jeudi 26 mai 2011

Divination et clandestins

Curieux dossier. D'abord, il est très vieux et très volumineux puisque les arrestations datent de l'été 2005. Ensuite, l'affaire examinée hier par la présidente Nourith Reliquet mélange inextricablement les arts divinatoires et le militantisme politique, les marabouts et les sans-papiers.
Mohamed Diaby, 56 ans, l'admet sans façon : il est médium. « Mon père était médium, ma mère était médium » précise-t-il. Une croyance comme une autre sauf que, première erreur, cette activité qui rapporte des sommes rondelettes n'est pas déclarée au fisc. En plus, si le marabout se contente de deviner l'avenir, pas de problème. En revanche, dès qu'on entre dans la médecine (prétendre guérir un paralysé, effectuer des soins avec une pommade), c'est de l'escroquerie. Du moins, c'est la thèse du procureur Douglas Berthe qui met les pieds dans le plat : « D'autant que cette activité se pratique sur des personnes fragiles ».


Mohamed Diaby proteste : « Ces personnes venaient vers moi ! » Beaucoup de chèques arrivaient tout de même sur ces comptes. L'homme utilisait deux faux noms (professeur Kairo et professeur Kader) et plaçait de la pub dans la presse gratuite. Diaby évoque les usages de son pays mais a été averti : il a déjà été condamné pour des motifs similaires.
Sa copine de l'époque, Awaba F., 39 ans, participait apparemment aux soins elle aussi. Elle touchait beaucoup d'argent également et il était versé quelquefois sur d'autres comptes. D'où une nouvelle poursuite pour blanchiment d'argent. « Cet argent, ce sont des cadeaux » affirme la prévenue. L'affaire se corse avec la découverte de faux papiers guinéens, de dossiers pour régulariser des sans-papiers, d'argent perçu pour amener les dossiers de régularisation à un contact à la préfecture, de passages de clandestins. Là aussi, beaucoup d'argent. « Des cadeaux » répète la prévenue. « Les Guinéens me téléphonaient à leur descente d'avion à Roissy parce que j'étais de leur famille ou de leur village » assure le prévenu. Le procureur demande deux ans de prison pour chacun des deux.
Awaba F. accuse : « À la préfecture, on voulait que je leur donne des dossiers pour que je casse le comité des sans-papiers ». Me Emmanuelle Lequien insiste : « C'est très important, on voulait créer une concurence contre le comité des sans-papiers ». M e Laurence De Coster l'assure : « Cette trentaine de dossiers jugés suspects aujourd'hui sont constitués à la demande de la préfecture ».
Au final, Mohamed Diaby écope d'un an de prison et la prévenue de quinze mois de sursis

http://www.nordeclair.fr/Actualite/Justice/2011/05/25/divination-et-clandestins.shtml

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