lundi 21 mars 2016

Cour d'assises de Meurthe-et-Moselle : Sylvie Leclerc et la petite voix

. « Cow-Boy », c’était son surnom, est mort à 58 ans le 15 mai 2012. Il était 21 h 30, Gérard Schahan, ripeur de profession, dormait sur le canapé quand sa compagne, Sylvie Leclerc, 49 ans, avec laquelle il vivait depuis 34 ans et avait eu une fille, s’est approchée, carabine en main, et lui a mis une balle dans le cœur.
La femme a reposé l’arme dans la cuisine, debout, entre le mur et le vaisselier, puis est descendue chez la voisine du dessous, au deuxième étage de cet immeuble du quartier de la Californie, à Jarville. « Il me harcelait ! Il me harcelait ! Comme ça, je serai tranquille ! ».
Prévu sur quatre jours, le procès de Sylvie Leclerc s’ouvre ce lundi à Nancy devant la cour d’assises de Meurthe-et-Moselle, présidée par Catherine Hologne, et les violences conjugales seront, à n’en pas douter, au cœur du débat.
Lors de sa garde à vue et durant l’instruction, la Jarvilloise, défendue cette semaine par Mes  Janine Bonaggiunta et Nathalie Tomasini, a en effet assuré qu’elle était victime d’insultes, de brimades, d’humiliations quotidiennes depuis de très nombreuses années.

« Vas-y, tire ! Tu seras tranquille ! »

Cette femme, qui vivait coupée du monde, recluse, a-t-elle été également victime de violences physiques ? Elle l’affirme, sans que ces dernières soient toutefois régulières. Toujours est-il que le jour des faits, du propre aveu de Sylvie Leclerc, il n’y a pas eu le moindre coup et que, dans ce cas, la légitime défense, souvent appelée à la rescousse mais qui nécessite une concomitance entre l’acte criminel et l’agression mais aussi une proportionnalité de la riposte, ne pourra être invoquée.
La cour se penchera donc plus sûrement sur cette petite voix qui, apparemment, comme une ritournelle, est venue conseiller à Sylvie Leclerc de tuer Gérard Schahan.
La présumée meurtrière affirme en effet que huit jours avant les faits, elle aurait entendu une voix. « Qui me dit qu’il faut que je le tue pour être tranquille, libre ». Deux ou trois jours avant, encore cet avertissement : « C’est toi qui va mourir ou c’est lui pour avoir la paix ».
Et le soir des faits, cette énième recommandation, alors que Sylvie Leclerc, qui vient de griller une cigarette dans la salle de bains, regarde son mari dormir profondément sur le canapé : « Qu’est-ce que tu attends ? Vas-y, tire ! Tu seras tranquille ! ».
Les méninges de l’accusée ont bien évidemment été passés au tamis des psychiatres, qui ont décelé un « syndrome dépressif ». L’un d’eux écrit : « Le passage à l’acte est un raptus de révolte contre les causes, réelles ou supposées par l’intéressée, de cette dépression ». Un autre praticien : « A bas bruit et sans qu’elle en ait complètement conscience, mais aussi parce que sa personnalité est fragile et manque de consistance, Sylvie Leclerc s’est progressivement enlisée et enfermée dans une position et un statut de prisonnière en quelque sorte, développant ce qu’il est convenu de qualifier de syndrome de l’otage dont elle ne pouvait s’extraire que dans la violence auto-agressive ou hétéro-agressive ».
Au final, les deux experts psychiatres sont formels, ils ont mis en exergue une « altération du discernement », ce qui en jargon judiciaire, signifie que la cour d’assises, si elle retient ce trouble, devra en tenir compte au moment de déterminer la peine.
Détenue depuis ce 15 mai 2012, Sylvie Leclerc encourt la réclusion criminelle à perpétuité. Mes Rui Pereira, Stéphane Massé et Philippe Lyon défendront les intérêts des parties civiles, le siège du ministère public sera occupé par Marie-Claude Weiss

http://www.estrepublicain.fr/edition-de-nancy-ville/2016/03/21/sylvie-leclerc-et-la-petite-voix

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