On pourrait en sourire, si l'affaire n'était pas aussi grave ; si une famille n'attendait pas, grave et digne, impeccable, d'avoir enfin une explication, voire des regrets ou des remords, après avoir perdu un être cher, un fils, un ami… On aurait pu en sourire, mais personne n'a souri, hier soir, dans la salle d'audience des assises de l'Ariège, quand Mekki Boughouas, accusé d'avoir volé la recette de la « Roue », en décembre 2008, et d'avoir tué son jeune directeur artistique d'une quarantaine de coups de couteau, a livré une énième version de cette soirée. Le silence était glacial, dans la salle d'audience. Pas un mot, pas un sourire. Une forme de consternation, en somme.
Dans le piège du dossier d'instruction
Jacques Richiardi, président de la cour d'assises, a commencé par lui laisser la bride sur le cou. Mekki Boughouas s'est engouffré dans la brèche à toutes jambes, revenant avec force détails sur les heures qui ont précédé le meurtre, puis sur la terrible scène qui s'est jouée à la « Roue ». Il y avait une constante à ce récit : tout était de la faute de Othman El Houari. C'est lui qui l'aurait convaincu de faire le coup, qui aurait demandé un fusil chargé, qui était pressé de passer à l'action, qui aurait pris le commandement des opérations. Qui avait un couteau. Et qui aurait asséné les coups de couteau mortels. Alors, Mekki Boughouas s'est enferré dans une description de la scène qui a semblé abracadabrante, où Julien Fernandez se serait effondré en arrière, sans un cri, parvenant quand même à lui arracher sa cagoule. Et à lâcher sa sacoche devant lui. « Un défi pour la physique », dira l'avocat de la partie civile, M° Emmanuel Tricoire. À chaque nouveau détail, Mekki Boughouas avait donné l'impression de marcher sur un champ de mines. Elles n'ont pas tardé à exploser. Dans un silence de cathédrale, quand il a eu terminé, Jacques Richiardi, pas à pas, a décortiqué ses déclarations, se reportant à chaque fois aux pièces du dossier. On s'est rendu compte alors que Mekki Boughouas, par exemple, n'avait donné pas moins de six versions différentes de la scène où il dit avoir frappé Julien Fernandez pour lui voler sa sacoche : « un coup-de-poing à la mâchoire » d'abord, puis « un coup-de-poing en plein visage », puis il ne savait plus, puis un « coup porté de la paume de la main au visage », puis « à la tempe », puis « sur la tête »…Les clefs de la Mégane
Pareil pour les repérages, le fusil, la couleur du manche du couteau qu'aurait porté Othman El Haouri, les achats faits à Perpignan, le lendemain du meurtre… Une très longue liste de contradictions. Et quand un juré le questionne pour savoir qui avait les clefs de la Mégane, garée de l'autre côté d'un champ, à l'arrière de la discothèque, Mekki Boughouas répond, avec un peu moins d'assurance et de superbe : « On les avait laissées dessus ». Le président corrige, calmement : « Vous avez toujours expliqué que c'est vous qui les aviez ». Tard dans la soirée, les questions ont continué à pleuvoir sur Mekki Boughouas, épilogue d'une journée d'audience qui s'est terminée très tard dans la soirée.http://www.ladepeche.fr/article/2011/06/02/1096982-mekki-boughouas-accule-dans-ses-contradictions.html
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