mercredi 7 mai 2014

Explosion de Witry-lès-Reims: deux et trois ans de sursis requis

Hayden avait trois ans. Il dormait sagement dans son pyjama Spiderman quand lui, sa mère, son père et un oncle ont péri dans l’explosion de Witry-lès-Reims. Kévin Piezel et Laurinda Gomes habitaient au rez-de-chaussée avec leur fils. « Depuis, la mère de Kévin se rend tous les jours au cimetière pour voir ses trois petits, comme elle dit », lâche son avocat, Me  Philippe Osmont. Thierry Roullet, 50 ans, demeurait au premier étage, lui aussi tué dans son sommeil alors que sa femme venait de quitter la chambre.
Quatre vies fauchées, une famille endeuillée, une vingtaine de blessés et des sinistrés traumatisés convaincus d’avoir devant eux, à la barre du tribunal correctionnel de Reims, les deux responsables de la catastrophe du 3 avril 2013 : Éric Duloquin, le locataire alcoolique sous curatelle de l’Udaf qui aurait machinalement ouvert le tuyau d’arrivée de sa gazinière, trop saoul pour se rappeler qu’elle avait été retirée par l’artisan Jean-Robert Augustin, reparti sans poser de bouchon obturateur sur le tuyau faute d’en disposer. Il pensait revenir le lendemain. L’immeuble explosait à 6 h 03.
« Il y avait une grenade dans cet appartement. M. Augustin l’a dégoupillée, M. Duloquin l’a lâchée », fustige le conseil de la famille Gomes, Me  Carlos de Campos. Une « grenade » pour l’avocat, une « bombe » pour le procureur-adjoint Laurent de Caigny, « une bombe progressivement mise en place par l’accumulation d’une atmosphère explosive qui s’est formée à la suite de deux erreurs conjointes : une erreur que je ne peux qu’attribuer à Éric Duloquin qui a ouvert la vanne de la gazinière qu’il n’avait plus ; une erreur que je ne peux qu’attribuer à Jean-Robert Augustin de ne pas avoir vissé un bouchon au bout du tuyau qui n’était plus relié à la gazinière ».
Sa négligence est plus lourde, analyse le magistrat, en sa qualité de « professionnel » qui intervenait de plus « dans un domaine où il n’avait aucune compétence ». Ses diplômes ? « Technicien de maintenance en électricité et électronique grand public. Il n’a pas de formation particulière pour intervenir sur les installations de gaz. »

Interdiction d’exercer

Éric Duloquin ne boit plus depuis le drame. Le procureur-adjoint requiert deux ans de prison intégralement assortis d’un sursis avec mise à l’épreuve et obligation de soins, « sanction adaptée à sa personnalité pour lui permettre, avec cette abstinence nouvelle, de reprendre pied dans la vie ». Contre Jean-Robert Augustin, il réclame trois ans d’emprisonnement également couverts d’un sursis avec mise à l’épreuve, et « l’interdiction définitive d’exercer toute activité professionnelle et bénévole dans le domaine des travaux de second œuvre du bâtiment ».
« La condamnation, elle est déjà là ! Elle a été prononcée le 3 avril 2013 », assène son avocat, Me Simon Miravete. « Depuis ce jour, socialement, il est mort ! Il est déjà puni ! » Et pourtant non coupable, plaide-t-il. Joignant sa parole à celles de Mes Christine Cordier-Dumetz et Pierre Vandenbussche, conseils respectifs d’Éric Duloquin et de la compagnie Axa, assureur du locataire contre laquelle elle se retourne, Me Miravete dénonce une « enquête insuffisante » et « une absence de rigueur » dans le travail de l’expert : le tuyau « position grande ouverte, non bouchonné » découvert dans les décombres « n’a pas été formellement identifié comme étant celui qui équipait l’appartement d’Éric Duloquin ». Il pourrait provenir d’un autre appartement. Même imprécision, assure la défense, sur l’origine de la fuite de gaz qui aurait pu survenir en un autre point de l’immeuble. Et aucune preuve, au cas où il s’agirait du bon tuyau, qu’il a été ouvert par Eric Duloquin, ajoute Me Cordier-Dumetz. Avant de laisser le tribunal mettre son jugement en délibéré au 4 juillet, elle a proposé d’« observer une minute de silence en mémoire des victimes ». « Hors de propos ! », ont sèchement refusé les avocats des parties civiles pendant que plusieurs proches des défunts quittaient leurs bancs de colère.

http://www.lunion.presse.fr/accueil/explosion-de-witry-les-reims-deux-et-trois-ans-de-sursis-requis-ia0b0n343486

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