mercredi 29 juin 2011

Bettencourt : les enregistrements sont-ils légaux ?

Pour mettre fin à une ambiance délétère au tribunal de Nanterre, la cour de Cassation avait décidé de transférer l'intégralité des dossiers Bettencourt à Bordeaux en novembre dernier. Ils ont alors été distribués à plusieurs juges d'instruction. Ces derniers travaillent depuis dans la plus grande discrétion. Et pour éviter de se retrouver en fin d'enquête avec des problèmes de nullité procédurale , ils ont saisi la chambre de l'instruction de la Cour d'appel de points de droit cruciaux.
Ce mardi, la cour d'appel va ainsi devoir se prononcer sur la solidité juridique de la base-même de toute l'affaire : les enregistrements réalisés fin 2009 et début 2010 au domicile de Liliane Bettencourt par son propre majordome, Pascal Bonnefoy. Celui-ci avait confié les bandes à la fille de la milliardaire, Françoise, qui les a à son tour mises dans les mains de la justice car elles étayaient, de son point de vue, l'hypothèse de l'abus de faiblesse qu'aurait exercé sur sa mère l'ami artiste de celle-ci, François-Marie Banier, destinataire de cadeaux pour des centaines de millions d'euros.
Si les enregistrements sont annulés, la procédure tombe
Ces enregistrements de conversations ont cependant révélé aussi des faits possiblement délictueux, concernant par exemple l'ancien ministre du Budget Eric Woerth, ou Madame Bettencourt elle-même. Personne n'a toutefois été encore mis en examen. Lors de l'audience à huis clos, le 6 juin, les avocats de la mère, Mes Pascal Wilhelm et Bertrand Favreau, ont considéré qu'il fallait annuler ces enregistrements, car selon eux, le principe de la liberté de la preuve en matière pénale doit connaître certaines limites comme l'atteinte à l'intimité de la vie privée. Ils ont réclamé aussi l'annulation des gardes à vue. Me Olivier Metzner, pour Françoise Bettencourt-Meyers, a demandé l'annulation de toute la procédure qui a découlé des écoutes, arguant d'une erreur juridique du procureur de Nanterre Philippe Courroye, commise selon lui immédiatement après avoir reçu ces enregistrements.
Pour l'avocat général Pierre Nalbert, il convient, en revanche, de maintenir et les enregistrements et leurs conséquences. Il a été moins affirmatif en ce qui concerne la validité des gardes à vue. Si la chambre de l'instruction valide les enregistrements et le reste de la procédure, les juges d'instruction pourront continuer à travailler normalement. Si elle les annule, tous les dossiers de l'affaire risquent de s'écrouler. La chambre peut aussi annuler la procédure qui a découlé des enregistrements, mais pas les enregistrements eux-mêmes. L'arrêt risque d'être assez complexe. Il sera rendu en tout cas alors que la mère et la fille se déchirent à nouveau, après s'être réconciliées à l'hiver.
Banier "régularisé" mercredi
C'est de cette réconciliation temporaire que le photographe François-Marie Banier devrait recueillir mercredi les fruits. Ce dernier avait renoncé à environ 600 millions d'euros d'assurances-vie, conservant le produit de 300 à 400 millions d'euros de dons de Liliane Bettencourt sous diverses formes, notamment un ensemble immobilier à Paris. Comme le parquet de Bordeaux a annoncé en mars qu'il n'entendait pas reprendre seul les poursuites, le dossier semble juridiquement clos.

Une brève audience "de régularisation" se tiendra mercredi devant la 5e chambre du tribunal pour constater la fin du processus judiciaire le concernant. Les protagonistes seront représentés par leurs avocats. Parmi eux figure Me Wilhelm, visé à son tour depuis peu par Françoise Bettencourt-Meyers, qui le soupçonne de conflit d'intérêts (
lire : La bataille judiciaire reprend entre Bettencourt et sa fille ). Mais il pourrait ne pas être présent mercredi à cette brève audience.

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