samedi 5 avril 2014

Affaire Kulik: la défense de Bardon contre-attaque

Le seul suspect vivant après le meurtre et le viol d’Élodie Kulik en 2002, Willy Bardon, a demandé sa remise en liberté vendredi. Ses avocats s’appuient notamment sur la dernière expertise sonore.
Willy Bardon est en prison à Amiens depuis 14 mois. A l’isolement. Il a perdu 30 kg, et fait deux tentatives de suicide. «  Il reste confiant la plupart du temps, mais il a eu deux coups de mou, il en a marre qu’on ne le croit pas», raconte son ami d’enfance. Ils sont moins d’une dizaine à le soutenir, du côté de Saint-Quentin, à venir le voir en prison, et à l’aider. Convaincus de son innocence. Vendredi, ils étaient dans la salle du tribunal pour écouter les débats. Willy Bardon, crâne rasé, vêtu de noir, a été extrait de sa cellule pour cette audience devant la chambre de l’instruction de la cour d’appel d’Amiens. Les avocats de Bardon ont avancé leurs arguments, expliqué pourquoi selon eux, ils n’y a pas d’éléments qui prouvent l’implication de Willy Bardon dans l’horrible crime.
1 L’EXPERTISE DE L’APPEL AUX POMPIERS L’essentiel des charges pesant sur cet habitant de Fieulaine (Aisne) repose sur l’enregistrement de l’appel aux pompiers passé par la jeune banquière au moment des faits. Norbert Pheulpin, un expert judiciaire spécialiste des preuves sonores, avait conclu qu’il ne « peut être exclu » que l’une des voix soit celle de Willy Bardon.
Pour Me Grégoire Lafarge, qui défend Bardon avec Me Stéphane Daquo, la dernière expertise, réalisée par les ingénieurs du laboratoire d’analyse et de traitement de signal du ministère de l’Intérieur, «  réduit à néant » la précédente expertise. Les voix d’hommes entendues, mises bout à bout, ne représentent qu’un son de 2 secondes pour l’une, et de 0,9 s pour l’autre. Dans les conclusions, les experts écrivent que sur une échelle allant de -4 à +4, « la force d’indice (que ces voix soient celle de Bardon) est faible »  : -1 pour la première voix, -2 pour la seconde.
2 LA RECONNAISSANCE DE SA VOIX PAR DES TIERS Quatre personnes sur six, proches ou connaissances de Bardon ont reconnu sa voix lors de leur garde à vue à la gendarmerie, après leurs interpellations en janvier 2013. Le demi-frère de Bardon, qui a d’abord dit que ça ne correspondait pas, a dit le contraire ensuite lors d’une écoute téléphonique. Depuis, toutes ces mêmes personnes ont été entendues plusieurs fois, et elles ont maintenu leurs affirmations. L’expert Pheulpin, qui juge cette méthode de reconnaissances par des tiers crédible, a estimé sur cette base qu’il était possible  à 87  %    qu’il s’agisse bien de la voix de Willy Bardon. Me Lafarge s’étonne de cette conclusion. Car tous les proches de Bardon n’ont pas été sollicités. Il juge cette méthode peu fiable, mettant en avant la seule étude de reconnaissance de voix par des proches menée à ce jour, en 1996 en Allemagne. Elle conclut, en résumé que tout le monde peut se tromper, dans un sens comme dans l’autre. Et l’avocat de Bardon d’enfoncer une nouvelle fois le travail du premier expert  : «  Dans un reportage télévisé, il a expliqué que cet appel aux pompiers était une impasse, un cul de sac».
3 LES ADN SUR LA SCÈNE DE CRIME Pourquoi tous ces témoins continueraient d’affirmer qu’il s’agit bien de la voix de Bardon  ? Me Lafarge a semé le doute devant la chambre de l’instruction. «  Ont-ils intérêt à reconnaître une voix plutôt qu’un ADN  ?» Sur les six personnes concernées, «  quatre ont leur ADN sur la scène de crime  »  : l’ex-femme de Grégory Wiart (mort et identifié comme violeur), C.M., à l’époque apprenti de Wiart, le neveu et une connaissance de Bardon.
Il a été trouvé sur les objets laissés par les agresseurs sur les lieux, près du corps d’Elodie   :un préservatif, son emballage, deux mégots, une chaussette et un sac plastique. Trois ADN d’hommes sont mitochondrial, «  ils ont pu être transportés  » sur les lieux, admet l’avocat. Reste que pour lui, tout cela «  pose problème  ». Car son client est suspect, alors qu’aucun ADN de Willy Bardon n’a été retrouvé sur les lieux du crime.
4 LE COMPORTEMENT DE BARDON En 2002, il passait ses soirées avec Wiart. Quant ce dernier a été identifié en janvier 2012, Bardon a multiplié les coups de fils. Il a continué au fil des auditions pour savoir ce qu’il se disait. Pour sa défense, il s’inquiétait que les gendarmes puisqu’il savait que beaucoup de questions étaient posées à son sujet. «  Il a lui-même, dès 2012, appelé les enquêteurs pour être interrogé, il a même demandé à ce que l’on prenne son ADN  !  » Et le jour des interpellations, le 16 janvier 2013 à 6 heures, il n’était pas chez lui. Son avocat explique  : «  Sa femme lui a téléphoné pour le prévenir que les gendarmes étaient là. Ils auraient pu se sauver à l’étranger. Il a fait quoi  ? Il est venu  ».
Le parquet a demandé le maintien en détention de Willy Bardon, la décision sera rendue mardi prochain.
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