Tous les protagonistes de ce procès savent qu'il faudra étudier ce dossier avec délicatesse. Peser les mots, mesurer le chagrin, tout en allant chercher la vérité. C'est ce qu'attendent, assis sur le banc de la partie civile, Lucile et François. Parce que le 19 mai 2008, ils ont perdu leurs parents et leur frère. "Un drame, avec pour responsable insidieux le monoxyde de carbone".
C'est en tout cas ce qu'avaient déterminé l'enquête et les expertises, après la mort de cette famille, dans sa villa de Miramas, quartier de Chantegrive. Yvette et Jacques, et leur fils Frédéric qui vivait avec eux, avaient été découverts sans vie chez eux.
Devant le tribunal correctionnel d'Aix, deux dysfonctionnements sont mis en avant : la chaudière, installée en 1996. Son système d'évacuation n'était pas adapté à sa puissance : le conduit de cheminée était trop petit. Et puis en janvier 2008, quatre mois avant l'accident, une VMC, ventilation mécanique contrôlée, avait été installée dans la pièce. La conjugaison des deux manquements a-t-elle conduit au drame ? L'un des éléments possède-t-il une part de responsabilité plus grande ?
Selon un expert, "la simultanéité des deux erreurs a créé les conditions de l'accident". L'un des deux prévenus, l'entreprise de chauffage (en qualité de personne morale) représentée par le gérant qui a repris la société en 2007, ou l'artisan qui a installé la VMC, et à qui la famille avait expliqué, selon lui, que "c'était une chaudière à ventouse, compatible avec la VMC", porte-t-il une plus grande part d'implication ? Au second, le juge Marcovici fait observer : "Vous n'avez pas poussé la curiosité bien loin... Vous n'auriez pas pu soulever la bâche posée sur la chaudière ?"
Au premier, le tribunal demande si les vérifications nécessaires avaient été opérées. Il va répondre : "C'est la pose de la VMC qui a foutu la pagaille, corps de chauffe encrassé ou pas encrassé".
"La société chargée de l'installation a exercé un contrôle largement insuffisant"
En partie civile, Me Fabien Atlani se fait le porte-parole des deux enfants qui attendent des explications sur la mort tragique de leur famille. "Ma mère se plaignait de somnolences","mon père avait des vertiges","personne n'avait pensé au monoxyde de carbone", avaient déploré les proches d'Yvette, Jacques et Frédéric, décédés dans ce que l'avocat va baptiser "la maison du malheur".
Pour la partie civile, "la société chargée de l'installation puis de l'entretien de la chaudière a exercé un contrôle largement insuffisant", puis la pose de la VMC pose problème également. Pour le procureur Olivier Poulet, qui rappelle en préambule de ses réquisitions que "des protocoles doivent être respectés car le gaz est hautement dangereux", la responsabilité de l'entreprise chauffagiste est bien assise : "Elle a installé une chaudière non conforme et n'a pas joué son rôle en suivant les prescriptions réglementaires". Il requiert à son encontre "une amende qui ne saurait être inférieure à 50 000 euros".
Même logique contre le second prévenu : "Il aurait dû vérifier l'environnement avant de poser la VMC. Une bâche posée sur la chaudière n'exonère pas sa responsabilité. Il y a une causalité directe entre l'action de l'un et l'action de l'autre". Le procureur Poulet requiert un an d'emprisonnement avec sursis.
Le procureur requirt de la prison avec sursis. Le tribunal rendra son délibéré le 20 juin.
En défense, pour Me Pierre Auda qui assiste et défend l'artisan qui avait installé la VMC, "pour des raisons de pur droit, on ne peut retenir la culpabilité" de son client. "Ce n'est pas la mise en place de la VMC qui provoque le décès. La VMC n'est qu'un facteur aggravant. Il n'y a donc pas violation manifestement délibérée d'une obligation prévue par la loi". Quant à Me Mathieu Baffert, qui défend la société de chauffage, il revient avant tout sur les dates : "Mon client a créé sa société en 2007. Comment faire supporter à sa société les faits commis avant. La chaudière a été installée en 1996 ! Une révision a été faite en 2007. Peut-être alors que la prévention est mal dirigée..."
Le tribunal rendra son délibéré le 20 juin.
http://www.laprovence.com/article/a-la-une/le-monoxyde-de-carbone-avait-tue-trois-membres-dune-famille-a-salon
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