jeudi 27 janvier 2011

Quinze ans de réclusion pour le meurtrier de Mohamed Dib

Hier, devant les assises de la Marne, le mobile du meurtre de Mohamed Dib ne faisait plus aucun doute. Raphaël Solange a bien abattu le Vitryat de 21 ans pour une dette d'argent, le 14 juin 2008. Il a été condamné hier à 15 ans de réclusion criminelle.




«CE jour-là, si l'accusé demande à Mohamed Dib de s'approcher, ce n'est que dans un seul but : l'abattre ! Ainsi, on comprend pourquoi Vitry-le-François s'est enflammé plus tard. Un déchaînement de violences sans nom peu commun ». Hier, l'avocat général n'a laissé planer aucun doute sur les intentions de Raphaël Solange ce 14 juin 2008. « Il voit rouge quand la victime menace de s'en prendre à son père. Il oriente alors son fusil, le pointe à moins de 40 cm de Mohamed Dib et tire. Comment imaginer que l'on puisse rater une personne sauf, bien sûr si on est mauvais tireur. Mais le mauvais tireur, on ne l'a pas », clame Christophe Amunzateguy, faisant ainsi référence au passé de militaire de Raphaël Solange. « Il sait qu'une arme peut donner la mort, surtout si on vise la tête… ».


Un fusil prêt à l'emploi


Quant au mobile du meurtre, le représentant du ministère public n'en fait pas non plus mystère. « Un règlement sur fond de dette de stups ». Selon lui, « avec Raphaël Solange, on est loin du simple toxicomane ». Un homme qui se présente bien en retrait de ce qu'il est véritablement. « C'est un enfant de Rome-Saint-Charles. Il dispose des bons contacts chez les fournisseurs, les bénéfices se font rapidement. En très peu de temps, il est monté très, très vite. Son trafic est devenu juteux en quelques mois seulement ».
Malheureusement, note Christophe Amunzateguy, qui a une parfaite connaissance de Vitry-le-François, « on se fait vite des ennemis. Les discussions sont viriles. Et plus il y a de vendeurs, plus cela devient gênant ». Alors quand Raphaël Solange se trouve dans l'impossibilité de rembourser ses fournisseurs, « cela devient la loi du plus fort ». Bien décider à ne pas se faire arnaquer, il s'arme. « Une arme prête à l'emploi », insiste l'avocat général. « Raphaël Solange manie le mensonge avec talent ». Il évoque un épisode en particulier : « Ses remords sont un piège pour se dédouaner. Après avoir tiré sur Mohamed Dib, il récupère avec sang-froid, ses clefs de voiture dans la main de sa victime ». Le représentant du ministère public requiert alors à l'encontre du Vitryat, la peine de 20 ans de réclusion criminelle. Difficile pour Me Osmont de défendre les intérêts de la famille Dib, sans évoquer les rumeurs d'implication de la victime dans le trafic de stupéfiant. « L'implication de Mohamed Dib n'est assurément pas celle que l'on veut bien lui donner », lance l'avocat, dès le début de sa plaidoirie. « Il est évident que Mohamed se trouvait bien parmi les personnes qui cherchaient Raphaël Solange. c'est incontestable ! ».


Une lettre anonyme


Le pénaliste ne peut alors qu'impliquer le beau-frère de la victime, Ahmed A. « Ce dernier l'a entraîné dans cette équipée pour l'aider à convaincre l'accusé de lui rembourser cette dette de drogue ». Pour autant, Philippe Osmont réfute toute participation de Mohamed Dib dans ce trafic. « On vous l'a répété, ce garçon ne fumait pas, ne buvait pas. Il était sportif ». Aucune substance illicite n'avait d'ailleurs été retrouvée dans le corps du jeune Vitryat au moment de son décès. L'avocat fait également référence à un courrier anonyme envoyé quelques jours après le meurtre aux gendarmes de Vitry. « On y donnait le nom des dealers, celui de la personne qui a vendu le fusil à Solange mais jamais le nom de Dib n'a été évoqué ». Un petit salaire. Des travaux d'intérim réalisés régulièrement pour soutenir sa famille, « clairement, Mohamed Dib n'avait pas le profil d'un dealer. D'ailleurs, le 14 juin 2008 les gendarmes n'ont retrouvé dans son portefeuille que 35 € ».


Une créance de sang


Se tournant vers l'accusé, « plutôt que de tuer le caïd, vous avez abattu un gamin sans défense ».
Fidèle à sa ligne de conduite, Me Bouchaillou, l'avocat de la défense n'a pas plaidé la requalification des faits. Le pénaliste a préféré se pencher sur la personnalité de son client. « Comment ce garçon décrit comme sensible, agréable, gentil a-t-il basculé dans la violence ? » Une constante pourtant : « Il a toujours clamé sa culpabilité ».
L'avocat va alors prononcer des mots terribles : « Ce 14 juin 2008, la dette de drogue s'est transformée en créance de sang ». Il souligne que « Raphaël Solange n'en voulait à personne et surtout pas à Mohamed Dib qu'il ne connaissait pas ». Clairement, « mon client est tombé dans un piège ou tout était organisé. Le piège s'est refermé sur lui ». Cyrille Bouchaillou conclut alors : « Je dis que 20 ans, ce n'est pas juste ! ».
Impassible, la famille de Mohamed Dib patiente sur le banc de la partie civile. « J'ai confiance en la justice de mon pays », confie Messaoud, le père de famille. Il faudra moins 1 h 30 au jury pour rendre un verdict. « Quinze ans de réclusion criminelle ! », annonce le président de la cour d'assises. Raphaël Solange accueille le verdict sans broncher. « Il redoutait les 20 ans », explique son avocat, peu enclin à faire appel. « La justice ne nous a pas trahis. Sans oublier, nous allons tenter de tourner la page », s'exprimait Messaoud, à l'issue de l'audience. Satisfaction de l'avocat général qui admet que les violences volontaires ont pesé dans ses réquisitions. Sans conteste, un avertissement fort en direction des trafiquants de drogue qui sévissent encore à Vitry-le-François.


http://www.lunion.presse.fr/article/marne/quinze-ans-de-reclusion-pour-le-meurtrier-de-mohamed-dib

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