Ils n'auraient pas été informés de "la nature anorexigène" de son principe actif, le Benfluorex. Ce dernier larguerait dans l'organisme une substance toxique, la norfenfluramine, une molécule très proche de l'amphétamine qui provoque des hypertensions artérielles pulmonaires et multiplie par trois le risque de valvulopathies (dysfonctionnement des valves cardiaques). Me Charles Joseph-Oudin, conseil d'une centaine de parties civiles à Nanterre, espère que "les Laboratoires Servier n'essayeront plus de mettre des bâtons dans les roues de la machine judiciaire". Le procès, débuté le 14 mai 2012, avait immédiatement tourné court. Le tribunal avait accepté de transmettre à la Cour de cassation une question prioritaire de constitutionnalité (QPC), soulevée par la défense. Jacques Servier contestait qu'il puisse être jugé à Nanterre alors qu'il est parallèlement mis en examen pour des faits similaires à Paris. La haute juridiction a toutefois refusé de transmettre cette QPC au Conseil constitutionnel.
Bataille procédurale
"Nous sommes rassurés par la position de la Cour. Elle a clairement exprimé sa volonté qu'un procès se tienne à Nanterre", relève Me Joseph-Oudin. Mais pour Me Juliette Nattier, conseil d'une trentaine de victimes présumées, "il y a un risque que l'affaire ne soit encore pas jugée au fond cette fois-ci". La défense de Servier va en effet engager une nouvelle bataille procédurale à l'ouverture des débats, susceptible d'entraîner un nouveau renvoi du procès. "Nous souhaitons qu'une expertise judiciaire autonome soit faite à Nanterre ou à défaut la communication de tous les éléments recueillis dans le cadre des expertises en cours à Paris", indique Me Hervé Temime. L'avocat va aussi demander "un complément d'information permettant au tribunal d'apprécier le rôle des autorités sanitaires dans la tromperie dénoncée à Nanterre". L'Agence du médicament a en effet été mise en examen en mars dernier pour "homicides et blessures involontaires", les juges d'instruction parisiens la soupçonnant d'avoir négligé les alertes sur la dangerosité du Mediator. Interrogé sur la présence de Jacques Servier à l'ouverture des débats, son conseil n'a pas souhaité répondre.De leur côté, les parties civiles disposent de plusieurs pièces maîtresses comme des documents internes de Servier et les annexes du rapport accablant de l'Inspection générale des affaires sociales (Igas). Selon l'Igas, le retrait du Mediator "aurait pu être décidé dès 1999", soit dix ans avant sa disparition du marché. Jacques Servier, ainsi que les quatre anciens cadres de Servier et sa filiale Biopharma jugés à ses côtés à Nanterre, encourent quatre ans de prison et une amende de 75 000 euros ; Servier et Biopharma, en tant que personnes morales, une amende de 375 000 euros ainsi qu'une interdiction d'exercer.
D'après différentes études, le Mediator a déjà provoqué plusieurs centaines de décès en France, même si leur nombre exact reste difficile à évaluer. Selon un rapport d'experts judiciaires rendu public en avril, ce médicament, commercialisé de 1976 à 2009, pourrait à long terme causer en France 1 300 à 1 800 morts par valvulopathie.
http://www.lepoint.fr/societe/l-affaire-mediator-devant-la-justice-a-nanterre-20-05-2013-1670413_23.php
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