Ils sont soupçonnés d'avoir tenu des propos antisémites en février 2008 dans un pub d'Amiens. L'affaire, qui a fait grand bruit, est jugée jusqu'à aujourd'hui devant le tribunal correctionnel.
Cinq prévenus, dont trois policiers de la brigade anticriminalité d'Amiens. Les trois fonctionnaires le savent : leur carrière est en jeu.
Depuis hier, ils comparaissent devant le tribunal correctionnel d'Amiens pour «provocation à la discrimination raciale ». Après leurs avocats, qui ont tenté toute la matinée de soulever des nullités de procédures, c'était à leur tour, l'après-midi, de se démener pour convaincre les juges : ils nient.
La tâche n'est pas aisée. Durant cette soirée du 1er février 2008, dans le pub le Goodness d'Amiens, il y avait beaucoup de monde. De nombreux témoins ont parlé. Ils ont vu ce groupe de cinq personnes faire des saluts nazis, prononcer des «Heil Hitler » en trinquant, des «mort aux Juifs », « il faut rallumer les fours crématoires », ou encore cette phrase : « Je préfère briser ma carrière plutôt que de laisser mon pays colonisé par les bougnoules et les négros. Il faut les tuer, les tuer ».
Les trois policiers, dont l'ancien chef de la BAC de jour, se battent becs et ongles contre ces accusations. Soit ils nient, soit ils ont oublié. Soit encore ils sont victimes de ce qui ressemble à un complot («après la soirée dans le bar, ils se sont tous réunis, se sont concertés, ont échangé... », dit l'un des prévenus). Visiblement, l'un ne veut pas enfoncer l'autre.
Pourtant, face aux enquêteurs de l'inspection générale de la police nationale, connus sous le nom des «bœufs carottes », les langues se sont déliées.
Aujourd'hui, ils se rétractent : ils disent avoir été contraints de faire ces déclarations sous la pression, lors de leur garde à vue. Tout juste un gardien de la paix admettra-t-il, au milieu de la journée : «Un ou deux propos ont peut-être été entendus, c'est tout à fait possible, mais à qui les attribuer ? Dans quelles circonstances ont-ils été tenus ? »
Et puis ce salarié en boucherie, lui, dit bien qu'il trinquait en criant «Sieg Heil », sauf que pour lui, il disait : «zig zag »... sans savoir pourquoi. Et les saluts hitlériens ? « Pour moi, comme il y avait beaucoup de monde, c'était plus des ouh ouh les gars, je suis là ! », dira un gardien de la paix.
Le plus gradé des policiers a contre lui un élément à charge important : deux photos, retrouvées dans ses archives personnelles, où on le voit effectuer, avec d'autres, ce qui ressemble au salut hitlérien. Pour lui, ce n'était pas le cas : «C'était lors d'une soirée arrosée où on chantait "maréchal nous voilà". »
L'alcool, ce soir-là, avait coulé à flots. Les trois policiers se sont retrouvés après leur service, vers 23 h 30, sur le parking du commissariat, en compagnie des deux hommes de la boucherie chez qui ils allaient acheter leurs sandwiches. Ils disent que ce n'était pas habituel, qu'il y avait une naissance à fêter. Deux bouteilles de whisky auraient été bues avant la virée au Goodness où tout a dérapé.
Hier, le patron du pub a maintenu ses déclarations, notamment les pressions exercées en relation avec la profession de ces clients. Il dit avoir été choqué par ce qu'il a vu et entendu ce soir-là sachant qu'ils étaient policiers.
Ce prévenu insiste : «Depuis le début, on veut nous mettre des choses sur le dos, nous faire passer pour des racistes, des policiers horribles. J'ai presque envie de faire une croix sur ma carrière et m'en aller ». Le procès se poursuit aujourd'hui.
http://www.courrier-picard.fr/courrier/Actualites/Info-regionale/Saluts-nazis-les-policiers-nient
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