qui s'est passé. Je pense qu'il (M. Bissonnet, NDLR) n'a rien avoir avec le meurtre."
9 h 45 - Me Chalié : "Combien de fois voyez-vous M. Bissonnet par semaine ?"
M. Rico : "Deux à trois fois. Parfois, je passais prendre le café."
Me Chalié : "Vous parlez de Pierre Juan, le père de Bernadette. Etait-il proche du couple ?"
M. Rico : "Oui, il a une forte proximité entre le père, la fille et Jean-Michel. Ils voyageaient ensemble."
Me Chalié : "Vous allez le voir régulièrement en prison. Comment pensez-vous qu'il vive sa détention ?
M. Rico : "Très difficile. "
M. Mocaer l'interroge sur M. d'Harcourt. M. Rico explique qu'il l'a effectivement déjà rencontré. "Madame Bissonnet ne l'aimait pas beaucoup, elle avait peut être raison."
9 h 55 - Cédric Larid est appelé à la barre. Il était l'employé de M. Bissonnet.
M. Mocaer : "Que souhaitez-vous dire à la cour ?"
M. Larid : "Je ne crois pas du tout à la culpabilité de M. Bissonnet. Avec Bernadette, ils formaient un couple tout à fait normal. Je ne comprends pas comment M. Bissonnet aurait pu faire une chose pareille. C'était un homme exemplaire."
M. Mocaer : "Parlez-nous un peu plus de ce couple."
Le témoin : "C'était un couple tout à fait normal."
M. Mocaer : "Quand avez-vous été employé par M. Bissonnet ?"
M. Larid : "En 2006. M. Bissonnet est le meilleur employeur que j'ai eu. Bernadette était une femme exemplaire. Elle aimait beaucoup ses enfants. Il n'y a rien d'autre à dire."
M. Larid travaillait dans l'entreprise d'archivage de M. Bissonnet. Il explique que Mme Bissonnet apportait son soutien dans cette société. "Je la rencontrais souvent. Elle me parlait souvent de ses enfants, de ses projets qu'ils avaient en commun."
10 h - M. Mocaer : "Vous l'avez vu avant son décès ?"
M. Larid : "Oui, la veille ou le jour même."
M. Mocaer : "Vous avez décelé quelque chose d'anormal ?"
M. Larid : "Non, rien de particulier. Elle était en superbe forme. Elle revenait du sport."
M. Mocaer : "Suite à un accrochage avec M. Bissonnet, vous n'avez pas mis votre démission dans la balance ?"
M. Larid : "Oui, y a eu un accrochage. M. Bissonnet et moi, on a deux très forts caractères. Je n'ai pas vu cela comme un problème. Ca a fait avancer les choses."
M. Mocaer : "Quel problème y avait-il ?"
M. Larid : "Je ne m'en souviens plus vraiment."
10 h 15 - "M. Bissonnet m'a raconté que le jardinier lui avait demandé 5 000 euros pour acheter une voiture"
Me Chalié, avocate des enfants et du père de Bernadette Bissonnet: "Pour M. Bissonnet, vous travailliez dans l'entreprise Memoris, une entreprise d'archivage. Pourriez-vous nous parler de vos modalités de salaire ?"
M. Larid : "1 300 euros au départ. Et très vite, les chiffres ont parlé en ma faveur, et on a parlé d'augmentation de salaire. Plus tard, il a inclus les bénéfices de l'entreprise dans mon salaire."
Me Chalié : "On dit que vous aviez une relation mère-fils avec Mme Bissonnet ?"
M. Larid : "Oui, on avait une relation mère-fils, comme j'avais avec M. Bissonnet une relation père-fils. Ils m'ont aidé dans une période difficile de la vie."
Me Chalié : "Comment était M. Bissonnet après le drame ?"
M. Larid : "J'ai constaté quelqu'un qui naviguait. Des incohérences dans ses propos. Perdre un être cher expliquait ses propos incohérents. Quelqu'un de groggy."
Me Chalié : "Auprès des gendarmes, vous avez expliqué que M. Belkacem avait demandé de l'argent à M. Bissonnet ?"
M. Larib : "Effectivement, M. Bissonnet m'a raconté que le jardinier lui avait demandé 5 000 euros pour acheter une voiture."
10 h 35 - M. Mocaer : "M. Bissonnet, quelle était la structure de Memoris ?"
M. Bissonnet : "C'était une URL."
M. Mocaer : "Si Mme Bissonnet venait à votre entreprise, c'était de façon bénévole ?"
M. Bissonnet : "Oui, Bernadette aimait s'occuper."
10 h 40 - Une jeune femme, qui a travaillé avec M. Bissonnet, s'avance à la barre.
"M. Bissonnet était un homme très précis, très doué. Quand il avait un problème avec un fournisseur, il n'hésitait pas à avoir un recours juridique. Il cherchait toujours à avoir un consensus avec ses fournisseurs. Vis-à-vis de ses employés, c'était quelqu'un d'exigeant, de maniaque. (...) Dans ses relations avec moi, il y avait une grande loyauté entre nous. (...) Je ne faisais pas partie de ses amis ou de son entourage proche. (...) Avec ses employés, il pouvait facilement s'emporter, de quoi humilier son interlocuteur."
(...)
"Avec Bernadette, j'ai eu l'impression d'un couple très uni. Je les ai croisés six mois avant les faits, ils étaient main dans la main. Ils ne m'ont pas donné l'impression d'un couple sur le déclin."
10 h 50 - "Il peut être rapidement détestable"
M. Mocaer : "Pour M. Bissonnet, vous avez travaillé dans l'entreprise Buro Club pendant trois ans. Comment interprétez-vous le fait que Mme Bissonnet s'y occupait de faire les chèques ?"
Le témoin : "C'était une femme qui aimait s'occuper."
M. Mocaer : "De M. Bissonnet, vous avez dit qu'on l'aime ou le déteste."
Le témoin : "Dès qu'il sent qu'il est dans un rapport de force avec son interlocuteur, il peut être rapidement détestable."
(...)
"M. Bissonnet était quelqu'un de très organisé. Je trouve inimaginable qu'il ait pensé, sur un coin de table, cet assassinat. Ca ne lui ressemble pas."
11 h - Martine Hautot-Faugeras est invitée à s'exprimer devant la cour. Elle connaissait Jean-Michel Bissonnet avant la barre. "J'ai rencontré M. et Mme Bissonnet il y a un peu plus de 22 ans. Mon mari a réalisé l'extension de Buro Club. (...) J.-M. Bissonnet est un homme qui a en lui un réel désir d'investir. Dans son travail, c'était quelqu'un de courageux, d'entreprenant. (...) Avec mon époux, on rencontrait les Bissonnet en petit comité. (...) Concernant l'entente dans ce couple : un jour au Buro Club, j'ai surpris Jean-Michel soufflait légèrement dans le cou de Bernadette. J'ai trouvé ce geste délicat, ça m'a même un peu gêné d'avoir assisté à cet instant."
11 h 15 - Le président l'interroge sur la répartition des actions au sein de son entreprise Cedra SA. M. Bissonnet en détenait une partie.
11 h 20 - M. Mocaer : "Vous avez rencontré des problèmes lors de la relecture de votre déposition auprès des gendarmes."
Martine Hautot-Faugeras : "Tout ce que j'ai dit n'a pas forcément été repris. Il y a des choses que j'avais entendu ou vu qui n'ont pas été retranscrites."
11 h 25 - Le témoin : "J'ai appris la mort de Bernadette la veille de ses obsèques. C'est Jean-Michel qui m'a prévenue par téléphone. Il s'est aussitôt mis à pleurer. Il disait : "On ne l'a prise, on me l'a prise". Pour lui, Bernadette était LA femme."
11 h 27 - 11 h 33 - Le président relit à haute voix la déposition de Martine Hautot-Faugeras.
11 h 35 - Me Leclerc, avocat de M. Bissonnet : "Vous avez été entendue pendant trois heures par les gendarmes. Ils ne vous ont pas posé de question ?"
Martine Hautot-Faugeras : "Non. Sur les trois heures passées à la brigade, je me suis exprimée pendant 1 h 15. On a passé le reste du temps à relire et modifier la rédaction du procès-verbal. Je ne voulais pas que mes propos soient écrits de façon maladroite. Certains de mes propos étaient retranscrits de telle façon qu'ils voulaient dire l'inverse de ce que je souhaitais dire. J'ai été choquée, j'ai eu l'impression que c'était délibéré."
11 h 45 - Richard Bernard, avocat, est appelé à la barre. "Jean-Michel Bissonnet est un de mes amis, on se rencontrait au Rotary. C'était aussi un de mes clients. Le soir du crime, il ne se comportait pas comme quelqu'un qui savait qu'on était en train de tuer sa femme." L'homme explique qu'il a effectué, à plusieurs reprises, des voyages avec le couple Bissonnet.
M. Mocaer : "Dans votre déposition, vous avez dit que Mme Bissonnet était quelqu'un d'exubérante."
M. Bernard : "Oui, elle était exubérante, ce qui en faisait une convive agréable."
M. Mocaer : "C'est bizarre, car ce n'est pas ce qui ressort des autres déclarations. Vous vouliez dire qu'elle était une personne gaie ?"
M. Bernard : "Oui."
M. Mocaer : "De M. Bissonnet, vous dites qu'il est spontané, qu'il a un tempérament méditerranéen."
M. Bernard : "Oui, il était spontané, il réagissait rapidement."
M. Mocaer : "Et le couple ?"
M. Bernard : "Durant tous les voyages que nous avons fait ensemble, ils m'ont donné l'impression d'une entente parfaite."
11 h 55 - M. Mocaer : "Vous avez appris la mort de Mme Bissonnet dans quelles circonstances ?"
M. Bernard : "J'étais parti à l'enterrement d'un ami à Cholet quand j'ai appris le décès de Mme Bissonnet. Nous sommes descendus à tout allure à Lattes pour assister à ses obsèques. Ca a été un moment d'émotion très important pour moi."
12 h - Suspension d'audience. Reprise à 14 h.
14 h 23 - L'audience reprend.
14 h 24 - Jean-Michel Bissonnet réclame de l'Atarax
"Depuis un mois, on me dit qu'il faut que je dois voir un psychiatre. Or, je ne peux pas car je suis à la cour d'assises. Hier, je n'ai pas eu mes médicaments. Ce matin, on n'a donné la moitié de l'ordonnance. Ce médecin chef (de la prison de Villeneuve-lès-Maguelone, NDLR), qui me refuse des vitamines depuis 7 mois, me dit que c'est comme ça et pas autrement. Je ne veux pas recommencer à m'ébranler ! Je demande seulement trois comprimés d'Atarax (prescrit en cas d'anxiété, NDLR). Si y a un médecin dans la salle qui peut m'en donner. (...) Le médecin, que j'ai vu ce matin, est nul. Ca fait des jours que je demande de voir mon psychiatre."
M. Mocaer : "Quelle est votre demande M. Bissonnet ?"
M. Bissonnet : "Je voudrais trois petits comprimés d'Atarax."
M. Mocaer : "Il est hors de question que l'on vous en donne comme cela. Ce n'est pas une solution de multiplier les intervenants médicaux."
M. Bissonnet se met à pleurer. "Avec les articles dans la presse qui sont stupides, je n'en peux plus. Moi, ca fait trois mois que je suis en prison, pendant que d'autre sont libres, vont à la pêche, à la chasse."
M. Mocaer demande à l'huissier de joindre le psychiatre de M. Bissonnet.
14 h 30 - Claude Jacquemin est invité à s'exprimer devant la cour. Il connait Jean-Michel Bissonnet depuis les années 80. "Jean-Michel et Bernadette formaient un couple très uni. Bernadette était très tournée vers sa famille." (...) "Je suis absolument convaincu qu'il ne peut pas avoir pu élaborer" cet assassinat.
Claude Jacquemin est à la tête du comité de soutien de M. Bissonnet. "Jean-Michel était totalement dépressif au fond de la prison de Béziers. Il avait du mal à faire son deuil. Quand je le voyais à Béziers, il ne pleurait pas. J'ai vite compris que pleurer, c'était montrer sa faiblesse face aux autres détenus."
(...)
"Il y a eu des rumeurs comme quoi Bernadette recevait des hommes chez elle, que Jean-Michel avait des relations homosexuelles. Pour moi, ces rumeurs étaient inacceptables."
14 h 45 - M. Mocaer : "Parlez-nous du comité de soutien. On dit qu'il compte 500 personnes."
M. Jacquemin : "Je n'ai pas en tête le nombre. Dans un article de la Gazette, on note 507 membres. Ce n'est pas que des gens du Rotary."
M. Mocaer : "Qu'a-t-il fait concrêtement ce comité de soutien ?"
M. Jacquemin : "Rien, rien. Lui apporter du soutien."
Le président de la cour l'interroge sur la réalisation du sondage publié en 2009. Dans ce sondage, on demandait notamment aux interviewés s'il fallait remettre en liberté Jean-Michel Bissonnet.
14 h 50 - M. Mocaer : "D'après vous, Jean-Michel Bissonnet ne peut pas être à l'origine de cet assassinat car il s'agirait d'un "travail d'amateur". Pouvez-vous nous expliquer ?"
M.Jacquemin : "Y a des tas de choses qui ne collent pas. Comme l'histoire du chien. Jean-Michel, c'était quelqu'un de carré."
M. Mocaer : "C'est la personnalité des co-accusés qui vous pousse à dire cela ?"
M. Jacquemin : "Quand Jean-Michel avait besoin de faire le carrelage, il allait pas chercher un électricien."
15 h - Me Abratkiewicz, avocat du frère de Bernadette, rappelle au témoin la thèse officielle, celle disant que Jean-Michel Bissonnet aurait commandité l'assassinat de son épouse.
M. Jacquemin : "J'ai une certitude. Je connaissais ce couple. Pour moi, c'est impensable que Jean-Michel ait fait tuer sa femme."
Jean-Michel Bissonnet s'agite dans le box. Ses avocats tentent de le calmer.
15 h 10 - "Vous êtes un menteur"
Me Abratkiewicz note que M. Jacquemin a eu connaissance de plusieurs éléments du dossier lors d'audiences publiques, audiences au cours desquelles les magistrats ont statué sur la remise en liberté ou non de Jean-Michel Bissonnet. "Ecoutez Monsieur, ce n'est pas possible, ces audiences duraient à peine dix minutes", déclare M. Jacquemin.
"Vous êtes un menteur, une fois de plus", lance M. Bissonnet à l'encontre de Me Abratkiewicz.
Me Leclerc : "Il y a eu beaucoup, beaucoup d'éléments dans la presse. Il est normal que Monsieur ait eu connaissance d'éléments notamment en lisant Midi Libre."
Brouhaha dans la salle. Marc Bissonnet s'énerve, tout comme son père.
15 h 25 - "L'affaire Bissonnet, c'est l'affaire Baudis en pire"
L'avocat général Georges Guttierez prend la parole : "Vous présidez un comité de soutien. N'avez-vous pas l'impression de présider un groupe de pression ?"
M. Jacquemin : "C'est votre interprétation. Jean-Michel ne parlait tout le temps de suicide quand il était la prison de Béziers. Ce comité a eu pour mission de lui apporter du soutien. Et tout ce qu'on a pu dire et lire dans la presse. Toutes ces rumeurs sur Bernadette qui recevait des hommes chez elle, sur Jean-Michel qui aurait eu des relations sexuelles avec le vicomte." M. Jacquemin lève la voix. "L'affaire Bissonnet, c'est l'affaire Baudis en pire. Non ! Ce n'est pas un groupe de pression."
M. Guttierez : "N'avez-vous pas l'impression de faire pression sur les juges quand vous publiez un sondage demandant s'il faut remettre en liberté Jean-Michel Bissonnet ?"
M. Jacquemin tente d'expliquer sa démarche avec ce sondage. "On a pensé que ça pouvait être utile."
15 h 30 - L'avocat Pierre Denier : "Vous avez évoqué les débordements qu'il y a eu dans la presse. Vous savez Monsieur qu'il existe un droit de réponse ou des mesures juridiques en cas de diffamation."
M. Bissonnet s'agite dans la salle : "C'est faux !", lance l'accusé. Il se lève et quitte le box.
15 h 37 - Suspension d'audience.
Le direct ici.... http://www.midilibre.com/articles/2011/02/03/A-LA-UNE-Je-fous-en-l-air-mon-proces-par-mes-exces-de-colere-1526884.php5
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire