La vérité de l'affaire Grégory ne se cache pas derrière un timbre ou dans les micro-traces de sueur laissées sur les lettres de revendication du crime. C'est ce que confirme mercredi le procureur général de Dijon Jean-Marie Beney après avoir reçu "l'essentiel des expertises" menées depuis plusieurs mois par les experts du laboratoire lyonnais Biomnis. Ces derniers ont notamment comparé les ADN prélevés sur les courriers et cordelettes du corbeau avec ceux des 150 protagonistes de l'affaire. Sans succès. Les profils génétiques identifiés ne figurent pas non plus parmi les profils génétiques enregistrés au Fnaeg (Fichier national des empreintes génétiques). En clair, "les analyses ne permettent pas d'établir la présence du profil de Bernard Laroche ni d'aucun des proches des parents Villemin sur les traces analysées", indique le procureur général au point.fr.
De "très beaux profils masculin et féminin" avaient pourtant été mis en évidence sur la lettre du 24 juillet 1985 adressée à Albert Villemin, grand-père de Grégory, neuf mois après la découverte du corps du garçonnet. Des doutes planaient en revanche sur l'éloquence des cordelettes ayant servi à ligoter l'enfant, ces dernières "ne permettant pas de déduire de profil, mais pouvant servir, le cas échéant, à effectuer des comparaisons et des exclusions", avait souligné Jean-Marie Beney.
Sur la piste des enregistrements du corbeau
L'espoir n'est pas pour autant brisé. L'enquête scientifique devrait en effet se poursuivre sur les autres pièces à conviction et en premier lieu sur le foulage "L B" (empreinte laissée par un écrit sur une feuille placée en dessous) au bas de la lettre de revendication du crime datée du 16 octobre. "Encore faut-il que cette pièce n'ait pas été abîmée par les poudres utilisées à l'époque", prévient le procureur général.
L'analyse des voix du corbeau sur les cassettes d'enregistrement pourrait aussi se révéler décevante. "Les enregistrements de l'époque ont été faits dans des conditions aléatoires, alors que pour comparer, il faut des enregistrements longs et de bonne qualité. Les techniques actuelles fonctionnent mal sur des supports anciens", explique le magistrat. En outre, souligne l'arrêt de la chambre d'accusation innocentant Christine Villemin, "le seul appel qui est manifestement l'oeuvre de l'assassin ou d'un complice est celui qu'aurait reçu Michel Villemin le 16 octobre 1984 vers 17 h 30, mais il n'a pas été enregistré". En tout état de cause, une première étude de faisabilité sera diligentée à la demande du président de la chambre de l'instruction.
Nouveaux prélèvements d'ADN
Restera l'ultime joker, au risque de détruire les scellés : "On peut faire plus et mieux en employant des techniques plus agressives", assure l'avocat des Villemin, Me Moser. Tel est en tout cas l'avis du directeur de l'institut de police scientifique de Lausanne Pierre Margot, interrogé par l'avocat sur les travaux réalisés par le laboratoire Biomnis. "Il existe effectivement des techniques plus élaborées qui permettent de prélever l'ADN cellule par cellule sur un objet, c'est ce qu'on appelle l'abrasion laser, explique au point.fr Marie-Hélène Cherpin, directrice du laboratoire Biomnis. Cette technique permet de récupérer les cellules avec un laser qui les découpe. Elle comporte toutefois un risque : lorsque les objets ne sont pas propres, on ne sait pas ce que l'on prélève. C'est la raison pour laquelle elle est réservée à des cas particuliers où les cellules sont très protégées sur des zones bien précises d'un scellé à analyser."
Une fois l'ADN identifié, comment ensuite s'assurer que le corbeau est bien le coupable et pas un complice ? "On ne va pas refaire le film de l'affaire Grégory, sauf si l'expertise nous donne un nom, et dans ce cas, nous procéderons à des interrogatoires", nous indique Jean-Marie Beney. En attendant l'épilogue, les parents de Grégory restent "sereins et lucides, ils estiment que ce combat doit être mené", affirme leur avocat Thierry Moser.
Le Point
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