Une mère de famille de Peynier, près d'Aix, est jugée cette semaine par la cour d'assises, accusée d'avoir administré à ses trois plus jeunes enfants des doses de morphine qui auraient pu entraîner leur mort. Selon des experts, Nathalie, 42 ans, aurait agi sous l'emprise du syndrome de Münchausen par procuration, une affection psychiatrique rarissime à l'origine d'une forme très particulière de maltraitance parentale.
Tout se joue autour de la Saint-Sylvestre 2006. Le 31 décembre en milieu de journée, Nathalie et son compagnon amènent aux urgences pédiatriques de l'hôpital d'Aix-en-Provence leur fils âgé de deux ans pour de graves troubles neurologiques. Le lendemain, Nathalie passe une partie de la journée à l'hôpital et y revient le soir accompagné de son dernier enfant, un nourrisson de huit mois.
L'intoxication accidentelle écartée
Une heure après leur arrivée, le bébé présente à son tour les mêmes symptômes : des troubles respiratoires et de la conscience, un rétrécissement des pupilles. Le nourrisson fait un arrêt cardio-respiratoire. Seule l'administration de l'antidote de la morphine le sortira du coma. Des analyses sanguines sur les deux garçons confirment une intoxication médicamenteuse avec un produit morphinique. L'expertise des cheveux d'une autre fillette âgée, mettra également en évidence une exposition à la morphine.
L'enquête ouverte par le procureur, dès le 3 janvier 2007, écartera rapidement une intoxication accidentelle. Les prises de produits morphiniques n'ont pas eu lieu au même moment pour les trois enfants. Selon les experts, c'est dans un temps proche de son arrivée à l'hôpital que le nourrisson aurait subi cette intoxication, à l'hôpital même. Ni les aliments et boissons présents au domicile, ni les médicaments apportés à l'hôpital ne contiennent de morphine.
Seule la mère peut être responsable
Cependant, le médecin traitant avait, à plusieurs reprises, prescrit au père, alors en accident du travail, du Moscontin, un morphinique pur. Huit boîtes ont bien été achetées en quelques mois, quatre auraient été données à une maison de retraite mais la trace des autres boîtes n'a jamais été retrouvée. Le témoignage d'un proche de la famille sera décisif. Celui-ci a rapporté avoir reçu de la fille aînée de Nathalie, âgé de quinze ans, la confidence qu'à son retour de l'hôpital, le 2 janvier 2007, sa mère s'était empressée de se débarrasser de médicaments.
Selon les enquêteurs, seule la mère a pu intoxiquer les trois enfants. Il a été procédé par élimination. Le fils aîné alors âgé de 18 ans était absent du domicile. L'horaire d'intoxication du nourrisson exclut le père qui se trouvait à l'hôpital avec l'autre enfant. Si elle donnait parfois le biberon au bébé et à manger à ses petits frère et soeur, l'adolescente ne s'en était pas occupé ces jours-là. Reste Nathalie, la mère, qui a été incarcérée une semaine et dont les enfants ont été placés dans un foyer.
Tout se jouera à l'audience
Premier expert à avoir examiné Nathalie, le Dr Yves Tyrode, psychiatre, a immédiatement diagnostiqué un syndrome de Münchausen par procuration. "Dans ce syndrome, explique le juge d'instruction dans son ordonnance, la mère crée ou aggrave des affections répétitives à ses enfants pour faire montre d'un dévouement, d'un zèle et de qualités d'engagement de nature à susciter l'admiration". Rendre ses enfants malades pour briller comme une mère qui se bat contre la maladie et ne compte ni son temps ni son amour pour ses enfants en danger...
Nathalie a toujours réfuté ce diagnostic, suggérant une intoxication accidentelle. Tout se jouera donc à l'audience. Son avocate, Me Catherine Martini, plaidera l'acquittement de cette mère de famille car "il existe un réel doute sur sa participation aux faits". Mes Carré et Marchesseau défendent l'administrateur des trois enfants. Pour elles, "qu'il y ait ou non syndrome de Münchausen, quelqu'un a empoisonné ces enfants et, au vu du dossier, ce ne peut être qu'elle".
http://www.laprovence.com/article/a-la-une/aix-une-mere-accusee-davoir-empoisonne-ses-enfants
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