En 2009, Stéphanie Lalisse a été étranglée par sa machine qui n'était pas équipée de ligne de vie (câble coupe-circuit) et le bouton d'arrêt d'urgence était à 20 mètres de son poste.
À l'extérieur, le thermomètre indiquait -10ºC, ce 28 décembre2009. Dans l'atelier de la société Trocmé-Vallart au Ronssoy (est de la Somme), nul ne sait quelle température régnait ce jour-là, à 5heures du matin, lorsque la dizaine d'ouvriers venus faire des heures supplémentaires entre Noël et l'An, avaient pris leur service. Unique certitude: il faisait très froid et Stéphanie Lalisse avait, comme souvent, gardé son écharpe. Cette écharpe qui allait s'enrouler autour de l'axe de rotation de la retordeuse sur laquelle elle travaillait.
Elle est morte seule, étranglée
Stéphanie Lalisse est morte étranglée, sans que personne ne se rende compte du drame. Le bouton d'arrêt d'urgence se situait à 20mètres de son poste de travail et la machine n'était pas équipée de ligne de vie. Ce câble, coupe-circuit accessible en tout point, et qui lui aurait peut-être sauvé la vie. La jeune femme était âgée de 29 ans; elle avait deux enfants. Hier, le tribunal correctionnel d'Amiens avait à juger de la responsabilité de la société Trocmé-Vallart et de son dirigeant, Yann Chanay, dans ce terrible accident.
À la barre, l'inspecteur du travail qui s'est rendu sur les lieux du drame, a rappelé que le Code du travail prévoit que pour toute machine présentant un risque de happement, les dispositifs d'arrêt d'urgence doivent être présents en nombre suffisant et accessibles, que ces machines doivent faire l'objet d'une information collective et individuelle, que la température dans l'atelier doit être correcte. Et enfin, qu'il appartient le cas échéant au chef d'entreprise de faire respecter les consignes de sécurité, dont une interdisant les vêtements amples.
Ni affichage, ni note de service, ni mention dans le règlement intérieur; apparemment, cette problématique ne faisait chez Trocmé-Vallart l'objet d'aucune attention.
Le 6 janvier, soit dix jours après le drame, lors d'un CHSCT extraordinaire, l'inspecteur du travail avait d'ailleurs croisé une ouvrière bardée de colliers, susceptibles eux aussi, d'être happés.
Crûment, Me Delphine Meillet, avocate de la partie civile, a rappelé que les documents de formation de l'entreprise ne mentionnaient que des aspects de qualité du travail, jamais de sécurité. Très vite, la question s'est posée de savoir si cette dernière était réellement au cœur des préoccupations de la société Trocmé-Vallart.
La sécurité était-elle au coeur des préoccupations?
«Non», si l'on en croit les avocats des victimes qui en veulent pour preuve le peu d'argent investi à cette fin. Et qui pointent du doigt le fait que l'entreprise a fait procéder au démontage, avant même la fin de l'enquête, des lignes de vie qui équipaient les machines identiques, rendant du coup impossible toute expertise concernant l'efficacité de ce dispositif.
«Oui», si l'on en croit les avocats de la défense qui se sont contentés de reconnaître la responsabilité de l'entreprise sur le plan civil, mais pas sur le plan pénal. Avant d'évoquer, à mots couverts, la dangerosité de l'attitude de la jeune ouvrière, «qui connaissait les risques encourus». Depuis son banc, le compagnon de la victime a rappelé que Stéphanie Lalisse avait dans un premier temps, préféré rester avec ses enfants entre Noël et le jour de l'An. C'est une remarque de son patron, de passage dans l'atelier le 23décembre, qui l'avait finalement décidé à travailler. Parce qu'elle avait besoin d'argent pour le crédit de la maison. Parce que la paye était mince et qu'il était difficile de refuser quelques heures bonifiées à 25%, au moment des fêtes. «Je n'aurais peut-être pas dû lui en parler, elle a pu prendre cela pour une incitation... », a regretté le patron. Le ministère public a requis une peine de prison avec sursis. L'affaire a été mise en délibéré au 31mai.
http://www.courrier-picard.fr/courrier/Actualites/Info-regionale/Cette-ligne-de-vie-qui-a-manque
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