samedi 18 février 2012

L'infirmière grugeait-elle la CPAM ?

Une libérale paloise est suspectée d'avoir gonflé le nombre de ses actes. Une amende et une interdiction d'exercer ont été requises
Enfin une audience devant le tribunal correctionnel de Pau où l'oralité des débats ne fut pas un concept abstrait ! C'était hier et ce fut, il faut bien le reconnaître, un peu le bazar, les uns et les autres se coupant la parole à tout bout de champ. Mais au moins a-t-on entendu le son de la voix de la prévenue et ses explications, certes confuses. Cette petite révolution, pour qui suit régulièrement l'activité de cette juridiction, on la doit à l'affaire de Marie-Christine S., une infirmière libérale paloise de 56 ans suspectée d'avoir escroqué la Caisse primaire d'assurance-maladie en surfacturant des actes de soins.
Elle travaille… 25 h/jour !
Le pot aux roses est découvert lors d'un contrôle de la CPAM, en 2010. En épluchant les déclarations de l'infirmière, l'organisme tique sur le nombre d'actes qu'elle affirme réaliser par jour : entre 51 et 56, pour les quatorze patients qu'elle suit. Problème, sachant qu'il faut une demi-heure pour effecteur ces soins, selon la nomenclature de l'Assurance-maladie, cela signifie que Marie-Thérèse travaille… entre 25 h 50 et 28 heures par jour ! En outre, la professionnelle facture également des actes le mardi, un de ses jours de repos.

Ces premiers éléments en main, la CPAM auditionne tous les patients de la dame. L'un raconte qu'elle se rend chez lui deux fois par jour, là où l'infirmière facture trois visites. Un autre explique qu'elle ne change pas son pansement quotidiennement, contrairement à ce qu'elle fait payer à la caisse. Le comptable de la Sécu ausculte alors les déclarations de Marie-Christine pour 2009. Maniant la litote à merveille, il conclut à « un profil d'activité atypique » : selon les calculs de la CPAM, la professionnelle a travaillé en moyenne… plus de 23 heures par jour cette année-là ! Bilan : le directeur décide de saisir la justice.
« Je l'ai rencontré et lui ai expliqué ma situation. Mes patients sont tous en fin de vie et nécessitent un lourd suivi. Ils ne sont pas malades de 6 heures à 6 h 37. Et puis, tous mes programmes de soins ont été validés par le médecin-conseil de la CPAM », insiste la prévenue qui conteste toute manœuvre frauduleuse.
« Le problème dans cette histoire, c'est que la caisse a une lecture chronométrique de l'activité de ma cliente qui se dévoue corps et âme pour ses patients », enfonce pour la défense Me Sagardoytho.
Un avertissement en 2008
« Vous n'allez pas me faire croire qu'elle a eu le rythme d'un skipper en pleine mer pendant un an. Elle dormait plus d'une heure par nuit quand même ! », coupe le président Marc Magnon.
Et le magistrat de rappeler les comptes plombés de l'Assurance-maladie. Sauf que les entourloupes supposées de Marie-Christine font bien pâle figure à côté des six milliards de déficit. On lui reproche d'avoir empoché indûment 3 300 euros, l'enquête n'ayant étonnamment porté que sur les mois de janvier et février 2010. « Elle n'en était pourtant pas à son premier coup d'essai, enfonce Me Alexandrine Barnaba, l'avocate de la CPAM, qui s'est constituée partie civile. En 2008, elle a déjà fait l'objet d'un avertissement de la caisse. » Tout en soulignant qu'il n'est pas question de contester les qualités professionnelles de la prévenue, la substitut du procureur Orlane Yaouanq estime l'escroquerie caractérisée et requiert 5 000 euros d'amende et une interdiction d'exercer pendant trois mois. Le tribunal a mis sa décision en délibéré au 19 mars.
http://www.sudouest.fr/2012/02/14/l-infirmiere-grugeait-elle-la-cpam-632831-4344.php

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