vendredi 22 juin 2012

Octuple infanticide de Villers-au-Tertre : Dominique Cottrez remise en liberté aujourd’hui ?

Le 8 juin, la chambre de l’instruction de Douai avait étudié la nouvelle demande de remise en liberté déposée par les avocats de l’aide-soignante de 47 ans, Me Frank Berton et Me Marie-Hélène Carlier. Mais elle n’avait pas tranché, préférant s’entourer d’un maximum de précautions en demandant « une enquête de faisabilité pour placement sous surveillance électronique ». En clair, elle demandait qu’une enquête de personnalité détermine si Dominique Cottrez pourrait porter un bracelet électronique, outil qui permet d’éviter une fuite ou une non-représentation devant la justice.
« C’est un premier pas vers la liberté », s’était réjoui Me Frank Berton, avocat de l’aide-soignante de 47 ans. Même s’il étonnait de cette requête, qui ne figurait pas dans les réquisitions de l’avocat général. « On imagine mal Mme Cottrez se soustraire à la justice, avait déjà commencé à plaider Me Berton. L’instruction est terminée, plus rien ne s’oppose à la libération de ma cliente qui est détenue depuis vingt-deux mois. Quand on la connaît, on sait que les faits reprochés sont expliquables. De toutes façons, Mme Cottrez ne reprendra jamais une vie normale. Mais la porte est entrouverte vers la liberté. »
Si la décision d’une libération sous contrôle judiciaire était prise aujourd’hui, « Dominique Cottrez ne sortirait toutefois pas de prison dès aujourd’hui », précise Me Marie-Hélène Carlier. « Pas question de lui faire subir la pression médiatique. » Dominique Cottrez serait par ailleurs tenue de vivre désormais dans une résidence secrète, à l’abri des sollicitations des journalistes et des curieux, loin de Villers-au-Tertre.
L’affaire, qui est a priori la plus importante affaire d’infanticides en France connue à ce jour, avait provoqué un véritable déferlement médiatique dans la petite commune de Villers-au-Tertre où l’aide-soignante avait grandi et où elle était considérée comme « l’enfant du village » - ce qui avait décuplé la vague d’émotion dans la commune lors de la découverte des faits.
Dominique Cottrez serait aussi soumise à une obligation de soins médicaux et psychiatriques.
Son mari, Pierre-Marie Cottrez, un charpentier de 48 ans, qui était autorisé depuis plusieurs mois à lui rendre visite une fois par semaine en prison, pourrait être autorisé à la voir.
L’affaire Cottrez sera cependant loin d’être terminée : un procès d’assises, que les avocats de Dominique Cottrez avaient, un temps, espéré éviter, semble désormais incontournable mais ne devrait pas avoir lieu avant fin 2013-début 2014. Quant au débat sur la prescription des infanticides (lire ci-dessous) sur lequel la cour de cassation avait refusé de se prononcer en janvier, il reste d’actualité et devra être tranché : avant ou plus probablement après le procès (en appel).
En prison depuis vingt-deux mois, Dominique Cottrez « a pris conscience de ses gestes », selon Me Carlier : en détention, où elle s’est occupée de la bibliothèque et a maintenu le lien avec son mari et ses deux filles âgées d’une vingtaine d’années, elle « a beaucoup réfléchi, pris du recul et compris beaucoup de choses ».

Rappel des faits
Le 24 juillet 2010, deux corps de nouveau-nés sont retrouvés dans un jardin de Villers-au-Tertre par les nouveaux propriétaires de la maison du père de Dominique Cottrez, mort en 2007. Placée en garde à vue, l’aide-soignante craque et indique aux enquêteurs six autres corps dans le garage de la maison qu’elle occupe alors à quelques rues, dans le même village, avec son mari, Pierre-Marie Cottrez, et où les deux filles du couple, aujourd’hui âgées d’une vingtaine d’années, avaient vécu leur adolescence.
Dominique Cottrez est mise en examen et écrouée pour huit « homicides volontaires sur mineurs de moins de 15 ans ». Mais l’affaire, qui serait la plus importante d’affaire d’infanticides en France connue à ce jour, connaît de multiples rebondissements : révélation de Dominique Cottrez sur les faits d’inceste qu’elle aurait subis de la part de son père et sa crainte que les enfants soient de lui et non de son mari, multiples demandes du procureur de mise en examen de Pierre-Marie Cottrez pour non dénonciation de crimes et recel de cadavres...
Entre les avocats de Dominique Cottrez et le procureur de la République, un véritable bras de fer judiciaire s’était engagé, notamment autour du débat sur la prescription. Grâce aux expertises toxicologiques basées sur les traitements médicaux que prenait leur cliente, les avocats de Mme Cottrez, espérant obtenir un non-lieu, étaient parvenus à démontrer que « sept des enfants sont nés avant 2000, soit plus de dix ans (délai de prescription en matière criminelle) avant la découverte des faits à Villers au Tertre ». Quant au huitième bébé, sa naissance se situerait « entre le 9 juin et septembre voire mi-octobre 2000 », selon la défense. Lors d’un procès devant une cour d’assises, leur cliente ne serait jugée alors que pour un seul infanticide lors d’un procès devant une cour d’assises. La demande des conseils de Mme Cottrez de voir constatée une prescription de l’action publique avait été rejetée par la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Douai, confirmant les décisions du juge d’instruction et du procureur s’appuyant sur la notion d’infraction clandestine (la prescription ne commençait à courir selon eux qu’à partir de la découverte des faits). Mais toutes les parties étaient d’accord sur un point : « Il s’agit de faits très graves, uniques, au moins dans les annales connues. Etant donné le caractère complexe et emblématique du dossier, il faut que les plus hautes juridictions se prononcent », avait estimé le procureur Eric Vaillant. La cour de cassation avait été saisie par les avocats de Mme Cottrez.
Mais en janvier dernier, la chambre criminelle de la cour de cassation n’a pas estimé que « l’intérêt de l’ordre public ni celui d’une bonne administration de la justice ne (commandait) l’examen immédiat du pourvoi » : elle ne s’est donc pas prononcée sur la prescription des faits et a donc ordonné que la procédure suive son cours devant la juridiction douaisienne. Une procédure, particulièrement sensible, qui devrait durer encore longtemps.
http://www.lavoixdunord.fr/region/octuple-infanticide-de-villers-au-tertre-dominique-ia0b0n532842

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