vendredi 29 mai 2015

Accusé du meurtre de sa femme, Ludovic Chabé joue son destin en appel

Un homme libre et terrorisé va prendre place dans le box des accusés du palais de justice de Beauvais, vendredi 29 mai.
Libre, car il n’a purgé qu’un mois et demi de détention après sa condamnation par la cour d’assises de la Somme en juin 2013 (après dix mois de détention provisoire subis en 2005) ; terrorisé, car malgré ses dénégations, il avait été condamné à 12 ans de réclusion pour le meurtre de sa femme Françoise.
Chabé a une grosse tête de paysan buté. Ce natif du Pas-de-Calais rural est un taiseux, ce qui ne l’a pas toujours servi, ni pendant l’instruction, ni durant le procès.
Engagé dans les pompiers de Paris, « il est hyper-respectueux de l’autorité, y compris judiciaire », analyse son avocat Me Philippe Valent, qui estime que ce respect ne l’a pas toujours servi. Quand il eût fallu crier son innocence, Chabé a eu tendance à chuchoter…
Sa thèse, c’est qu’il a trouvé sa femme inconsciente, face sur le sol de leur pavillon d’Humbercourt, un village du canton de Doullens, alors qu’il rentrait d’une garde de 48 heures en région parisienne, peu après 10 heures, le vendredi 25 février 2005.
Il aurait soulevé puis reposé le corps et appelé les secours, totalement étranger à ce qui se révélera être un homicide : Françoise est morte étranglée par son propre foulard.

L’ADN joue contre lui

Ludovic Chabé, sauveteur émérite, ne prend pas la peine de dénouer le foulard, un geste pourtant basique. Cette abstention pèsera lourd lors du premier procès. « J’ai cru qu’elle était morte depuis longtemps », expliquera-t-il.
Sur le foulard, on ne trouve que trois ADN : celui de la victime, d’un secouriste local (qui l’a dénoué) et de Ludovic. Cette constatation l’accable, tout comme le fait que, de son propre aveu, il a déverrouillé la porte ce matin-là. Comment imaginer qu’un rôdeur criminel aurait pris la peine de refermer l’huis après son crime ?
Sur le mobile, le procès de 2013, bien plus qu’une instruction catastrophique, a démontré que le couple modèle n’allait pas si bien en 2005. Ludovic fréquentait des sites de rencontres et Françoise, la douce, l’effacée, avait pris un amant sur son lieu de travail, un grossiste en produits agricoles de Beaumetz-les-Loges (Pas-de-Calais).
Ah, l’amant ! Ce type pas très sympathique, menteur, fuyant, aurait fait un coupable idéal aux yeux de la défense, évidemment, mais aussi du parquet.
C’est presque à regret que la talentueuse Anne-Laure Sandretto l’a abandonné à sa mauvaise conscience après un interrogatoire serré, il y a deux ans.
L’autre point en faveur de l’accusé, c’est une enquête ni faite ni à faire, lors de laquelle on laisse laver à la javel la scène de crime, on égare un mégot de cigarette retrouvé à côté du cadavre, on altère les traces de sperme retrouvées sur la victime. Le reste fut à l’avenant, faisant dire au président Grévin, à propos de son confrère juge d’instruction : « Fort heureusement pour l’institution judiciaire, il est maintenant en retraite ».
http://www.courrier-picard.fr/region/accuse-du-meurtre-de-sa-femme-ludovic-chabe-joue-son-ia0b0n576376

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