samedi 7 mai 2016

Gironde : le baptême de l’air se termine en crash

Le pilote d’un avion de tourisme et le gérant de l’atelier de maintenance ont comparu devant le tribunal correctionnel.
Il fait beau et très chaud le 3 juillet 2010 quand un couple et leur enfant de 14 ans ont rendez-vous, ce dimanche, dans l'après-midi, à l'aérodrome de Saucats. La famille se fait une joie de monter pour la première fois à bord d'un petit avion de tourisme de type Robin. Au programme du baptême de l'air d'une heure maximum, il y a le survol du Bassin d'Arcachon. La virée est alléchante. Mais ce qui était un rêve va se transformer en cauchemar.
Il est environ 17 h 30 quand le pilote s'aligne en bout de piste pour prendre son envol. L'avion s'élance, décolle au-dessus des arbres puis, soudain, décroche à basse altitude pour atterrir en catastrophe dans une clairière où des pins viennent d'être coupés. Bilan : quatre blessés dont le pilote, très grièvement atteint.

« Cet avion était vicié »

Hier, le pilote, un septuagénaire qui affiche plus de 3 000 heures de vol au compteur, et le gérant de l'atelier local de maintenance de l'aérodrome de Saucats, se sont retrouvés à la barre du tribunal correctionnel de Bordeaux pour répondre de blessures involontaires.
Car l'accident qui aurait pu avoir des conséquences tragiques n'est pas dû au hasard. « Il y a une conjugaison de deux types de négligences », selon le ministère public.
Les investigations menées par la gendarmerie de l'air lors de l'information judiciaire qui aura duré six ans, ont permis de déterminer qu'il y avait eu une inversion dans le montage d'un filtre à air au moment de la révision de l'appareil confiée à un jeune apprenti lors des opérations de maintenance. Cette erreur a provoqué une baisse de puissance de l'avion, le moteur n'ayant pu atteindre le nombre de tours suffisants pour assurer un décollage normal.
« Cet avion était vicié, j'ai senti tout de suite qu'il manquait de puissance », se défend le pilote face aux questions embarrassantes du président du tribunal, Alain Reynal. « Avant le décollage, tout était normal. Je n'ai commis aucune faute. Des pilotes instructeurs avaient pris cet appareil avant moi et si un problème avait été décelable au sol, ils l'auraient vu. Or, ces difficultés ont surgi après, quand l'avion a décollé. Quand j'ai vu qu'il perdait des tours, j'ai essayé de trouver un endroit propice à l'atterrissage. Il s'est passé entre 3 et 4 secondes et ce geste a permis de sauver la vie des passagers et la mienne. »

« S'il contrôle, il s'arrête »

Les passagers aujourd'hui encore traumatisés par l'accident se souviennent que le pilote les avait embarqués à titre gracieux et s'était montré très pédagogue. « Il nous a pris en charge et fait visiter les installations, il y avait de l'adrénaline », raconte le couple et le fils, unis sur le banc de la partie civile. Mais au cours des explications fournies par le pilote, les passagers se rappellent aussi très bien être passés devant un tableau dans la salle de l'aéro-club. Et ce tableau d'information a toute son importance car les pilotes y notent les observations à la suite d'un vol. Ce 3 juillet, il y avait écrit : « Montée initiale 2 300 tours, vario un peu faible, en palier 2 450 tours ok », assorti d'un triangle signalant une alerte. « Vous n'avez pas pris soin de le regarder », observe Me Olivier Couleau, conseil des trois passagers. « S'il contrôle, il s'arrête. Si cet avion est tombé, c'est qu'il y a des responsables. »
Le gérant de l'atelier ne se dérobe pas face à ses responsabilités et explique que le matin des faits, un des instructeurs ayant pris le manche lui avait indiqué que « l'avion était mou au décollage », mais que tous les paramètres de vol étaient normaux. « Il pensait avoir un avion sain », justifie Me Céline Le Drogo, pour la défense du pilote, également victime dans le dossier, qui plaide la relaxe. Comme Me Paul-André Vigne, pour le gérant de l'atelier contre lequel le parquet a requis 6 mois de prison avec sursis et une amende de 1 000 euros. Le pilote, poursuivi pour des blessures ayant entraîné une incapacité totale de travail inférieure ou égale à 3 mois, encourt la même amende. Le jugement a été mis en délibéré.
http://www.sudouest.fr/2016/05/07/le-bapteme-de-l-air-se-termine-en-crash-2354110-2733.php

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