UNE soixantaine de pages pour résumer dix-neuf tomes de pièces judiciaires. Cette semaine, l’ensemble des avocats (ils sont dix-neuf….) du dossier de l’assassinat de Xavier Flactif, Graziella Ortolano et leurs trois enfants (Sarah, dix ans, Laetitia, neuf ans, et Grégory, sept ans) ont pris connaissance de l’ordonnance de mise en accusation des cinq suspects.
David Hotyat (détenu), 33 ans, est poursuivi pour le quintuple assassinat de la famille; son ex-compagne, Alexandra Lefevre (sous contrôle judiciaire), 27 ans, sera jugée pour non-dénonciation de crime, obstacle à la manifestation de la vérité, non-empêchement d’un crime et participation à une association de malfaiteurs. Michaël Hotyat (sous contrôle judiciaire), frère de David habitant Biache-Saint-Vaast (près d’Arras), est mis en examen pour obstacle à la manifestation de la vérité.
Stéphane Haremza (détenu), 30 ans, sera jugé pour obstacle à la manifestation de la vérité par modification de l’état des lieux d’un crime, complicité et participation à une association de malfaiteurs. Enfin son épouse, Isabelle Haremza (sous contrôle judiciaire), 30 ans, habitant Douai, est mise en examen pour non-dénonciation de crime, obstacle à la manifestation de la vérité et participation à une association de malfaiteurs.
Des réponses?
Depuis la mystérieuse disparition de la famille en avril2003, puis la découverte de restes humains calcinés dans un bois en septembre 2003, les proches de cette famille originaire du Pas-de-Calais assassinée au Grand-Bornand attendent la vérité de ce procès prévu pour durer deux, trois semaines. Ils espèrent des réponses sur les terribles dernières minutes de vie de leurs proches.
Principal suspect de cette tuerie: David Hotyat. Sportif, mécanicien passionné d’automobile, décrit par son entourage comme «sûr de lui, coléreux parfois, imprévisible, pouvant s’emporter très facilement» (parfois même contre les gendarmes ou contre un codétenu), il arrive en Haute-Savoie avec sa compagne Alexandra Lefevre en 2001. C’est en cherchant un logement qu’ils rencontrent Xavier Flactif. Le «promoteur immobilier» originaire lui aussi du Pas-de-Calais est installé au Grand-Bornand où il monte des opérations immobilières par le biais de SCI enregistrées au nom de sa compagne, Graziella.
Le couple a déjà tenté des opérations immobilières au milieu des années 90 qui se sont révélées infructueuses et ont laissé des clients mécontents. Le couple habitait alors Mondicourt (près de Doullens). Sa maison a été vendue au printemps dernier.
Toutefois, dans cette vallée du Grand-Bornand, Xavier Flactif, décrit comme «généreux, bavard, fêtard… parfois sans scrupules », mène ses affaires «de façon un peu brouillonne» certes, mais les chalets destinés à la location saisonnière n’ont rien à voir avec les piètres habitations du Pas-de-Calais. Pas de vice de construction mais des fournisseurs, des artisans devant parfois réclamer avec rudesse leur argent auprès de Xavier Flactif (une violente bagarre en 2002 l’avait opposé à deux peintres qui lui avaient plongé la tête dans le four de sa cuisine pour l’intimider et récupérer leur dû). Peu à peu, au fil des promesses de logement, des déménagements multiples entre décembre2001 et le courant 2002, le couple Hotyat-Lefevre développe une profonde haine envers Xavier Flactif. Un ressentiment attisé lors des soirées passées avec un couple d’amis nordistes : Isabelle et Stéphane Haremza. Janvier2003: le quatuor regarde un documentaire sur l’affaire Stranieri (un couple de restaurateurs assassinés dont le meurtrier avait pris la place….). Au fil des discussions, décision aurait été prise d’éliminer la famille Flactif. Objectif: s’approprier le Cortinaire, un superbe chalet appartenant à Xavier Flactif.
Incohérences
Dans les jours suivant le 11avril 2003, date de la disparition de toute la famille, les soupçons se portent sur David Hotyat, placé alors sur écoute téléphonique. Interpellé en septembre2003, David Hotyat livre des aveux pendant près de huitheures. Des aveux partiellement incompatibles avec les constatations et les expertises scientifiques. Après analyse des traces de sang retrouvées dans le chalet, l’expert met en évidence l’utilisation d’une arme contondante et «aucune des traces découvertes ne correspond à l’emploi d’une arme à feu». Une déclaration qui contredit les aveux d’Hotyat affirmant avoir tué toute la famille avec un revolver (ensuite expédié à son frère Michaël).
Les experts en crémation ont estimé que la thèse du bûcher improvisé pour faire disparaître les cinq corps au cours de la nuit ne «résiste pas à l’épreuve des expérimentations». Là encore, le récit de David Hotyat est incompatible avec les expertises. Le procès est prévu en juin prochain, un peu plus de trois ans après la tuerie du Grand-Bornand.
V.C.
La Voix du Nord
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