Les Védrines ont notamment perdu dix ans de leur vie. Pendant dix ans, onze
membres de cette famille noble du sud-ouest se sont coupés du monde et ruinés en
vendant leurs biens, à l'instigation d'un homme qui disait les protéger d'un
complot : le procès de l'incroyable affaire "des reclus de Monflanquin" a
commencé lundi à Bordeaux. Thierry Tilly, 48 ans, et son complice présumé
Jacques Gonzalez, 65 ans, comparaissent en correctionnelle. Durée prévue du
procès, deux semaines.
L'histoire remonte à 1999 quand Thierry Tilly
rencontre Ghislaine de Védrines, parvenant à ce qu'elle l'embauche dans son
école de secrétariat. Aux autres membres de cette famille connue et aisée, il se
présente comme un agent secret travaillant à "l'équilibre du monde" pour un
groupement "placé au-dessus des états" et luttant notamment contre la
franc-maçonnerie : la "Blue Light Foundation".
Leur incroyable soumission
Peu à peu, il
leur fait croire qu'ils sont la cible d'un complot, mais que, s'ils financent
"le combat", il peut protéger leur vie. Les sceptiques, comme le mari de
Ghislaine sont accusés de tous les vices par Thierry Tilly, qui les fait rejeter
par le groupe. Les autres sont terrorisés, et s'isolent brutalement de leurs
anciennes connaissances. D'abord dans le château familial de Monflanquin
(Lot-et-Garonne) puis au Royaume-Uni. La justice est impuissante, puisqu'ils
paraissent consentir à leur situation, signent des documents et même, voyagent.
Un jour, le frère de Ghislaine et sa compagne -qui a été séquestrée et
privée de tout par le groupe pendant une semaine, pour lui faire avouer un
secret de famille imaginaire-, font défection. Ils racontent alors leur
incroyable soumission à Jacques Tilly. Cet homme que les juges d'instruction
décrivent comme "fin psychologue, excellent juriste et manipulateur de premier
ordre" est arrêté en octobre 2009.
Il se prenait pour un agent secret
Tous
reconnus victimes d'une "emprise mentale", dont ils sont aujourd'hui libérés,
les Védrines ont perdu, outre près de dix ans de leur vie, 4,5 millions d'euros
de biens immobiliers et financiers, et encore des meubles, tableaux, bijoux...
Thierry Tilly a, lui, vécu très confortablement grâce à cet argent. Le plus
curieux, a révélé l'instruction, est qu'il était lui-même "sous l'influence de
Jacques Gonzalez", président de la Blue Light Foundation -une coquille quasiment
vide- arrêté en juin 2010, auquel il a reversé d'énormes sommes. Tilly se
prenait semble-t-il vraiment pour un agent secret.
Toujours en prison,
Thierry Tilly est entre autres jugé pour abus de faiblesse de personne en état
de sujétion psychologique pour toute la famille. Jacques Gonzalez, malade et
libre sous contrôle judiciaire, est jugé pour complicité et recel d'abus de
faiblesse. Ils risquent dix et cinq ans de prison. L'avocat de Thierry Tilly, Me
Novion, juge "grotesque" de parler de "secte" et de "gourou" dans cette affaire,
et espère que le procès "ne s'écartera pas de la logique rationnelle". Me
Picotin, avocat de plusieurs parties civiles et spécialiste des sectes, juge au
contraire l'affaire "emblématique du problème, mal pris en compte en Europe, de
la manipulation mentale", et espère que le procès "fera comprendre qu'elle peut
frapper les gens les mieux installés dans la vie".
Ghislaine
Marchand, membre de cette famille, raconte à TF1 son calvaire. "Ça peut arriver
à tout le monde", dit-elle.http://lci.tf1.fr/france/justice/l-ahurissante-affaire-des-reclus-de-monflanquin-en-proces-7540905.html
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