dimanche 19 juin 2016

Vitesse, alcool, drogue et mort

Le jeune homme de 28 ans qui s'avance à la barre n'a pas l'air très sûr de lui, c'est le moins qu'on puisse dire. Face à lui, sur le banc des parties civiles, un couple de sexagénaires, le visage fermé. Dans la salle, deux jeunes femmes, se ressemblant étonnamment, pleurent doucement. L'ambiance est plombée et pour cause.
Le 5 septembre dernier, il est 16 heures sur la route 921 qui descend de Luz. À hauteur du paravalanche, les automobilistes qui circulent vers Luz voient descendre et foncer droit sur eux une Peugeot 306.
Le conducteur tente une manœuvre désespérée : la voiture s'écrase brutalement contre l'un des piliers de l'ouvrage, fait un bond de plus de 2 mètres sous l'impact et retombe lourdement. Le conducteur Jean-Christophe Martin est grièvement blessé, ainsi que le chien patou à l'arrière, qui va mourir euthanasié. Plus grave, la compagne de Jean-Christophe, Soizic Cahuzac, est dans un état désespéré. La malheureuse jeune femme décédera quelques heures plus tard à l'hôpital Purpan, laissant une famille anéantie et un petit orphelin de 12 ans. Évidemment, comme toujours en pareil cas, une enquête est aussitôt ouverte.
Et les résultats sont sans appel : la veille, Jean-Christophe avait fait la fête avec des amis, et son taux d'alcoolémie, à 16 heures le lendemain, était encore très élevé : 1,28 g. En outre, il avait fumé : 1 µgr de THC, la substance active du cannabis. Ce n'est pas tout : la voiture était en très mauvais état, avec un pare-brise fissuré en plusieurs endroits, les quatre pneus complètement lisses, aucun contrôle technique : «Ça ne serait pas passé», soupire le prévenu à la barre.
Et pour finir, la voiture roulait beaucoup trop vite : le compteur de vitesse s'est bloqué sous le choc et indiquait 110 km/h, sur cette toute petite route de montagne. Pour les parties civiles et la procureure, «c'est une accumulation qui rendait l'accident inévitable. Il faut qu'il entende qu'il ne s'agit pas de fatalité. Sa faute est lourde. Si la famille a de la rancœur, c'est parce qu'un accident est déjà injuste. Mais là, avec ces multiples fautes, c'est encore plus injuste.» À la barre, Jean-Christophe Martin se met à pleurer : «Je ne sais pas quoi vous dire. Je suis coupable. J'ai perdu ma copine.»
Les parties civiles vont inévitablement réclamer de forts dommages et intérêts, mais pas seulement : «Il faut qu'il entende la souffrance des victimes. Il faut qu'il entende leur colère. Elles ne réclament pas vengeance, mais justice, si c'est possible en pareil cas.» «Jean-Christophe va vivre la pire des sanctions jusqu'à la fin de ses jours, avec la responsabilité et la culpabilité de cet accident» dira Me Fournier, pour la défense. Mais le tribunal, «vu l'extrême gravité des faits», ne va pas l'entendre de cette oreille : 24 mois de prison, dont 20 mois avec sursis, mise à l'épreuve ; pas d'aménagement de la peine ferme ; obligation de soins et de travail ; annulation du permis de conduire, et enfin obligation de payer des dommages et intérêts aux parties civiles, soit en tout 95 700 €, frais d‘avocats compris.
http://www.ladepeche.fr/communes/tarbes,65440.html

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