dimanche 13 juillet 2014

Condamnée en justice pour avoir critiqué un restaurant sur Internet

1500 euros à titre de provision sur dommages et intérêts et 1000 euros de frais de procédures. C'est la décision qu'a prise le 30 juin dernier le tribunal de grande instance de Bordeaux à l'encontre d'une blogueuse qui avait publié en août 2013 sur son site une critique sévère sur un restaurant.
C'est en mai dernier, alors que la saison touristique démarrait, que la gérante d'un restaurant italien du Cap-Ferret constate une baisse de fréquentation. Un de ses clients lui signale alors que, lorsqu'on tape le nom du restaurant sur Google, un article de blog intitulé «l'endroit à éviter au Cap-Ferret» suivi du nom du restaurant apparaît dans les premiers résultats de recherche. Une blogueuse, dénommée L'Irrégulière, y raconte son expérience malheureuse dans l'établissement notamment avec le service. Les gérants décident, par le biais de leur avocate, d'entamer une procédure judiciaire début juin. «Cette mention ‘l'endroit à éviter', est un jugement péremptoire», explique la partie civile. Il aurait été différent d'écrire ‘l'endroit que je déconseille'. Toute critique est la bienvenue. Maisi ici, on est dans le jugement. Et ce qui posait souci, c'était aussi bien le titre que le réferencement de cet article. C'était une question d'urgence pour le bien-être de l'entreprise».

«Internet n'est pas une zone de non-droit»

Et la justice leur a donné raison. «Le titre est particulièrement apparemment non seulement pour les followers [...] mais aussi pour l'internaute sur Google [...].Ce titre constitue constitue un dénigrement manifeste destiné à faire fuir des clients potentiels avant même toute lecture», a estimé le tribunal de grande instance dans son ordonnance de référé que le Figaro a pu se procurer . «Il porte une atteinte grave à l'image et à la réputation de l'établissement». Contactée par Le Figaro, la blogueuse, qui s'est dite «très étonnée» de cette décision, ne fera pas appel, en partie pour des raisons financières. «La décision se base sur le fait que cet article était en quatrième position dans les résultats de recherche sur Google. Ce n'est pas ma faute! Et par rapport aux avis sur Tripadvisor, je suis dans la même ligne. Mais ce qui m'a déplu, c'est la méthode. Ils ne m'ont même pas demandé de supprimer l'article ou de modifier le titre avant de m'attaquer en référé. J'ai donc été prise de cours. J'ai choisi de ne pas prendre d'avocat pour une raison simple: je n'avais même pas le temps d'en trouver un!». L'article a depuis été supprimé par son auteur.
«Internet n'est pas une zone de non-droit», explique l'avocate du restaurant. «Quand on voit certains avis sur Internet, ils dépassent la limite du raisonnable». Le phénomène des critiques d‘établissements sur Internet fait grincer les dents des restaurateurs. «Que quelqu'un puisse ainsi faire la pluie et le beau temps sur votre chiffre d'affaires, c'est dérangeant», explique à la Nouvelle République David Seguin, restaurateur à Niort. «Ça peut aussi blesser des personnes… Et puis ce n'est pas parce qu'on sait faire un gâteau au yaourt qu'on s'improvise guide gastronomique. C'est un métier!». Fin mai dernier, le chef étoilé Pascal Favre d'Anne a même lancé une pétition nationale afin d'alerter le ministère du Commerce sur ce problème. A ce jour, la pétition rassemble plus de 1400 signatures, dont des grands noms de la gastronomie française comme les frères Pourcel. De même, à Nice, les restaurateurs mènent une véritable fronde contre les critiques déposées sur des sites internet spécialisés. Agaçés, ils réclament le droit de pouvoir supprimer le profil de leur établissement. Or, à l'heure actuelle, impossible de satisfaire leur requête.

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