jeudi 30 juin 2011

Doubs : 15 ans requis et prononcés

« Je suis foutu », avait déclaré Raphaël Mourot alors qu’il venait de s’effondrer, mortellement touché à l’abdomen d’un tir de carabine infligé par Bernard Bergez. La victime avait 28 ans. L’assassin près du double. Quelques minutes plus tôt, le premier avait sorti le second manu militari de chez lui car il venait une nouvelle fois au cours de cette soirée d’après élections municipales de l’insulter, lui et sa femme, sous leur toit où tous ensemble célébraient l’élection de la maîtresse de maison.
Blessé dans son orgueil d’être ainsi mis dehors « comme un objet, comme un sac », Bernard Bergez était revenu pour tuer, même s’il s’en défend aujourd’hui, arguant qu’il n'a « pas voulu ça », qu’il visait « à côté » et même : « Je ne voulais pas tirer » (notre édition d’hier).
« Il est foutu et ma vie aussi », avait-il alors considéré devant à la victime gisant à terre, alors qu’il venait de remiser son fusil de chasse dans sa voiture et d’assurer les personnes s’étant précipitées au secours du jeune homme touché à mort qu’il ne chercherait pas à s’enfuir et attendrait les gendarmes ici, à côté de sa voiture dont il s’était décalé « pour mieux mettre en joue », comme il l’a déclaré quelques heures plus tard aux enquêteurs.
« Vous avez foutu votre vie en l’air mais c’est de votre seule faute et vous, vous êtes vivant », lui a lancé hier M e Serri, l’avocat de la partie civile représentant la compagne, les parents et frères du jeune homme décédé qui, comme la salle d’audience bondée pendant ces deux journées, auront été secoués de sanglots au fil des débats.
« S’il avait voulu faire peur, il aurait tiré en l’air ou à côté ! »
Absents bien évidemment du prétoire, les deux enfants de la victime, 5 et 6 ans aujourd’hui, auront néanmoins été présents en permanence, tant dans les déclarations déchirantes de leur mère-courage (« Qu’est-ce que je leur dis moi à mes enfants ? Comment je leur explique pourquoi on a tué leur père ?»), que par les photos présentées par M e Serri et la teneur de sa plaidoirie. Des propos vibrants où l’avocate a décrit « une famille brisée qui fait corps mais crève de cette absence d’explication. Car ce n’est pas possible de prendre une vie pour des motifs aussi futiles et ridicules ! »
Et de souligner : « Raphaël était un beau gars, jeune, aimé des siens, libre et indépendant, il était aimé et respecté et avait une vie de famille épanouie. Bref, il représentait tout ce que Bernard Bergez n’était pas. » Quant à la préméditation ? « Il ne lui a laissé aucune chance. Quand on est chasseur depuis plus de trente ans et qu’on a une cible à une dizaine de mètres, on sait où on tire. S’il avait voulu faire peur, il aurait tiré en l’air ou à côté ! »
L’avocat général Ruard fait chorus et démontre point par point tant l’intention homicide que la préméditation : « Il est allé chercher l’arme avec laquelle il chasse habituellement, le coup de feu a été tiré à bout portant, il a attendu que la victime soit descendue de chez lui pour tirer ; le coup de feu, dirigé sur une région vitale, a été tiré sans sommation.» Pour le ministère public, les faits méritent « quinze ans de réclusion criminelle suivis de cinq ans de suivi sociojudiciaire avec obligation de soins ».
Il encourait la réclusion criminelle à perpétuité
À la défense, M e Degenève tentera de lever la préméditation en soutenant qu’en fait, son client a eu peur et, « dans un état de sidération qui a mis son inconscient à ciel ouvert, a appuyé sur la détente car il était submergé par l’angoisse ». la cour a rendu son verdict après une heure de délibérations. Bernard Bergez est condamné à 15 ans de réclusion.
Il encourait la réclusion criminelle à perpétuité pour avoir ôté la vie à un homme. Quinze ans donc, face à la détresse des proches de la victime et à leur peine, perpétuelle.
http://www.estrepublicain.fr/fr/a-la-une-aujourdhui/info/5337511-Doubs-15-ans-requis-et-prononces

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