Les membres du commando condamnés en 2003 pour l'assassinat du préfet Erignac, le 6 février 1998 à Ajaccio, ont commencé à témoigner ce mardi au procès d'Yvan Colonna devant la cour d'assises spéciale de Paris. Les auditions de ces témoins clé pour l'accusation pourraient se révéler décisives pour l'issue du procès. Le premier appelé à la barre a été Martin Ottaviani, condamné à 20 ans de réclusion pour complicité. Venait ensuite Marcel Istria, qui a écopé de la même peine, et qui devait être lui-même suivi d'Alain Ferrandi en fin de journée. Ce dernier a été condamné à perpétuité en tant que coauteur de l'assassinat.
Martin Ottaviani fait partie des membres du commando qui avaient mis en cause Yvan Colonna durant leur garde à vue en mai 1999, puis devant le juge d'instruction, avant de se rétracter. Ottaviani avait placé l'arme du crime entre les mains d'Yvan Colonna, sans toutefois pouvoir assurer qu'il était bien celui qui avait tiré. Il ne s'était rétracté qu'au procès de 2003 où il a été condamné à 20 ans de réclusion pour complicité dans l'assassinat de Claude Erignac, le 6 février 1998 à Ajaccio. Ce mardi devant la cour, il a assuré : "Yvan Colonna est innocent des faits qui lui sont reprochés. Il ne fait pas partie du groupe. Il n'a jamais participé ni de près ni de loin à l'action contre la gendarmerie de Pietrosella ou à celle contre le préfet Erignac".
"Des personnes dont je n'ai pas vu le visage"
Pourquoi avoir, dans ses déclarations initiales, mis en cause Colonna ? A cause des "pressions" subies en garde à vue, affirme-t-il. Les policiers lui auraient présenté "un scénario dont il fallait à tout prix qu'Yvan Colonna fasse partie", et qu'il avait "validé". C'est en "concertation" avec ses avocats, assure-t-il aujourd'hui, qu'il a décidé d'attendre son propre procès, en 2003, pour "innocenter" Yvan Colonna. Lui qui faisait office de chauffeur a éveillé la curiosité en disant pour la première fois qu'il était descendu de voiture ce soir-là, après avoir amené seulement "deux" complices sur les lieux. Or, pour l'accusation, les agresseurs étaient trois : Alain Ferrandi et Pierre Alessandri, qui ont reconnu leur participation, et Yvan Colonna. Mais Martin Ottavini a ensuite refusé d'en dire plus : "Je n'ai rien à déclarer sur les faits", a-t-il obstinément répondu à toutes les questions. Martin Ottaviani a également refusé de participer à la reconstitution envisagée le 6 juin à Ajaccio.
Un silence obstiné qui ne fait pas les affaires d'Yvan Colonna. L'accusé est intervenu après plus de deux heures. "Je te dis franchement, Martin, je comprends pas. Je peux comprendre les pressions, le scénario qu'on te sert, la confirmation chez le juge d'instruction. Par contre, ce que je comprends pas, c'est pourquoi vous avez attendu. Et là, aujourd'hui, te me donnes pas d'explications". Et de poursuivre : "T'es peut-être pas au courant de tout. Mais tu sais que je fais pas partie du commando !". "Je sais", a répondu Ottaviani. "Mais tu m'aides pas !", s'est écrié Colonna. L'un de ses avocats, Pascal Garbarini, a essayé à son tour de convaincre le témoin. "Le fait de dire : je ne fais aucune déclaration sur les faits, et de dire mécaniquement : il n'y est pas, c'est comme si vous ne vous rétractiez pas. C'est même pire", lui a-t-il dit. "Vous rendez notre tâche quasiment impossible", a-t-il ajouté. "Je suis toujours confronté à la même difficulté, à ce barrage où il y a peut-être des secrets. Mais les secrets, c'est aujourd'hui qu'il faut les dire !". Cédant à l'insistance de la défense de Colonna, qui lui demandait s'il pouvait exister des membres du commando "non identifiés", Ottaviani a fini par dire : "Il est probable que je n'ai pas identifié toutes les personnes. J'ai transporté des personnes dont je n'ai pas vu le visage".
La défense Colonna n'a pas pu tirer grand'chose de plus du témoin suivant : interrogé par visioconférence depuis sa prison, Marcel Istria a expliqué à la cour qu'il niait toute participation et ne savait donc rien. A la différence des autres protagonistes, il a en effet toujours tout nié, même en ce qui le concerne. Il a dit à l'audience qu'Yvan Colonna n'avait pas participé à une réunion de tous les acteurs de l'affaire en 1998, retenue dans le dossier comme une moment de préparation du crime. La défense a fait mentionner par écrit au procès-verbal des débats qu'il a affirmé avoir été frappé par les policiers.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire