mercredi 1 avril 2015

Procès du tueur de l'Essonne : "Mon fils... je pense qu'il a tué personne"

Une dame âgée pénètre mercredi en salle d'assises. Elle boitille, appuyée sur une canne. L'accusé, Yoni Palmier, jugé à Évry pour quatre assassinats, lui jette un regard furtif, le front plissé, recroquevillé dans son box. Elle s'assoit enfin : "Mon fils... je pense qu'il a tué personne." "Il a toujours été très gentil dans la maison", poursuit d'une voix languissante Eugénia Félicienne Chimbak, 82 ans et neuf enfants - dont l'un s'est suicidé. Yoni, 36 ans, né bien après les autres d'un père différent, est son benjamin : "C'était mon dernier, c'était mon enfant, alors je le chouchoutais, je l'encadrais."

Quatre coups de couteau

Avant les faits dont son fils est accusé, quatre assassinats d'au moins une balle dans la tête entre novembre 2011 et avril 2012 dans l'Essonne, elle faisait tout pour lui : le ménage, la vaisselle, les courses qu'elle lui apportait même à domicile. "J'abandonnerai jamais mon fils !" insiste-t-elle, en jupe longue et souliers épais, engoncée dans un vieil anorak bordeaux.
Elle est venue minimiser tout ce qui pourrait le compromettre, notamment ce jour de 2004, où il l'a poignardée, ce qui lui vaudra six mois de prison. "Il a été violent ? Non... Il s'est énervé une fois", nuance-t-elle. Elle avait refusé, ce jour-là, de l'accompagner chez l'assistante sociale pour un entretien d'embauche, explique-t-elle. "Il était à la cuisine en train d'éplucher des pommes de terre. Il s'est énervé et m'a lancé le couteau." L'enquête avait en réalité mis en évidence quatre coups de couteau dans le dos, avec un cran d'arrêt, portés alors qu'elle était au sol. Le président le lui fait remarquer, elle dit ne plus s'en souvenir. Plus tard, le père Yoni Palmier, qui avait lui aussi été blessé par son fils en tentant de s'interposer, précise qu'il l'a poignardée dans le dos, contrarié de la voir partir.

"Nous, on n'a pas envie de vous en dire plus"

"On a eu un problème, j'ai pas à entrer dans les détails. C'est personnel, c'est familial", réagit Yoni Palmier, en se dandinant, les bras croisés. "Nous, on n'a pas envie de vous en dire plus." Manifestement excédée par ce mutisme, devenu quasi machinal, l'avocate générale, Béatrice Angelelli, le pousse dans les cordes. "Vous me fatiguez grave !" tente-t-il de lui répondre, avant d'être longuement et vertement remis en place.
Autres épisodes de violence abordés, le jet d'un tabouret ou d'une bouteille en direction de sa mère. Cette dernière laisse éclater un petit rire à leur évocation. Puis elle conclut, définitive : "Ni bouteille ni tabouret !"
À l'entendre, Yoni Palmier est sans problème et sans reproche : sa scolarité se serait "bien passée", alors qu'il a redoublé plusieurs fois et qu'il était, dit-il, un souffre-douleur ; ses demi-frères et soeurs, avec qui il n'y aurait aucun problème, alors que son fils ne voit aucun d'entre eux.

"Je suis très contrarié d'être là"

Est alors évoqué le père de Yoni Palmier. Il avait déjà une femme et des enfants à la naissance de son fils et n'a jamais vécu avec Félicienne. "Il s'adresse pas à moi, ni rien du tout, il m'envoie pas de courrier", bredouille à son sujet l'accusé, qui avait d'abord déclaré, comme à son habitude, ne pas vouloir répondre.
La veille, il avait raconté que son père "venait tirer son coup" chez sa mère, et il se disait "apparemment non désiré". Félicienne, elle, affirme tout le contraire : "non", il ne s'agissait pas que de "relations sexuelles" ; "oui", Yoni était désiré. Menton sur le poing, la tête tournée vers le public, il ne la regarde pas.
Dans l'après-midi, c'est au tour du père de témoigner. "Je suis très, très contrarié d'être là. Je ne sais pas quoi dire", marmonne Georges Palmier, 75 ans, déjà père de trois enfants à la naissance de Yoni, avec une autre femme qu'il n'a jamais quittée. Ce nouvel enfant, "au début", il n'en voulait pas. Mais "sa mère y tenait absolument. Elle s'est retrouvée enceinte..." Il faudra des années avant qu'il révèle cette double vie à sa première famille.
Georges Palmier ne s'explique pas les faits dont son fils est accusé : "Yoni n'a jamais manqué de rien. Il a toujours été chouchouté par tout le monde !"

http://www.lepoint.fr/societe/proces-du-tueur-de-l-essonne-mon-fils-je-pense-qu-il-a-tue-personne-01-04-2015-1917933_23.php

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