jeudi 4 août 2011

Rémy a été tiré au sort et sélectionné quatre fois de suite pour siéger comme juré à la cour d'assises d'Aix-en-Provence

L'une des affaires pour lesquelles a siégé ce juré, "d'une atrocité immonde", illustrait les sévices sexuels que des grands-parents faisaient subir à leurs petits-enfants âgés de 10 à 12 ans. Une autre concernait une femme poignardée de plusieurs dizaines de coups de couteau. Mais c'est sans doute l'affaire de cet homme qui a massacré une femme très âgée à coups de micro-ondes qui a le plus marqué Rémy*.
Qu'est-ce qui vous a le plus impressionné dans ces drames de vie ?
Les scènes de barbarie décrites dans leurs détails les plus sordides, le défilé de toutes ces victimes, les enfants, la mère de la victime, les amis, mais aussi l'accusé avec sa chemise ouverte et sa chaîne en or, l'air si méprisant...
Vous est-il néanmoins arrivé de vous identifier à l'accusé en tant qu'homme ?
Non. L'une des affaires portait sur un crime passionnel, un homme avait tué sa maîtresse. Plusieurs jurés ont estimé qu'il ne méritait pas perpétuité... Mais pour le reste, il est difficile de s'identifier à des personnes lorsqu'on imagine les scènes où elles ressemblent plus à des bêtes qu'à des hommes.
Sauf que ce sont des hommes...
Oui, mais, moi, je préfère les savoir derrière les barreaux ! Pour l'un d'entre eux, j'étais le seul à vouloir mettre perpétuité, je ne pouvais pas concevoir qu'il sorte au bout de dix ans ! Ça m'a fait peur que la justice puisse être conciliante en fonction du cas et que certains jurés trouvent des circonstances atténuantes insignifiantes pour prétexter une moindre peine.
Quel enseignement retirez-vous de cette expérience ?
Je garde cette expérience en moi, elle me permet d'être plus vigilant et plus méfiant, cela m'a davantage ouvert les yeux et affûté les sens sur certains dangers. Il y a vraiment des barjos !
Cette expérience a-t-elle nourri votre réflexion sur la société dans laquelle vous vivez ?
Nous sommes censés représenter la société, mais celle-ci est-elle un modèle d'intelligence et de raisonnement ? Je doute...
Une frustration ?
Oui, le fait que l'on arrive en bout de course d'une procédure qui a duré trois ou quatre ans. Si on avait vu le juge d'instruction faire son enquête, on aurait pu voir le crime différemment, peut-être.
Il y a deux poids deux mesures dans la justice ?
Oui, le père qui se fait justice lui-même parce qu'on a fait du mal à son enfant, ce n'est pas la même chose que le crime commis de sang-froid par des hommes qui continuent à rester froids devant vous...
Avez-vous eu le sentiment d'avoir fait oeuvre utile ?
On a l'impression d'avoir fait son boulot en écartant un danger de la société ou bien lorsqu'on acquitte une personne détenue depuis plusieurs années. J'ai en quelque sorte fait le ménage devant la porte de la société.
http://www.lepoint.fr/chroniqueurs-du-point/laurence-neuer/j-ai-fait-le-menage-devant-la-porte-de-la-societe-01-08-2011-1358388_56.php

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