samedi 2 juillet 2011

AMIENS-MERU Trente ans pour Ouamane

Vendredi soir, à Amiens, la cour d'assises de la Somme a condamné Mohamed Ouamane, 43 ans, à 30 ans de réclusion criminelle dont deux tiers de peine de sûreté, soit cinq ans de plus que le verdict prononcé à Beauvais en février2009. Malgré ses dénégations, Ouamane a ainsi été reconnu coupable d'avoir volontairement donné la mort à un jeune de Méru, le 22octobre2004, puis d'avoir tenté de tuer un gendarme venu à la fois l'interpeller et le protéger de la vindicte publique.

Le malaise de la maman


« Il s'approche, il s'approche et il s'approche encore». Me Stéphane Levi marche vers les jurés de la cour d'assises de la Somme. Il est devant eux, proche à les toucher. Soudain, les yeux de la justice rendue au nom du peuple français voient le canon de fusil que Mohamed Ouamane pointe sur Sofiane Aida; ses oreilles entendent la déflagration qui va exploser le cerveau d'une victime âgée de 18 ans, pour un mot de trop prononcé en début de soirée ou une dette de 40€ liée à la vente d'une voiture. Ou les deux, ou autre chose. On ne le saura jamais...

Par cette marche funèbre, le brillant avocat clôt une matinée émouvante, hier. Car avant lui, Ammaria, la maman de Sofiane, a mis la salle au bord des larmes en évoquant son fils défunt, « un garçon très très gentil», puis en retraçant cette nuit de cauchemar: le corps sur le bitume, le visage arraché. « J'entendais le sang couler comme un petit robinet... » MmeAria fera ensuite un malaise et devra être évacuée vers l'hôpital.

La sœur Maghnia, ensuite, frappe par sa douleur mais aussi sa grande lucidité, quand elle reconnaît que Sofiane, septième et dernier de la fratrie, avait été renvoyé de plusieurs établissements scolaires et avait plongé dans le cannabis. « On était une famille unie, on avait de la joie de vivre, se souvient-elle. Depuis, on s'interdit tout bonheur. Quand il y a un mariage ou un anniversaire, on se dit "il est où Sofiane, elle est où sa femme, ils sont où ses enfants? "»

Mère et fille n'ont aucun mot de haine pour Ouamane, plongé dans le silence tout au long de la journée, sinon pour demander sa remise en liberté. Maghnia fait tout de même référence à la réflexion de l'accusé, mercredi, se présentant comme un bon musulman au motif qu'il « ne couche pas avec des chrétiennes». « Quel Islam? se demande la jeune femme. Comme d'autres religions, il interdit d'abord de prendre la vie...»

Dans ces conditions, la tâche des avocats de la défense revient à renverser une montagne. Mes Marras et Guerreiro s'y attellent avec courage, dans un exercice schizophrène - affection dont est atteint leur client! - qui consiste à plaider d'abord l'acquittement, puis de soutenir aussi vigoureusement la réduction de la peine, en raison de l'altération des facultés mentales de Ouamane. Ces troubles reconnus expliquant d'ailleurs qu'il ne risquait pas la perpétuité hier, mais trente ans. Les jurés ont décidé d'utiliser la peine la plus lourde offerte par la loi.
http://www.courrier-picard.fr/courrier/Actualites/Info-regionale/Trente-ans-pour-Ouamane

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