vendredi 30 novembre 2012

tribunal correctionnel / Haschisch, solitude et pauvreté « Les éléments de ce dossier sont bel et bien stupéfiants »

Vingt ans qu'il fume des joints et s'enfonce dans la précarité. Huit mois de prison pour ce Vouzinois avare de mots et aux idées racistes.
Le 22 octobre, Philippe, au volant de sa voiture, se fait contrôler par les gendarmes.
Positif au cannabis. Les militaires trouvent dans le véhicule une trentaine de grammes ainsi qu'une balance électronique. Philippe revenait tout juste du domicile de son dealer carolo, où il va chaque mois chercher sa consommation personnelle.
Depuis « une vingtaine d'années » qu'il consomme, Philippe, âgé de 38 ans, est sérieusement accroché : entre « sept et dix joints par jour », selon sa propre estimation. « Je fume par ennui », a-t-il dit lors de sa garde à vue. Six condamnations, dont trois pour des faits similaires. Ce qui vaut à cet ancien chauffeur-routier, au chômage depuis déjà quelques lunes, d'être jugé en comparution immédiate.
Jeudi, l'audience ronronnait lorsque le président, l'air faussement naïf, demande au prévenu : « Et cette balance, c'était pour vérifier que la quantité de cannabis correspondait bien à ce qui était convenu ? ». Réplique de Philippe : « Ben ouais, il est Algérien.
- Pardon ?
- Il est Algérien.
- Parce que votre dealer est Algérien, il y a plus de risques qu'il vous vole ?
- …
Impassible
Silence incrédule dans la salle. Le président évoque ensuite les prénoms des enfants de Philippe, parfaitement insensés*. Celui d'une de ses filles correspond à l'appellation d'une variété d'herbe réputée pour sa qualité… « C'est pas vous qui jugez les prénoms », abrège sèchement le prévenu. Ce dernier fait partir en fumée « une centaine d'euros par mois ». Au regard de la précarité de sa situation, c'est un gouffre tel que sa mère l'aide financièrement pour nourrir les enfants du foyer. Philippe apparaît étrangement impassible, comme s'il était spectateur de son propre procès.
La substitut du procureur est consternée : « Rien n'a de portée sur lui. Sans mauvais jeu de mots, les éléments de ce dossier sont bel et bien stupéfiants. Il faut qu'il prenne conscience des difficultés dans lesquelles il met sa famille ». Et finit par réclamer huit mois ferme avec mandat de dépôt. L'avocate de la défense rappelle que le prévenu « n'a jamais connu la détention ».
Déclaré coupable, l'hermétique Philippe, dont on se demande encore ce qu'aurait dit un expert psychiatre, écope de huit mois de prison, peine aménageable par un bracelet électronique.


http://www.lunion.presse.fr/article/ardennes/tribunal-correctionnel-haschisch-solitude-et-pauvrete-les-elements-de-ce-dossier-s-0

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