mardi 11 décembre 2012

Crime d’un homme ordinaire

Curieux procès que celui de Michel Lommere. Cet habitant de Liverdun de 55 ans est jugé depuis hier par la cour d’assises de Nancy pour un crime qui fait froid dans le dos. Il a étranglé sa femme. Et pourtant, ce meurtre passionnel ne donne pas lieu à des débats passionnés. Au point que le procès prévu initialement sur trois jours n’en durera finalement que deux.
Car le profil de l’accusé désamorce tout affrontement explosif. C’est un homme ordinaire. Banal. À tous points de vue. Physiquement tout d’abord. Il n’est ni grand, ni petit. Ni gros, ni mince. Ni beau, ni laid. Juste moyen. Psychologiquement, c’est pareil. Il est sans aspérité. Totalement lisse. « Rien à signaler », répète à une dizaine de reprises l’expert-psychologue, Serge Ebel. Pas d’addiction. Pas de problèmes intellectuels. Pas de tendance violente. Pas de troubles de la personnalité.
Juste quelqu’un de « solitaire », « taciturne » et « un peu anxieux ». Pas de quoi vous transformer en meurtrier. Michel Lommere semble d’ailleurs totalement dépassé par ce qu’il a fait. Ecrasé par la culpabilité. « J’ai supprimé la mère de mes enfants. Je le regretterais toujours… » lâche-t-il. Avant que sa voix soit étouffée par les sanglots. Le quinquagénaire plonge son visage dans un grand mouchoir blanc. Un mouchoir qui ne le quittera pas de l’audience. A espace régulier, il essuie des larmes. « Ses regrets sont sincères », estiment tant le psychologue que le psychiatre qui l’ont examiné. L’habitant de Liverdun n’a rien d’un pervers manipulateur.

Passion et dépression

Du rapport d’un enquêteur de personnalité, il résulte également qu’il était unanimement apprécié par son entourage. C’était un collègue modèle pour les autres ouvriers de l’usine où il était employé depuis des années. C’était un père qui avait l’affection de ses trois enfants, aujourd’hui majeurs. C’était aussi un mari très amoureux. Même ses beaux-parents qui étaient aussi ses voisins, le reconnaissent. « Je n’ai jamais vu ma fille et mon gendre se disputer. Tout a toujours été normal », affirme le beau-père.
Son épouse est un peu plus nuancée. Selon elle, après des années de vie commune sans histoire, le couple a commencé à battre de l’aile en 2009. Pourquoi ? Parce que sa fille a changé. Jusque-là, c’était une femme qui avait « son petit caractère » et qui « portait la culotte » au sein de son foyer. Elle souffrait d’obésité. Et en 2009, elle s’est fait poser un anneau gastrique pour maigrir. Elle a perdu plusieurs dizaines de kilo. Elle a aussi sombré dans la dépression. « Elle n’était plus du tout pareil. Elle était mal dans sa peau », explique sa mère.
L’épouse, âgée d’une quarantaine d’années, va alors s’éloigner de son mari. Chauffeur pour handicapés, elle va nouer une liaison avec un quadragénaire qu’elle transportait de temps en temps. Au fil du temps, Michel Lommere a commencé à avoir des soupçons. « Et il s’est enlisé dans un marasme dépressif », explique l’expert-psychiatre, le docteur Bocquel qui attribue le crime plus à la dépression qu’à la passion.
L’accusé est « tombé dans un abîme » le 10 avril 2011 lorsque son épouse lui a révélé son infidélité. Le lendemain matin, il l’a étranglée. Puis il a emballé son corps dans des sacs plastiques. C’est le père de la victime qui a fait la macabre découverte : « Je remarqué une sorte de ballot dans la remise. Je l’ai ouvert. J’ai vu que c’était ma fille qui était dedans. C’était horrible ! », s’exclame le beau-père, petit moustachu peu loquace. « Traumatisé », il ne s’est pourtant pas constitué partie civile contre son gendre meurtrier : « Je n’ai rien à lui reprocher. Je ne sais pas ce qui s’est passé. C’est à la Justice des hommes de faire son boulot ». Verdict aujourd’hui.

http://www.estrepublicain.fr/actualite/2012/12/11/crime-d-un-homme-ordinaire

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