mardi 15 mai 2012

Aix : pour le crash du Canadair, la justice dédouane le commandant

Quinze ans de procédure pour dire finalement que c'est la faute à personne. C'est rageant", peste Me Marguerite Lions. L'avocate se fait l'interprète de Sylvie Duchemin, l'épouse d'un pilote de Canadair, tué dans le crash de son appareil, le 17 novembre 1997 dans la baie de La Ciotat.
La cour d'appel d'Aix-en-Provence a mis hier un point final à l'instruction ouverte après cet accident qui avait coûté la vie à Franck Duchemin et occasionné de graves blessures à Éric Renoult, le commandant de bord. Sans finalement retenir aucune responsabilité.
L'appareil, un Canadair CL 415, s'était abîmé à proximité des côtes durant une simulation de panne moteur. L'avion s'était retourné avant de se casser, plongeant le cockpit dans l'eau. Il avait amerri alors que les portes à eau étaient ouvertes.
En 2007, au terme d'expertises, le constructeur canadien Bombardier Inc était mis en examen pour homicide et blessures involontaires. L'industriel se voyait notamment reprocher une négligence, à savoir l'installation d'un système de signalisation insuffisant pour alerter les pilotes de l'ouverture des portes en phase d'approche du plan d'eau. À la demande de la Sécurité civile, des modifications étaient d'ailleurs apportées après l'accident. Les avions étaient équipés d'une alarme, ce que réclamaient les pilotes français mais également leurs collègues européens.
En dépit de réquisitions de renvoi devant le tribunal correctionnel, Bombardier bénéficiait, en novembre 2010, d'un non-lieu. Dans le même temps, la chambre de l'instruction de la cour d'appel créait la surprise en ordonnant un supplément d'information en vue de la mise en examen d'Éric Renoult . Ce choix de procédure suscitait la colère du petit monde des pilotes de Canadair et l'incompréhension de l'épouse de Franck Duchemin. Elle s'indignait : "Jamais on n'a mis en cause un pilote pour la mort de son copilote".
Comme l'avait requis le parquet général, Éric Renoult a bénéficié hier d'un non-lieu. "Je suis bien sûr soulagé mais aussi amer que Bombardier ait été exonéré de toute faute. Toutes mes pensées vont à Sylvie Duchemin qui, avec ce non-lieu général, aura tout perdu." Cette mise en cause du commandant avait d'autant plus ému la communauté aéronautique qu'"aucun des éléments du dossier ne permet de définir avec certitude pourquoi et comment l'aéronef piloté par Éric Renoult a amerri portes à eau ouvertes", a toujours estimé le parquet général.
Une première expertise avait clairement écarté toute erreur de pilotage tandis que d'autres experts, appliquant les règles de l'aéronautique passagers aux missions des Canadair, pointaient une mauvaise exécution de la check-list. Alors que les Canadair, ce jour-là, s'entraînaient à des amerrissages à la suite d'une panne moteur, les experts reprochaient aux pilotes de ne pas avoir rejoint un aéroport. "C'était ubuesque", commente Me Stephen Monod, défenseur d'Éric Renoult. L'avocat se félicite de cette issue car "le dossier ne permettait de retenir aucune responsabilité à l'égard des deux pilotes".

http://www.laprovence.com/article/a-la-une/aix-pour-le-crash-du-canadair-la-justice-dedouane-le-commandant

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