mardi 16 juillet 2013

« S’il cesse de consommer il cesse de dealer »

Comment juger un dealer de drogue quand lui-même est un toxicomane avéré ? Le tribunal correctionnel de Nancy a dû se pencher, hier, sur cette épineuse question. Face aux juges, le prévenu est un grand Lunévillois de 28 ans, père de famille, maçon. Il est accusé d’avoir vendu, du 1er juin 2011 au 13 mai 2013, pas moins de 5 kg d’héroïne, 4 kg de canabis et « quelques grammes » de cocaïne dans sa ville natale. « Un trafic très impressionnant », s’exclame la présidente Denise Martino. Le tout en état de récidive, après une 1re condamnation en 2011 pour usage illicite de stupéfiants.
Maigre, la voix frêle, le visage fermé, l’homme est manifestement affaibli. Les séquelles d’une toxicomanie qui dure depuis « 6 ou 7 ans ». Avec sa concubine, il est allé jusqu’à consommer 8 grammes d’héroïne par jour à l’époque, pour 2.000 € par mois. « Au départ, j’ai revendu de la drogue pour payer ma propre consommation, puis mon dealer a augmenté les doses, toujours plus », s’explique lentement le prévenu. Son père et employeur, à la barre, n’a « rien vu » : « Il était assidu et ponctuel au travail ».
Ce sont ses clients qui dénoncent le trafic. Interrogés par les enquêteurs, deux d’entre eux balancent le nom de leur trafiquant, qui est mis sous surveillance. Des centaines d’appels provenant des mêmes numéros, un défilé de consommateurs de drogue connus des services : l’homme est interpellé et placé en garde à vue. « Vu les quantités que vous revendiez, cela commençait à se savoir… », lâche le procureur Yves Calvet.
Mais pour son avocate, le prévenu est avant tout « victime » de sa toxicomanie. « Tout son salaire allait à ses deux enfants. Il ne s’est pas enrichi : ses bénéfices minables ne servaient qu’à aller à la pizzeria de Lunéville trois fois par semaine », tance Me Liliane Glock. Avant d’expliquer que l’« espoir » est « toujours là » : « Selon ses analyses, il n’a pas touché à la drogue depuis juin ». Le couple suit en effet un traitement de substitution à l’héroïne. « Je vous demande de ne pas l’envoyer en prison. S’il cesse de consommer, il cesse de dealer, c’est absolument certain », ajoute l’avocate. Et elle est entendue : le prévenu écope d’une peine de 18 mois de prison aménageable, dont 10 mois avec sursis et mise à l’épreuve, assortis d’une obligation de soins.

http://www.estrepublicain.fr/meurthe-et-moselle/2013/07/16/s-il-cesse-de-consommer-il-cesse-de-dealer

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