dimanche 19 août 2012

Procès sous tension pour un gang de voleurs à l’organisation militaire

Un dossier particulièrement « complexe sur le plan intellectuel », une tension quasi-permanente dans le prétoire entre prévenus, mais aussi dans la salle du tribunal correctionnel de Bourg-en-Bresse investie par un « comité de soutien » très agité, constitué d’hommes, de femmes, d’enfants, tous issus de cette même communauté itinérante de Roms originaires de l’ex-Yougoslavie.
Au bout du procès, le service d’ordre avait été contraint de disperser le petit groupe par la force, en utilisant des gaz lacrymogènes dans la rue, devant le palais de justice, juste après la lecture du délibéré. Président de séance, le juge Thierry Deschanels se souviendra de ces deux jours d’audience, des
9 et 10 novembre 2010.
L’affaire Dragutinovic, du nom de l’un des deux clans familiaux considérés comme les instigateurs de ce gigantesque réseau de cambrioleurs receleurs, s’était soldée par dix condamnations et une relaxe, entre trois et six ans de prison ferme pour les sept auteurs les plus impliqués.
« Sur la totalité des faits qui pouvaient être reprochés aux uns et aux autres, il y avait eu pas mal de relaxes partielles. La structure du réseau était telle, qu’il était très compliqué de reconstituer les équipes, et de remonter sur les donneurs d’ordre », raconte le magistrat, marqué par « l’organisation militaire » mise en place. Ce sont les plus chevronnés qui pilotaient à distance les faits et gestes des plus jeunes, parfois mineurs, partant dans des véhicules à l’assaut de résidences huppées, dans le Pays de Gex, le val de Saône, mais aussi dans l’Ouest lyonnais ou encore en Savoie. Le scénario : jamais les mêmes équipes, jamais les mêmes véhicules, qui seront souvent brûlés dans la foulée. Une quête effrénée de numéraires, d’or et de bijoux, et la capacité d’écouler en quelques jours, principalement dans les Balkans, les fruits de 20 à 50 cambriolages commis en une seule journée, et en plein jour.
« Un système hyper rôdé », reconstitué grâce aux écoutes téléphoniques décryptées par des interprètes, laissant apparaître toute la précision d’un « travail extraordinaire de repérages » : « Sur place il y avait les mineurs, encadrés par un lieutenant, en contact téléphonique permanent avec un capitaine resté dans le camp, connaissant parfaitement les lieux et donnant des consignes verbales en temps réel. »
Une organisation mafieuse, un monde à part, impitoyable pour les plus faibles, soumis à la loi de la jungle : « En fin d’audience, ceux qui avaient parlé, souvent les plus jeunes, étaient à genoux devant moi, en me demandant de les incarcérer. »
Le juge Deschanels
Responsable juridique au sein d’une grande banque, Thierry Deschanels avait 35 ans lorsqu’il a décidé de se réorienter professionnellement, en intégrant l’école nationale de la magistrature. Lyonnais d’origine, son premier poste l’a propulsé au parquet de Chalon-sur-Saône, où il s’est naturellement spécialisé dans le traitement de la délinquance économique et financière. Après sept années comme parquetier, il est arrivé en 2010 en tant que magistrat du siège à Bourg-en-Bresse, où il a présidé de nombreuses audiences correctionnelles.

http://www.leprogres.fr/ain/2012/08/13/proces-sous-tension-pour-un-gang-de-voleurs-a-l-organisation-militaire

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