lundi 2 mai 2011

Clearstream : second round

Clearstream, acte II. Ce lundi débute le procès en appel des fichiers falsifiés de la société de compensation luxembourgeoise. Sur le banc des accusés ne figurent plus que trois des cinq prévenus de départ, mais ce sont les principaux : Dominique de Villepin, Jean-Louis Gergorin et Imad Lahoud. Il leur est reproché d'avoir falsifié des listings bancaires afin de faire croire que plusieurs personnalités, dont Nicolas Sarkozy, détenaient des comptes occultes à l'étranger. L'affaire avait éclaté au grand jour à l'été 2004, avant de prendre un tour plus politique en 2006 lorsque Nicolas Sarkozy s'était constitué partie civile.
Qui sont les prévenus ?
Dominique de Villepin : En 2009, en première instance, la défense du chef de l'Etat l'avait désigné comme l'instigateur de la machination. Une machination qui aurait été spécifiquement dirigée contre Nicolas Sarkozy, afin de l'empêcher de prendre le contrôle de l'UMP et de se présenter à la présidentielle de 2007. Le procureur de Paris, Jean-Claude Marin, avait quant à lui soutenu la thèse de la "complicité par abstention", parce qu'il savait que les listings étaient faux. Au final, le tribunal correctionnel avait écarté ces deux thèses en concluant que Dominique de Villepin était de bonne foi et avait prononcé la relaxe. Le parquet a fait appel.



Jean-Louis Gergorin. Considéré comme le cerveau de l'affaire, il avait été condamné à 15 mois de prison ferme et 40.000 euros d'amende en première instance. Il a fait appel. Entre temps, l'ancien n° 3 d'EADS a été licencié par le géant de l'aéronautique. Il s'est installé à son compte comme consultant en stratégie industrielle et continue à donner des conférences à Sciences Po.

Imad Lahoud : Désigné comme le faussaire, l'informaticien avait été condamné à 18 mois ferme et 40.000 euros d'amende. L'ancien salarié d'EADS a lui aussi fait appel. Depuis, il a passé son agrégation de mathématiques. Il enseigne cette discipline au Lycée Condorcet à Paris. Pour s'en sortir, Imad Lahoud risque fort de charger ses co-prévenus. Celui que le tribunal dépeint comme "un menteur invétéré" a d'ailleurs commencé. Dans un documentaire diffusé sur Canal+, "Le Grand bal des menteurs", il affirme que Dominique de Villepin lui aurait avoué être "derrière" toute la machination.

Denis Robert et Florian Bourges : le premier a été relaxé, en vertu de la protection dont doivent bénéficier les journalistes. Poursuivi en diffamation par Clearstream, il a été blanchi récemment par la Cour de cassation. Il sort un ouvrage le 6 mai reprenant ses trois enquêtes sur Clearstream. Florian Bourges, auditeur chez Arthur Andersen qui aurait transmis les documents à Denis Robert, a été condamné à quatre mois avec sursis pour abus de confiance. Il n'a pas fait appel.
Sarkozy absent du banc des parties civiles
Sur les 45 parties civiles en première instance, une petite vingtaine ont fait appel. Certaines pourraient se désister dès le premier jour. La plus connue des parties civiles, Nicolas Sarkozy, avait annoncé le jour du délibéré qu'il ne ferait pas appel. Le procès d'appel devrait de ce fait être "plus serein, moins passionnel", note Me Hervé Temime qui, après avoir défendu le journaliste Denis Robert, rejoindra la défense de Jean-Louis Gergorin, aux côtés de Mes Paul-Albert Iweins et Thierry Dalmasso. «On va passer d'un procès politique quasi-dramaturgique à un procès plus technique», estime également Me Olivier Metzner, qui défendra l'ancien Premier ministre Autre signe allant en ce sens : en 2009, les principaux protagonistes avaient multiplié les déclarations incendiaires publiques avant le procès. En 2011, ils s'en sont abstenus. Nicolas Sarkozy et Dominique de Villepin se sont mêmes rencontrés deux fois, le 24 février et le 7 mars, à l'initiative du chef de l'Etat, à l'Elysée, officiellement pour débattre de sujets internationaux.
Les questions que la cour d'appel devra tenter d'éclaircir
Malgré un premier procès en correctionnel, plusieurs zones d'ombres subsistent dans ce dossier hautement complexe. D'abord, le nom de Nicolas Sarkozy, retrouvé sur les listings falsifiés, a-t-il bien été évoqué lors d'une réunion le 9 janvier entre Villepin, Gergorin et un témoin, le général Rondot ? Selon le militaire qui a enquêté sur les listings, cela ne fait pas un pli. En première instance, le tribunal a estimé que de nombreux éléments "accréditent le fait que le nom de Nicolas Sarkozy" ait été cité.
Ensuite, Villepin a-t-il demandé à Gergorin de dénoncer les faux listings au juge d'instruction Renaud van Ruymbeke ? Par ailleurs, Imad Lahoud, soupçonné d'avoir falsifié les listings, a-t-il agi seul ? Autre énigme : Jean-Louis Gergorin, décrit comme un obsédé du complot, s'est-il laissé embarquer dans cette affaire de bonne foi ou en est-il l'instigateur ? Enfin, et surtout, Villepin était-il au courant de la falsification des listings ? Pour prononcer une quelconque condamnation pour complicité de dénonciation calomnieuse à son encontre, la cour d'appel devra obtenir la certitude qu'il savait.

Le procès doit durer jusqu'au 26 mai. Mais la décision ne sera pas rendue avant l'automne, à quelques mois seulement de l'élection présidentielle de 2012...
http://lci.tf1.fr/france/2011-04/clearstream-second-round-6429687.html

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