jeudi 21 mars 2013

Auch. Prison ferme pour avoir failli tuer un dealer

Le 12 décembre 2011 à Vic-Fezensac, la maison de Thibaud, toxicomane notoire, a été le théâtre d'un règlement de compte sanglant. Une affaire jugée hier à Auch.
À 1 cm près, Thibaud, auteur de 11 à 16 coups de couteau sur la personne de Vincent, aurait tout aussi bien pu être jugé aux assises, pour meurtre. Et Renaud, qui l'a assisté en donnant deux coups de tournevis et des coups de pieds à la victime, aurait pu être à ses côtés pour complicité. Mais, la jugulaire n'a été qu'effleurée. Vincent n'est pas mort. Et l'affaire a été requalifiée en violences aggravées. Dont acte. Pour autant, qu'est-ce qui a bien pu entraîner un tel déchaînement de violence au domicile de Thibaud, le 12 décembre 2011, à Vic-Fezensac. Premier élément de réponse : la drogue.

Sida, cancer, chagrin d'amour

Moins d'une semaine avant les faits, Thibaud, 52 ans, a fait une tentative de suicide. Il a le sida, un cancer, et celle qu'il aime vient de le quitter ; c'en est trop. Lui qui a l'habitude d'héberger tous les paumés du Gers, souvent des toxicomanes comme lui, est seul. Restent Renaud, 23ans, et Celia, qui se shootent avec lui pour l'avoir à l'œil. Une heure avant la bagarre, Thibaut s'est justement fait un fix, un mélange de cocaïne et d'héroïne, qui est en train de monter quand sonne Vincent. Une visite inattendue. Vincent est un dealer que Thibaud a hébergé à sa sortie de prison. Il veut trouver un arrangement au sujet des 2 100 € (ou 3 000 € selon les versions) volés avant de partir. Seulement, Vincent est «chargé» lui aussi. Et par ailleurs armé d'un revolver qu'il aurait montré à Thibaut avant de le remettre dans sa poche. Renaud et Celia n'ont pas vu la scène. Mais quand tous se retrouvent à la salle à manger et que Vincent fait mine de mettre la main à la poche où se trouve l'arme, Thibaud prend peur, lui saute sur le dos, saisit un couteau sur la table, et frappe au hasard au point de donner un coup de couteau à son ami Renaud qui a spontanément saisi Vincent aux jambes pour l'aider.

Le cocktail cocaïne héroïne

«Sous héroïne, tu te fous de tout. Sous cocaïne, tu te sens surpuissant ; ça a dû jouer», a expliqué l'un d'eux lors de l'instruction. Thibaut explique : «Je me sentais menacé de mort. J'ai cru que j'étais en légitime défense.» Renaud dit qu'en détention provisoire, il a eu le temps de réfléchir. «Cette affaire a été un électrochoc. Je me suis rendu compte que j'avais des œillères à cause de la drogue. J'ai arrêté tous les produits stupéfiants, même la cigarette.» Me Mathias, concède que Vincent, son client, n'est «pas un saint. Mais ce jour-là ce fut un martyr. Son état de santé n'est pas encore consolidé». Le procureur reconnaît un «retour d'humanité» à l'issue de ce règlement de compte sanglant. C'est Thibaud qui a demandé à Célia d'appeler les pompiers tandis qu'il prodiguait les premiers soins à sa victime. Mais Olivier Bataillé rappelle que «la légitime défense, ce n'est pas la crainte d'une agression». Il demande 5 ans ferme contre Thibaut et 30 mois contre Renaud. Me Dulhoste, l'avocate de Renaud, proteste : «Il n'y a pas d'intention. Le catalyseur, c'est le produit stupéfiant.» Elle plaide pour le sursis avec mise à l'épreuve. Me Grolleau, l'avocate de Thibaud, souligne elle aussi que «l'intention homicide fait défaut». Elle pointe du doigt la responsabilité de Vincent, venu intimider son client avec une arme pour qu'il cesse de réclamer ses 3 000€. Elle parle enfin d'un Thibaud qui assume : «La drogue explique ce que j'ai fait, mais elle ne l'excuse pas.» Christine Catugier, la présidente du tribunal, condamne finalement Thibaud à 5 ans de prison dont 1 an avec sursis et mise à l'épreuve. Il est reparti en prison à Mont-de-Marsan. Quant à Renaud, il a écopé de 30 mois dont 15 mois avec sursis et mise à l'épreuve, une peine aménageable. Il est donc ressorti libre, près à changer de vie.

http://www.ladepeche.fr/article/2013/03/15/1582989-auch-prison-ferme-pour-avoir-failli-tuer-un-dealer.html

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