mardi 8 juin 2010

Affaire du gang des barbares

Pour l'enlèvement et le meurtre d'Ilan Halimi, le chef du gang des Barbares, Youssouf Fofana, a été condamné à la réclusion à perpétuité, assortie d'une peine de sûreté de 22 ans. Il a accueilli le verdict en applaudissant. Récit.

Vingt heures, devant le palais de justice de Paris, une rangée de cars de CRS annonce la couleur. Depuis mercredi, les jurés de la cour d'assises de Paris se sont retirés dans le secret le plus absolu pour décider du sort du chef du "gang des Barbares", Youssouf Fofana. L'homme est jugé pour l'enlèvement, la séquestration et l'assassinat d'Ilan Halimi en janvier 2006.

Devant la salle d'audience, une meute de journalistes attend avec impatience que le verdict tombe. C'est l'aboutissement d'une affaire au long cours. Un procès hors norme à la hauteur de la personnalité atypique du principal accusé: un Youssouf Fofana froid, qui n'a montré aucun signe de regret, ni même de compassion à l'égard de la famille de la victime.

Pire, cet "enfant des cités" comme il se définit a multiplié les provocations tout au long du procès, abusant des diatribes antisémites et révocant ses avocats, un à un.

Ce vendredi soir, face aux jurés, il est égal à lui-même. Vêtu d'une chemise bariolée, il apparait souriant, il n'a pas l'air stressé. Il discute même avec ses anciens complices dans le box des accusés.

A l'entrée du président de la cour, le silence se fait pesant. Dans la salle où sont amassés les journalistes, les discussions cessent. Il est 22h15. Commence la lecture des délibérés pour Fofana et ses coaccusés. Le président égrène les réponses aux quelque 150 questions sur lesquelles les jurés ont dû se prononcer.

Dans le box des accusés régne une curieuse apathie, voire de l'indifférence. Une impression qui laisse soudain place à une réaction inattendue de Youssouf Fofana. Il esquisse un sourire et s'applaudit en entendant son jugement: perpétuité avec 22 ans de sûreté, conformément aux réquisitions de l'avocat général.

Le chef du gang ne semble pas surpris. Il a désormais 10 jours pour faire appel.

A la sortie de la salle, l'avocat des parties civiles s'exprime devant un ballet de micros et de caméras. Pour lui, le verdict est un succès en demi-teinte. Il se dit soulagé que Fofana ait eu "la peine la plus forte" mais il regrette le procès à huis-clos: "Je souhaite que ce genre de procès ne se reproduise plus car c'est le silence qui a tué Ilan Halimi. L'intérêt des mineurs l'a emporté sur l'intérêt général."

Plus loin dans le hall, deux proches d'Ilan Halimi crient leur incompréhension devant le verdict. "La fille qui a joué l'appât n'a eu que 9 ans, c'est la perpétuité qu'elle aurait dû avoir".


Appel?

Youssouf Fofana, condamné en juillet à la peine maximale pour la séquestration et l'assassinat en janvier 2006 d’Ilan Halimi, a renoncé à faire appel.

Sa condamnation à la réclusion criminelle à perpétuité, assortie d’une période de sûreté de 22 ans, est désormais définitive. Ce désistement, pour l'heure inexpliqué, sera constaté par la cour d’assises de Paris, au cours d’une audience de pure forme le 15 février.

Conséquence en pratique: le second procès qui doit se tenir du 25 octobre au 17 décembre à Créteil se déroulera sans lui. Il est toutefois vraisemblable que Youssouf Fofana soit cité comme témoin. Pourraient demander son audition le parquet général, le président de la cour, les avocats de la défense ou encore ceux de la partie civile.

Qui sera rejugé?

Seront notamment rejugés les deux complices jugés les plus actifs dans le rapt et la séquestration d'Ilan - condamnés à 15 et 18 ans, là où l'accusation avait réclamé 20 ans de réclusion contre chacun - ainsi que la jeune fille ayant servi d'appât pour attirer le jeune juif dans le piège, condamnée à 9 ans contre 10 à 12 requis.

Sur ses 26 co-accusés - dont deux étaient mineurs au moment des faits, ce qui a justifié le huis clos - deux ont été acquittés et 24 condamnés à des peines allant de 6 mois avec sursis à 18 ans de réclusion.

Aussitôt après le procès cet été, les organisations juives dénonçaient «l’indulgence» de la cour d’assises des mineurs de Paris à l’égard des membres du «gang des barbares», regrettant les peines prononcées à l’encontre des complices de Fofana.

La garde des sceaux, Michèle Alliot-Marie, avait ordonné au parquet de faire appel contre 14 des 27 accusés de l’enlèvement, de la séquestration et du meurtre du jeune Juif Ilan Halimi en 2006. Youssouf Fofana s'était aussitôt engouffrer dans la brèche, faisant lui aussi appel de sa condamnation.

Le procès sera-t-il public?
Contrairement au procès de première instance, le procès de Créteil pourrait se tenir publiquement. Mercredi, la commission des Lois de l'Assemblée nationale a en effet adopté une proposition de loi visant à alléger la règle du huis clos en cour d'assises des mineurs.

Si le texte suit un processus législatif sans encombre, il pourrait être promulgué à temps pour le procès d'appel.
La nouvelle loi a d'autant plus de chance d'être prête à temps qu'elle a clairement été pensée pour l'affaire Ilan Halimi, par ses auteurs, les députés François Baroin (UMP) et Jack Lang (PS).

Me Francis Szpiner, avocat de la famille Halimi, réclame cette publicité depuis longtemps. Ainsi a-t-il déclaré mercredi aux députés: «C'est le silence qui a tué Ilan Halimi et la justice a prolongé cette conspiration du silence puisque l'opinion publique n'a pas su de quoi il était mort».
http://www.liberation.fr/







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