À Valentigney, en février 2008, avec un couteau, il avait braqué le bureau de tabac « La Cartouche », emportant 800 € en espèces, puis avec un pistolet automatique, l’agence de la BNP quelques mois plus tard, en novembre 2009, blessant le conseiller clientèle à la joue pour des cartes de crédit et des chéquiers dont il ne pouvait rien faire.
Youssef Benmrah reconnaît les faits, mais s’exonère aussitôt : « On m’a obligé. » Des braquages sur fond de trafic de stupéfiants entre dealers montbéliardais et dolois. Lui serait perçu par les Jurassiens comme un intermédiaire responsable d’une dette du clan doubien.
Pour l’avocat général Massa, « les investigations de la police judiciaire n’accréditent pas la thèse de braquage commandité. Youssef Benmrah apparaît plutôt comme un fournisseur de drogue empêtré dans des magouilles de trafics de voitures et criblé de dettes ». Elle souligne : « Malgré un amateurisme certain, le petit voleur est passé au statut de malfaiteur. Sa détermination va de paire avec la préméditation : il choisit des cibles proches de chez lui et passe des menaces aux violences physiques lors du deuxième braquage. » Elle invite les jurés à s’en tenir aux preuves, et requiert six ans de prison et la privation des droits civils, civiques et de famille.
« Happé par la réalité du quartier »
M e Chassard, défenseur, refuse de laisser enfermer son client dans ce personnage falot, à l’enfance ordinaire, introverti et cuirassé dans une veste étriquée.« Elle est où la famille unie, normale, aimante qui a, soit disant, bercé son enfance ? Qui de ses six frères et sœurs est venu le soutenir ? » demande-t-elle, en pointant la salle d’audience absolument vide. « Il n’a pas 18 ans, quand il doit affronter le calvaire vécu par son père, emporté par un cancer des poumons après dix-huit mois de douleurs physiques et psychiques. Son frère aîné, alors, pour le remettre dans le droit chemin, le tabasse à coups de pieds et de poings. Alors, oui, il se laisse happer par la réalité du quartier, mais il tombe au milieu de trafiquants de drogue qui jouent dans la cour des grands. »
Pour l’avocate, certes, la géolocalisation de leurs portables affirme que les dealers n’étaient pas à Valentigney pour le contraindre à braquer. « Elle dit seulement que les portables n’y étaient pas, les personnes pouvaient y être avec d’autres téléphones. Eux ne sont pas des amateurs, ils prennent des précautions et n’oublient pas un sac en plastique sur le comptoir après le braquage. »
M e Chassard rappelle que Youssef Benmrah, confondu par les empreintes retrouvées sur le sac plastique, a avoué spontanément le braquage de la BNP, avant même que le lien ne soit fait entre les deux affaires. Elle regrette que des faits anciens de trois ans rejoignent la triste actualité des braquages en séries dans le pays de Montbéliard.
Les jurés l’entendent. Youssef Benmrah dort désormais en prison pour deux années dont il faut déduire les sept mois de détention préventive.
Durant leur délibéré, son frère aîné a apporté discrètement un sac plastique avec quelques effets personnels. Les deux hommes ne se sont pas dit un mot.
http://www.estrepublicain.fr/actualite/2012/03/14/deux-ans-ferme-pour-le-braqueur
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