samedi 4 août 2012

Marie, six ans, seule rescapée d’un terrible accident de la route

Sans elle, il n’en serait pas là. S’il n’avait pas un jour croisé le regard de cette petite fille de 6 ans « dotée d’une incroyable rage de vivre », Jean-Pascal Thomasset, le directeur de l’Avema (lire par ailleurs), ne se serait peut-être pas engagé professionnellement comme il l’a fait, au service des victimes.
C’était il y a un peu plus de trente ans, une première expérience bouleversante dans la vie active pour celui qui était à l’époque un jeune soignant en stage d’été au sein du centre médical de rééducation pédiatrique Romans-Ferrari, près de Châtillon-sur-Chalaronne. Elle avait 6 ans, elle s’appelait Marie, toute sa famille venait de périr dans un accident de la route survenu quelques semaines plus tôt, dans l’Ain. Jean-Pascal Thomasset se souviendra toute sa vie de cette rencontre : « Dès le premier soir, j’ai été interpellé par cette petite qui se trouvait avec un groupe d’enfants. C’était une belle petite fille brune, mais elle était marquée, elle avait quelque chose dans le regard, comme les yeux cernés. Je me souviens m’être demandé comment on pouvait avoir des cernes à son âge. »
Son histoire, c’était un choc frontal. Un drame de l’insécurité routière, dans lequel elle avait perdu sa mère, son père et son frère. Elle n’avait plus que ses grands-parents dans la vie.
Presque seule au monde, mais un besoin vital d’expulser sa souffrance par la parole, à la recherche d’une main bienveillante, d’un temps d’écoute : « Je me suis assis avec elle dans sa chambre. Je la revois me raconter son histoire. Elle m’a demandé si je pouvais l’aider à refaire son bandage. J’étais totalement subjugué par cette force de caractère, cette puissance de vie, je n’avais même pas remarqué qu’elle avait un moignon : elle avait été amputée d’une jambe. »
Trente ans après, le souvenir de Marie continue d’accompagner Jean-Pascal Thomasset dans sa vie de tous les jours : « Je pense très souvent à elle. J’avais devant moi une petite fille marquée dans sa chair, qui avait tout perdu par la faute d’un chauffard. Il lui fallait surmonter ce quotidien épouvantable, les soins, la prothèse et la perte de ses proches. Après un tel cataclysme, elle pouvait en avoir pour une vie entière de ressentiments. Mais c’était comme si elle me disait : Regarde, même à 6 ans, on peut trouver les ressources pour s’en sortir, la vie continue, la vie est belle. »
Qu’est devenue la petite Marie ? « On a fait un bout de chemin ensemble et puis je l’ai perdue de vue. C’est comme avec les 5 000 victimes qu’on accueille tous les ans à l’Avema, c’est toujours une frustration de ne pas savoir ce que sont devenus les gens. »

Jean-Pascal Thomasset
À lui seul, il incarne le chemin parcouru depuis plus de vingt ans par les victimes, dans leur quête de reconnaissance, d’écoute et d’assistance. Educateur de formation, Jean-Pascal Thomasset, 52 ans, est directeur de l’Avema (aide aux victimes et médiation dans l’Ain) depuis la création de l’association à Bourg-en-Bresse, en 1993. Premier adjoint au maire de Nantua, il est également secrétaire général de l’Institut national d’aide aux victimes et médiation (Inavem), une fédération nationale qui regroupe, depuis 1986, près de 150 associations d’aide aux victimes à travers toute la France.

http://www.leprogres.fr/ain/2012/07/30/marie-six-ans-seule-rescapee-d-un-terrible-accident-de-la-route

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