Trois jours plus tard, les gendarmes, alertés par une amie inquiète de ne pas avoir de nouvelles, découvrent le corps du quinquagénaire dans un appartement dévasté. Les investigations de la police scientifique mettent en évidence une lutte en plusieurs étapes, qui débute dans la cuisine, passe par la chambre et s’achève dans la salle à manger, où Serge Pheulpin, 49 ans, gît sur le côté, contre son canapé. Les coups portés ne justifient pas sa mort mais ils y contribuent. L’homme, fortement alcoolisé, est décédé d’étouffement après un reflux gastrique.
« C’était presque écrit qu’il allait faire une grosse connerie »
Alcoolique notoire, pouvant se révéler violent lorsqu’elle est ivre, la victime a-t-elle été passée à tabac par les « manouches » qui le recherchaient, « en colère », comme le suggère Sylviane Chevalier, sa compagne du moment ? La piste débouche sur une impasse et les gendarmes en viennent rapidement à s’intéresser à celle qui la leur a indiquée et son entourage. Le soir présumé de la mort de Serge Pheulpin, la carte Sim de ce dernier a en effet été utilisée avec le portable de la femme qui ne s’en explique pas.Puis le signalement d’un policier municipal trouvant étrange le comportement d’un jeune Breton, présent depuis quelques mois à peine sur le secteur, va leur apporter la clef de l’énigme. Convoqué, Valentin Rudent se met à table et implique Franck Lachat, qui n’est autre que le fils de Sylviane Chevalier, qui vivait une liaison orageuse avec la victime. Les deux copains auraient raconté la bagarre à cette dernière dès le soir même, ainsi qu’à Mélanie Stuber, qui hébergeait Valentin depuis août et les a fait se rencontrer. Les deux femmes comparaissent pour non assistance à personne en danger.
L’interrogatoire de personnalité auquel le soumet le président Yves Plantier, révèle chez Valentin Rudent une enfance marquée par l’abandon de sa mère, alcoolique, et un caractère « impulsif », selon lui, mais explosif aux dires de ses anciennes compagnes qui décrivent un garçon « dépendant du cannabis », « violent », « manipulateur », « menteur »… « C’était presque écrit qu’il allait faire une grosse connerie », lâche l’une d’elles aux enquêteurs. « J’arrive toujours pas à comprendre comment j’en suis arrivé là », soupire de son côté l’accusé qui récuse les violences qu’on lui impute et que le président Plantier prend en défaut : « Votre impulsivité vous fait perdre le contrôle mais jamais envers les autres ? » « Je m’en souviens pas », répond-il.
Même sentiment d’abandon
Si Valentin Rudent est « un bouffon », « un suiveur » de l’avis de sa propre sœur qui ne le fréquente plus, Franck Lachat ne donne pas non plus l’impression d’un meneur. Ce môme malmené par le décès accidentel de son frère aîné quand il a 5 ans puis le départ de son père l’année suivante et enfin son placement, ne rêve à 14 ans que de « travailler et fonder un foyer ». Il sera père à l’aube de ses 18 ans, avec une compagne de 16 ans. Si, au foyer, mis à part des fugues, il présente un visage serein, un rapport lui attribue une tout autre personnalité de « retour à la maison ». Celle d’un mauvais garçon, violent, acoquiné à des voyous plus âgés, participant à des sales coups. « Il était le seul dans la norme dans sa famille, veut-il être reconnu par elle ? », conclut l’auteur.Les deux hommes éprouvent, selon les psychologues, le même sentiment d’abandon. L’écho des violences subies par la mère de Franck a-t-elle trouvé « un écho » chez Valentin ? Celui-ci a expliqué, à la faveur de l’expertise, avoir mené, à l’âge de 17 ans, une expédition punitive contre le compagnon de sa mère, alcoolique, qui la battait.
Ce jeudi, après avoir exploré la personnalité des accusés, la cour d’assises va se pencher sur les faits en eux-mêmes.
http://www.estrepublicain.fr/edition-de-vesoul-haute-saone/2016/04/28/passage-a-tabac-mortel-a-lure-deux-accuses-devant-les-juges
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