mercredi 6 février 2013

Les parents de Jérémy Censier racontent l'horreur

Les parents, le frère et la sœur de Jérémy Censier ont évoqué la mémoire du jeune Gersois tué lors d'une fête de village, à Nay. Pour eux, la nuit du 21 au 22 août 2009, «on a tué une famille» !
335 grammes. Toutes les nuits, Joël Censier s'endort en pensant au poids que faisait le cœur de son fils quand il est mort, sauvagement tué à l'arme blanche lors d'une bagarre pendant une fête de village, à Nay, dans les Pyrénées-Atlantiques. Hier matin, devant la cour d'assises des mineurs à Pau, l'ancien policier auscitain a pris la parole en premier pour expliquer que, dans la nuit du 21 au 22 août 2009, on n'a pas seulement «tué un enfant» de 19 ans, «souriant, jovial, avenant», «on a tué une famille» !
Il raconte, d'abord calmement. «5 h 55 : c'est l'heure où le maire de Saint Cricq (N.D.L.R. : lieu de résidence de la famille, dans le Gers) est venu tambouriner à ma porte», dit-il. «J'ai compris de suite. J'ai coutume de faire ce genre de choses. Il m'apprend alors la mort de mon garçon lors d'une bagarre à coups de couteau. Le monde s'effondre. Je vais l'apprendre à Corinne, mon épouse, je n'oublierai jamais son cri.»
Pendant ce temps, dans la salle, le principal accusé, Samson G. âgé de 22 ans, auteur selon l'accusation du coup de couteau fatal au cœur, regarde droit devant lui, sans bouger. Un seul des cinq autres prévenus, poursuivis pour «violence en réunion», ose regarder le père, puis les proches qui viennent à la barre.
«Je suis mort avec lui»
«Jérémy, c'était un choix», confie encore le père : «Il est né après un drame, la perte de notre troisième enfant mais nous n'aimons pas l'échec, nous l'avons eu quelques années après, avec angoisse jusqu'à sa naissance.»
Puis, dit-il, la famille Censier a vécu avec lui «19 ans de bonheur». Il décrit un jeune à la «force tranquille», «espiègle», «bordélique», qui voulait devenir policier, comme lui.
«Jérémy, on s'est acharné. On l'a ouvert, on l'a découpé, on l'a recousu, avant de nous le remettre», dit-il encore.
Des images du visage heureux de son enfant, à 18 ans, défilent à l'écran devant une salle emplie de sanglots étouffés. Les larmes coulent, même sur le visage de Me Blazy, avocat de la défense. La diffusion de ces photos des jours heureux était une demande de Joël, «pour que les gens ne restent pas avec les photos indécentes qui ont été montrées la semaine dernière. Jérémy ne mérite pas ça».
Puis, c'est au tour de Christophe de passer à la barre. Le frère de 26 ans, vivant à Montpellier et sans emploi, vient raconter comment avec la disparition violente de son frère, il a «perdu» sa «part d'humanité» et sa femme au passage. «Jérémy, je vivais en osmose avec lui. On a grandi dans la même chambre. Je suis mort avec lui.
[…] . J'ai perdu mon cœur. Aujourd'hui, j'ai un cœur de glace. Je suis devenu le même monstre que ceux qui ont assassiné mon frère.»Sa sœur Carole, de 29 ans, «anéantie», évoque elle ses «cauchemars». Enfin arrive la mère, Corinne, 55 ans, grande brune élancée, d'origine espagnole, qui parle aux agresseurs de son plus jeune fils, leur rappelant qu'ils sont issus d'une famille de gens du voyage, originaire comme elle d'Espagne. Elle les regarde droit dans les yeux : «Vous apportez la honte à votre communauté en vous comportant comme ça. Qu'en pensent vos grands-parents ? Vos mamans ? Jérémy avait des potes parmi vous. Il n'avait rien contre vous.» Puis elle évoque une scène, vécue en 1996, lors d'une bagarre en maternelle entre Jonathan, le demi-frère du meurtrier présumé, et son fils aîné. «La grand mère criait en espagnol car il avait cassé une dent à mon fils». «Je lui avais dit : Calmez-vous, ce n'est qu'une dent.» Puis, repensant à Jérémy : «Je suis morte avec lui», souffle-t-elle encore.

http://www.ladepeche.fr/article/2013/02/06/1553712-les-parents-de-jeremy-censier-racontent-l-horreur.html

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