mercredi 5 décembre 2012

Procès de l'Arche de Zoé / Ils chargent Breteau

Au deuxième jour du procès des bénévoles de l'Arche de Zoé, l'infirmière Nadia Merimi et le Dr Isabelle Rile ont enchaîné les témoignages à charge contre l'organisateur Eric Breteau.
PASSANT du rire aux larmes, l'infirmière Nadia Merimi a livré hier son récit de l'Arche de Zoé, éreintant le président de l'association qui avait tenté d'exfiltrer 103 enfants présentés comme des orphelins du Darfour, et racontant sa peur d'avoir été fusillée au Tchad.
Condamnée à N'Djamena à huit ans de travaux forcés, commués en années de prison en France avant d'être finalement graciée fin mars 2008 par le président tchadien Idriss Déby, la jeune femme est partie civile au procès qui se tient devant le tribunal correctionnel de Paris.
Hospitalisée d'office à son retour en France, elle est « sortie après tout le monde », avec un traitement car elle souffrait de « crises d'angoisse ».
Interrogée par la présidente sur son opinion à l'égard du fondateur de l'association Eric Breteau et de sa compagne Emilie Lelouch, absents devant le tribunal, la jeune femme a lancé : « je peux être vulgaire ? » « Franchement c'est des enc…, je suis désolé, non des enfoirés », a-t-elle dit dans un rire de soulagement.
L'infirmière s'est dite « abasourdie qu'ils ne soient pas là », soulignant que « dans les temps difficiles, Eric disait toujours qu'il prenait l'entière responsabilité » de ce qui arrivait.

« Une petite a demandé sa mère »
Selon elle, « il est tout à fait capable de pointer le bout de son nez la semaine prochaine ».
« Il sait très bien qu'il a des comptes à rendre, il se croit au-dessus de tout », a-t-elle ajouté.
Après l'arrestation du groupe fin octobre 2007 alors qu'ils s'apprêtaient à quitter le Tchad avec les enfants, Nadia Merimi a raconté que le « deuxième jour », ils ont été emmenés face aux enfants. Ils « essayaient de venir vers nous, mais les militaires les repoussaient ».
Ces derniers « nous ont alignés le long d'un mur, je me suis demandé s'ils n'allaient pas nous fusiller », a-t-elle dit en fondant en larmes.
Un épisode également évoqué avec douleur par le pompier Dominique Aubry, qui est également revenu sur les difficiles conditions de détention au Tchad, et estimant qu'il a jusque-là été « gracié mais pas blanchi ».
Un peu plus tôt dans l'après-midi, Isabelle Rile, médecin urgentiste, a expliqué les doutes qui ont précédé son départ du Tchad, et sa « surprise » lorsqu'elle s'est aperçue que les enfants n'étaient pour la plupart ni orphelins, ni du Darfour.
« Avec les mamas (africaines), on a cherché à savoir d'où ils venaient », a raconté Isabelle Rile, qui s'est aperçue que les enfants accueillis dans le camp « Children rescue » à Abéché venaient de cette région du Tchad.
Un jour, « les enfants se sont mis à pleurer » et une « petite a demandé sa mère », a-t-elle raconté. Vérification faite auprès du traducteur, la fillette n'est pas orpheline.
Les enfants pensaient venir à Abéché « pour aller à l'école », a-t-elle dit. Elle avait interpellé Eric Breteau et le médecin Philippe Van Winkerlberg sur le fait que les enfants avaient des parents. En réponse, « ils m'ont expliqué qu'ils étaient malheureux, qu'ils étaient en Afrique ».
Le Dr Rile avait rétorqué aux organisateurs de l'opération que la pauvreté des gens sur place ne justifiait pas pour autant de « leur enlever leurs enfants ».
Ces derniers « étaient en bonne santé », « en bonne forme », « il n'y avait pas de catastrophe médicale du tout », a dit le Dr Rile.


http://www.lunion.presse.fr/article/francemonde/proces-de-larche-de-zoe-ils-chargent-breteau

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