jeudi 26 mars 2015

Pont-à-Mousson : le patron du commissariat jugé pour harcélement moral

Un quart d’heure qui dure depuis trois heures et demie. C’est en effet le temps que le commandant du commissariat de Pont-à-Mousson a dû rester, ce mardi, à la barre du tribunal correctionnel d’Épinal.
Le président Haquet l’a cuisiné patiemment et méticuleusement tandis que le procureur Manteaux s’est chargé de lui balancer quelques uppercuts verbaux : « Presque tous les policiers entendus dans cette procédure font de vous un portrait catastrophique. Ils vous décrivent comme lunatique et colérique ».
Face à cette transposition judiciaire de la technique du bon et du méchant flic, le commandant Florentin, 60 ans dont près de 40 dans la police, est resté debout, bien droit dans son costume. Il encaisse et nie tout. Mains sur les reins en fin de parcours, l’ancien enquêteur de la Crim’ de Nancy sort quand même un peu essoré de l’interrogatoire.

« Brimades »

C’est une épreuve pour un autre flic : une jeune brigadier qui est par moments au bord des larmes. Elle accuse le commandant de l’avoir harcelée moralement entre 2008 et 2011, durant les trois ans qu’elle a passés au commissariat de Pont-à-Mousson.
Elle était pourtant arrivée « précédée d’une bonne réputation », rappelle le président Haquet. Et au départ, ce n’est d’ailleurs pas avec le commandant Florentin qu’elle a eu un problème relationnel mais avec une de ses collègues. L’ambiance au sein du service s’est dégradée. C’est remonté régulièrement aux oreilles du patron du commissariat qui aurait fini par prendre en grippe la brigadier.

Cela se serait traduit par « différentes brimades », selon l’avocate de la jeune femme, Me  Juliette Grosset : congés refusés, remarques blessantes, propos sexistes ou missions peu intéressantes. Sans oublier un surprenant flicage durant un arrêt maladie. Le commandant est allé jusqu’à escalader le portail de la brigadier pour vérifier qu’elle était bien chez elle. « Cela fait partie des prérogatives d’un chef de service », assure l’officier de police. Mais ce n’est pas le comportement le plus grave qui lui est reproché.
Le 22 octobre 2010, il aurait obligé la brigadier à bidonner un procès-verbal pour couvrir des bourdes de procédure et faire tenir l’interpellation dans des conditions illégales d’un conducteur pris avec du cannabis.

« Couvert au-delà de l’imaginable »

« C’est faux ! Je ne suis pas un tricheur ! » proteste le commandant. « Comment, alors, expliquez-vous l’existence de ce procès-verbal contraire à la réalité ? » attaque le procureur, PV en main. « Ce n’est pas moi qui l’ai obligé à le signer », se défend le policier. « Je suis persuadé du contraire ! », rétorque le procureur qui estime que le commandant de Pont-à-Mousson a été « couvert au-delà de l’imaginable » par la hiérarchie policière.
L’intéressé a, lui, l’impression d’avoir tout perdu dans cette histoire : « Ma vie professionnelle est terminée et je suis détruit psychologiquement ». Il est toutefois toujours à son poste à Pont-à-Mousson. Ce n’est pas le cas de la brigadier. Après l’affaire du faux PV, elle a été exclue de l’unité d’investigation où elle travaillait et mutée de force à la brigade de nuit. Elle est actuellement en disponibilité et envisage de quitter la police. « Il faut lui restituer son honneur », réclame le procureur qui requiert aussi 3 mois de prison avec sursis contre le commandant de Pont-à-Mousson.
L’avocat de la défense plaide, lui, la relaxe : « Pourquoi mon client aurait harcelé la victime ? Je ne le comprends toujours pas. Mais il est forcément coupable », ironise Me  Philippe Guerney du barreau des Hauts-de-Seine qui dénonce « un dossier bâclé » et une « enquête mal faite » par la police des polices. Jugement le 5 mai.

http://www.estrepublicain.fr/edition-de-pont-a-mousson/2015/03/25/pont-a-mousson-le-patron-du-commissariat-juge-pour-harcelement-moral

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