vendredi 27 avril 2012

Du risque d'abuser de la mauvaise foi

« Nous soussignés consorts… » Pour les deux orthodontistes concernés, la mention est habituelle dans les courriers qu'ils envoient. Ce sont leurs noms. ça pourrait être leurs signatures. Mais Marie C., leur employée depuis dix-sept ans, a l'habitude de signer des courriers pour eux. Elle est aussi rodée aux rédactions de lettres et autres attestations. Alors, le moment venu, elle semble s'être dit « pourquoi pas… ? »
Ce moment, c'est celui où elle doit produire des pièces pour attester que son récent licenciement est abusif. Après deux décennies comme secrétaire réceptionniste, elle vient d'être mise à la porte pour faute grave. Le motif ? Des lettres et des lettres insultantes adressées à ses employeurs. « Qui vous donne la nausée », estimera l'avocat de la partie civile Me Nougarolis. Des plaintes abusives au tribunal, aussi, contre ses collègues.
Elle reçoit d'abord un avertissement, et puis elle est licenciée. Devant les Prud'hommes, elle produit un courrier attestant qu'elle est « secrétaire comptable ». Une manière de revaloriser sa qualification. Elle assure que l'attestation vient de ses employeurs Problème : secrétaire comptable, le poste n'existe pas dans la nomenclature de ce type d'entreprise. Mensonge ? À l'instruction, elle avait dit avoir rédigé elle-même ce courrier pour bénéficier d'un prêt. À présent, elle ne sait plus. « Ce sont sûrement mes employeurs qui l'ont écrit pour se faire rembourser de la mutuelle », tente-t-elle. La présidente ne voit pas le rapport. « Ils ont du la faire quand ils ont pris la décision de me licencier », assène-t-elle finalement. Le procureur est K.O. « Madame C., c'est le paroxysme de la mauvaise foi », estime-t-il, éberlué. Avant de demander, recentrant ainsi judicieusement le débat : « Avez-vous oui ou non écrit et signé cette attestation ? »
Me Vivier, avocat de la défense, estimera par la suite que, même si sa cliente a produit un faux - ce dont il doute - la jurisprudence a montré qu'elle ne peut être incriminée si cela n'a pas porté préjudice à quelqu'un. « Et où est votre préjudice ? » invective-t-il la partie civile. Peine perdue, Marie C. est condamnée à 8 mois de prison assortis d'un sursis simple. Affaire suivante ! Le procureur demande un huis clos. Le public, des jeunes d'un collège voisin, se lève. « Huis clos, tonne leur professeur, on l'a vu en classe, je ne veux pas de faute ! »

http://www.ladepeche.fr/article/2012/04/27/1340428-du-risque-d-abuser-de-la-mauvaise-foi.html

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