mercredi 25 janvier 2012

« Il ne regardait pas les victimes »

Un brin décousu, ce procès en appel du docteur Joël Capobianco, avec ce planning tarabiscoté qui prévoit en effet d’entendre pêle-mêle, durant deux jours, ici l’amie coiffeuse d’une plaignante, là le psychiatre d’une autre, là un généraliste qui vient dire tout le « bien » qu’il pense de ce collègue « un peu borderline » installé à quatre kilomètres de chez lui et dont « les pratiques » – des injections de Valium en intraveineuse sans surveillance – étaient « aberrantes et gravissimes ». Difficile pour les jurés de s’y retrouver alors que les neuf plaignantes ne seront entendues que ce vendredi…
La policière qui a dirigé l’enquête aura eu le mérite de remettre un peu d’ordre dans ce bric-à-brac hétéroclite. « Trois plaintes ont été déposées en 2005. Et ces trois femmes ne se connaissaient pas ». Joël Capobianco est interpellé en janvier 2006. « À son domicile, on trouve beaucoup de Valium. Lors de la garde à vue, il se montre très sûr de lui, assez hautain. Il parle même de lui à la troisième personne : ‘’ je ne peux penser que ces femmes mentent mais je ne vois pas comment le docteur Capobianco a pu faire ça…’’ ».

Agression sur une plage en Bretagne

La police décide de communiquer et, suite à l’article dans la presse, c’est « une avalanche de coups de téléphone. Et on arrive à un total de dix-sept victimes ». Qui racontent toutes peu ou prou la même chose : l’injection, l’inconscience, les caresses, les pénétrations, parfois les proches qui, dans la salle d’attente, tendent l’oreille et remarquent « des bruits bizarres ».
La policière poursuit : « Certaines disaient qu’elles ne pouvaient pas bouger, qu’elles ne pouvaient rien dire mais qu’elles voyaient ce qu’il faisait ». Les enquêteurs se plongent dans leurs fichiers, s’aperçoivent que Joël Capobianco a été condamné à deux reprises : une fois pour avoir filmé sous les jupes des filles au Mac Do, à Nancy, et une autre fois, pour avoir agressé sexuellement une lycéenne sur une plage en Bretagne.
« Ça ne vous paraît pas dangereux, ce recours à la presse ? N’est-ce pas une pente glissante ? », questionne M e Florand. « Cela n’ouvre-t-il pas la porte à toutes les catastrophes judiciaires ? ».

« Avec d’autres hommes c’était délirant… »

Un second enquêteur, qui en a « vu des vertes et des pas mûres » après trente ans de boutique, vient expliquer qu’il a « immédiatement cru ces femmes. Lors des confrontations, il n’était pas serein. Il baissait la tête, ne regardait pas les victimes. J’ai eu le sentiment qu’il allait lâcher le morceau. Puis il s’est repris : ‘’ le docteur Capobianco n’a pu faire ça ‘’ ».
Ce matin, la cour d’assises entendra une ancienne maîtresse du généraliste. « Qui a constaté une évolution de la sexualité de son compagnon », explique la directrice d’enquête. « À la fin, elle le décrivait comme fou, délirant ».
En 1994, lors d’une soirée à Paris dans une boîte de jazz, Pascale, la femme en question, assure avoir pris un verre puis ne pas se rappeler de la suite de la nuit. « Elle pense avoir été droguée. Le lendemain, alors qu’elle demande à Joël Capobianco ce qui s’est passé, il lui répond : ‘’ on a passé une super-soirée, avec d’autres hommes, c’était délirant…’’ ».
http://www.estrepublicain.fr/actualite/2012/01/25/il-ne-regardait-pas-les-victimes

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