mardi 4 mars 2014

Marseille : "J'étais dans ce délire-là je voulais tuer ma mère"

Trois soeurs et le père soudés sur le banc des parties civiles, une autre soeur, électron libre désolidarisé du noyau familial, dans le public, et Kader, le frère aîné, dans le box des accusés. Dans la salle d'audience de la cour d'assises, cette géographie en dit beaucoup sur une famille explosée par le geste meurtrier du fils. Kader Medjebeur a tué sa mère, le 28 juillet 2011, au premier étage de la maison familiale, au fond d'une impasse, dans le quartier du Charrel à Aubagne.
"Au moment où j'ai tiré, je voulais tuer", confirme l'accusé, un massif agent de sécurité au crâne glabre et âgé de 47 ans. La manière dont il raconte le meurtre de sa mère reste difficilement compréhensible. Dans le couloir de la maisonnette, il a d'abord tiré sur Kheira, 65 ans, assise sur la chaise roulante qui lui servait à se déplacer en raison d'une fracture du pied. Ce premier tir n'était pas mortel, confirme le médecin légiste. "Mon corps s'est raidi, mes bras se sont tendus en direction de ma mère. Cet instant-là est tellement horrible. J'ai l'impression que ce premier tir, ça n'a rien fait, alors j'ai enchaîné les cinq autres".

"Je ne comptais pas faire une tuerie" 

Quelques instants plus tard, désarmé, une jeune policière le découvre "soulagé". Dans la voiture où elle le garde, la jeune femme reçoit une étrange confession : "Je ne comptais pas faire une tuerie mais j'ai tué le poison". Le propos est énigmatique. Il ajoute que sa mère lui gâchait la vie.
Quelques instants plus tôt, Kader, qui vit au rez-de-chaussée, était monté chez ses parents, avait demandé où en était la procédure de donation de la maison à son profit. "On attend un appel du notaire", lui répond sa mère. Kader va chercher une arme, remonte, repose la question et sa mère, cette fois, lui dit se calmer. Il ouvre le feu. Face aux jurés, l'accusé oscille entre remords - "J'aurais aimé ne jamais me servir de cette arme" - et démonstration d'une toute puissance. "J'ai mis mon fric dans cette maison, j'ai eu toutes les idées. Symboliquement, j'avais le rôle du père".

"Je voulais restaurer les règles de respect"

Kader Medjebeur apparaît calme, répond posément mais les jurés sentent la dimension psychiatrique de cette affaire. Si la volonté d'être le propriétaire en titre d'une maison qu'il a beaucoup réparée, beaucoup financée se dessine comme le mobile, le passage à l'acte ne se comprend pas puisque toute la famille était prête à signer cette donation. Même ses soeurs qu'à l'audience, il piétine. "Elles se font troncher par des bledards - hommes du bled - pour qu'ils aient les papiers grâce à elles". Et après, explique-t-il, "toute la semaine leurs enfants étaient chez ma mère et chez moi". Dans la famille, "j'ai joué le rôle du père, je ne vais pas faire le rôle du grand-père". Étrangement, il parle d'une de ses soeurs comme de sa secrétaire.
Questionné par Me Nicole Pollak, défenseure des parties civiles, il finit par s'emporter : "C'est les blédards qui font la loi chez nous. Je voulais restaurer les règles de respect de l'intimité dans la maison mais ça, certains Arabes ne connaissent pas".
Dans un premier temps, les psys avaient conclu à l'abolition de son discernement en raison d'une personnalité psychotique. D'autres experts ont contesté cette déclaration d'irresponsabilité pénale mais les jurés pourraient bien avoir, une fois encore, à arbitrer des conflits entre psychiatres opposés. L'accusé encourt la perpétuité.

http://www.laprovence.com/article/actualites/2776545/jetais-dans-ce-delire-la-je-voulais-tuer-ma-mere.html

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