mercredi 22 juin 2011

Carpentras : la Cour d'assises plonge dans la tête des enfants terribles

Le deuxième jour du procès de la "tournante du Pous du plan", qui se tient devant la Cour d'assises des mineurs du Vaucluse, a été consacré hier à l'étude de la personnalité des douze accusés. Douze Carpentrassiens qui étaient âgés de 16 à 22 ans en avril 2005, lors des faits. La plupart ont grandi dans la cité populaire du Pous du Plan qui, à l'époque, comme le rappelle un éducateur, connaissait une explosion de délinquance.
Pour autant, ce n'est pas le procès de cette cité qui se joue devant les assises mais bien celui de douze jeunes gens qui sont soupçonnés d'avoir abusé d'une mineure de 14 ans. C'est dans ce contexte particulier de la vie du quartier où l'oisiveté était le lot de nombreux jeunes que Patricia (1) est venue chercher de l'aide auprès d'un ami. Elle sera conduite dans un garage à vélos et une cave où elle sera violée par une trentaine de jeunes.
Puis Badr (1), un "grand frère", est venu la chercher. Avec Abdessamad ils l'ont conduite dans un hôtel du Pontet. Après avoir eu un rapport sexuel avec la jeune fille, Badr va l'offrir à ses amis. Patricia devra aussi se soumettre à une séance photo où elle simule des pauses sexuelles. Autant d'épreuves pour soumettre Patricia et, petit à petit, la conditionner pour qu'elle accepte des relations tarifées. Après 15 jours de cauchemar Patricia va se confier aux policiers.
L'interpellation des "violeurs de la cité" va être un coup de tonnerre à Carpentras. "C'était impensable" explique un éducateur. Pour les familles, pour les habitants de la cité, les mis en cause, tous issus de familles nombreuses, n'ont pu faire "ça". Oui, ils passent la journée à tenir les murs, roulent sans casque et provoquent les policiers. Mais jamais ils ne participeraient à de tels faits. Dans leurs familles il n'est pas question de sexualité et ces garçons, élevés par des parents protecteurs et permissifs, apparaissent sous deux aspects : dans le milieu familial, ils sont gentils, serviables et respectueux.
Les relations du quartier, les collègues ne pénètrent pas dans le cercle familial. À l'extérieur ce n'est pas la même chose: à l'école puis au collège ils ont tous du mal à accepter l'autorité. Et la solidarité du quartier prime sur le reste. Tous s'accordent à reconnaître "qu'avec une fille de chez nous, cela ne se passerait pas comme ça" et que "jamais ils n'auraient toléré qu'une de leurs soeurs se trouve dans la situation de Patricia".
Des pères, un oncle, des mamans avancent même que Patricia a été "manipulée par les policiers pour mettre les jeunes en prison"! Six ans après les faits, les accusés adoptent une autre posture : la plupart d'entre eux sont mariés, certains ont des enfants et tous ont un emploi. Ils se sont rangés et parlent d'erreurs de jeunesse et d'effet de groupe pour expliquer leurs actes d'incivilité. Mais, en ce qui concerne "l'affaire", ils n'en démordent pas : Patricia était consentante.
L'un d'eux ira jusqu'à dire qu'il a fini par céder face à son insistance...… Le procès se poursuit avec aujourd'hui et demain les auditions d'un expert psychiatre et d'un psychologue qui ont examiné les douze accusés. La Cour se penchera la semaine prochaine sur les faits en présence de Patricia. Verdict le 5juillet après la plaidoirie de Me Geiger, partie civile, le réquisitoire de l'avocate générale Tourn et les plaidoiries en défense de maîtres De Palma, El Bouroumi, Penard, Lemaire, Simonin et Tassy.
(1) Nous modifions, dans le cadre de ce procès qui se tient à huis clos, les identités des accusés et de la partie civile.
http://www.laprovence.com/article/a-la-une/carpentras-la-cour-dassises-plonge-dans-la-tete-des-enfants-terribles

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