samedi 26 mars 2011

Nancy: perpétuité pour le père infanticide

Nancy. « J’ai vu Rémy allongé. Je l’ai secoué en criant maman est là ». Les hurlements d’Isabelle déchirent la salle d’assises de Meurthe-et-Moselle. Après un long préambule sur sa vie de couple peu à peu tombée en désérance - « je ne ressentais plus rien pour cet homme » - la mère d’Alexis et Rémy, 14 et 11 ans, abattus dans leur sommeil par leur père, aborde la nuit du 3 octobre 2008. Une nuit de cauchemar survenue au domicile familial à Toul et qui a tout emporté sur son passage. « Un tsunami », dira-t-elle. « J’ai été réveillée par un coup de fusil. Le temps que je parvienne à ouvrir la porte de ma chambre. J’ai entendu une seconde détonation ». Alain Wegerle, 48 ans, écrase une larme. Puis se reprend, pour donner froidement sa version des faits. « Pour moi, tout était rose. On était bien », pose-t-il. Jusqu’à ce qu’il soupçonne sa femme d’une nouvelle infidélité. « Je n’acceptais pas la séparation ».
Le soir du 2 octobre, Isabelle vient lui réaffirmer son intention de divorcer. Il prépare une arme, trois cartouches et écrit une kyrielle de messages. Le premier est adressé à Isabelle. « (...)J’emmène avec moi tes problèmes. Pour toi ce sera plus facile (...). «Je voulais éviter à mes enfants la souffrance d’un divorce », s’arc-boute Alain Wegerle, face à la présidente Marie-Cécile Thouzeau.
« Contempler la souffrance »
Le magistrat veut comprendre pourquoi à plusieurs reprises, devant enquêteurs, magistrats et psys, il a motivé son geste par l’envie de faire souffrir sa femme. « Je ne me souviens pas d’avoir dit ça », rétorque-t-il. Tout comme il le maintient, sa première idée était de se suicider, non pas de tuer ses propres enfants. Pourtant, « Ce n’est pas un hasard si son suicide a raté », tonne l’avocat général Jacques Santarelli. « Ce qu’il voulait, c’était contempler la souffrance de sa femme. La voir captive à jamais. Il a renoncé à l’amour paternel au profit de la haine, animé de la volonté de faire mal ». Il requiert la perpétuité assortie d’une peine de sûreté de 22 ans. « Qu’on ne s’y trompe pas, ce n’est pas le procès de l’amour », pose en préambule Me Hélène Strohmann pour la partie civile. « Il a voulu se venger. Il a élaboré son projet avec soin. Il a choisi l’arme, les cartouches, l’endroit où viser », poursuit le conseil. L’espace de quelques instants, elle redonne vie aux enfants. Fait circuler leurs photos. Rémy, 11 ans, voulait devenir notaire ; Alexis, 14 ans, davantage attiré par la nature, garde forestier. Me Marie Desmet, à la défense, insiste sur l’altération du discernement retenue dans le chef d’accusation. « Il a fait une projection de sa propre souffrance. C’était intenable, insoutenable. Il n’imaginait pas que ses enfants puissent souffrir moins que lui ».
« Je demande pardon à Alexis et Rémy. Aux autres, je ne le demande pas car je ne le mérite pas », lâche l’accusé avant la clôture des débats.
La cour suit partiellement les réquisitions. La peine de sûreté de 22 ans n’est pas prononcée.
http://www.estrepublicain.fr/fr/lorraine/info/4827860-Nancy-perpetuite-pour-le-pere-infanticide

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